Algérie, 1954. Daru (Viggo Mortensen) est instituteur, un humaniste reclus au fin fond de l’Atlas. Mohamed (redan Kateb) est recherché par la justice pour le meurtre de son cousin. A priori, tout les oppose mais l’Histoire s’en mêle: la Guerre d’Algérie vient de commencer et un des maquisards confie au jeune instit la tâche d’escorter le fugitif jusqu’à la ville de Tinghit pour le remettre à la police. Poursuivis par des villageois réclamant la loi du sang et par des colons revanchards, les deux hommes deviennent solidaires l’un de l’autre, se révoltent, tiraillés entre les indépendantistes et l’armée française.
Inspiré d’une nouvelle d’Albert Camus, L’Hôte, Loin des Hommes se situe assez loin du texte original et de son thème principal, l’engagement, pour amener son film davantage vers une réflexion sur la découverte de l’Autre. Une étude de caractères individuels qui peut sembler fade au début mais se révèle vraiment au contact de la dimension de « western moderne » du film. Chez Oelhoffen, les montagnes de l’Atlas remplacent les plaines arides du Grand Ouest: un territoire brut à maitriser, une frontière à franchir par le maniement des armes et au-delà de laquelle se trouve une nouvelle étape de leur existence, quitte à y laisser des plumes et oublier certaines valeurs.
Le Daru de Loin des Hommes ressemble d’ailleurs pas mal au Tom d’A History of Violence: un homme rattrapé par son passé qui doit s’exclure momentanément de la société. Français par les Arabes et Arabe par les Français, comme il le dit lui-même, Daru n’a sa place nulle part. Face à lui, le timide Mohamed incarne une forme d’altérité totale par sa culture archaïque et sa croyance en une loi tribale incompréhensible pour l’instituteur. Mais le récit avance et dévoie très habilement une complicité naissante (entre parias on se comprend) entre les deux hommes.
Quête de territoire, tension entre mondes nouveau et ancien, loi du sang et vendetta structurent un récit à la progression douce pour décrire le début d’un cataclysme historique. Loin des Hommes est à l’opposé du film engagé sur la Guerre d’Algérie mais se veut plutôt une reflexion sur l’humanité en temps de guerre. Une proposition intéressante, servi par deux grands acteurs que l’on sent impliqués dans le film, mais un film un peu trop classique pour vraiment faire date…
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