Indignité nationale

Suite aux récents attentats, certains demandent le rétablissement de la peine d’indignité nationale. J’ai beaucoup de mal à distinguer l’intérêt d’une telle peine. On fait souvent référence à nos valeurs nationales. Il me semble qu’elles aient beaucoup fléchi ces dernières années. Pour obtenir certains documents ou certaines allocations, nous sommes amenés à rédiger des déclarations commençant par ces mots : «  Je soussigné, nom, prénom, certifie sur l’honneur … » Que peut bien signifier cette référence à l’honneur de nos joursoù l’on a pu entendre la femme du précédent président dire publiquement « pas vu, pas pris » ?

Appliquée à des djihadistes, ce serait une mesure totalement contre-productive. Ces individus vivant avec un système de valeurs totalement opposé au nôtre, ce serait leur décerner un brevet de patriotisme islamique, une médaille (j’allais dire une croix, pardon) d’honneur. Quelle gloire de pouvoir démontrer que l’on a été exclu de la communauté des mécréants !

D’autres Français, suivant leur marotte habituelle, réclament le rétablissement de la peine de mort. Il y a déjà quelque temps, j’avais exprimé mon sentiment sur ce sujet, ici. Pourquoi donc revenir plus de trente ans en arrière, quand un bourreau français décapitait des condamnés tout comme les djihadistes égorgent maintenant des journalistes et des humanitaires ? Pourquoi une telle régression alors même que le nombre des pays non abolitionnistes diminue d’année en année ?

En dehors de ces considérations morales, à quoi servirait une telle peine ? On ne peut arguer d’un éventuel effet dissuasif, les États-Unis en sont le meilleur contre-exemple. Elle peut servir un besoin de vengeance mais son unique « efficacité » est d’interdire toute récidive. Mais, dans le cas qui nous occupe, elle ne sert à rien puisque les auteurs de ces crimes recherchent le martyre. Je citerai ici ce que déclarait Amedy Coulibaly à la caissière Zarie Sibony de l’Hyper cacher de Vincennes : « La différence entre les musulmans et vous, les Juifs, c’est que vous donnez un sens sacré à la vie. Pour vous, la vie est trop importante. Nous, nous donnons un sens sacré à la mort ». Ainsi, le sang des martyrs est la semence d’où surgiront de nouveaux guerriers. Pour s’en convaincre, il suffit de se souvenir de tous les rebelles algériens guillotinés sous la IV° République.