Foxcatcher de Bennett Miller

Publié le 21 janvier 2015 par Emidreamsup @Emidreamsup

Après les biopics (Mr Turner ou Saint Laurent), le fait divers est aussi mis en avant durant ce 67ème Festival de Cannes. Pour raconter le tragique destin des frères Schultz, champions de lutte américains, c’est donc Bennett Miller qui s’y colle. Le cinéaste nous avait déjà fait rêver et surpris avec les excellents Capote et Moneyball. Inutile de vous dire, qu’on était plus qu’enthousiaste à l’idée de découvrir ce Foxcatcher.

Ce film est froid et rude. Les visages fermés et durs. Les corps lourds semblent coincés. Les dialogues sont réduits au minimum. On est effectivement loin du débit mitraillette du scénario de Sorkin pour Moneyball. Résultat : cet état de latence et de contemplation à l’oeuvre dans Foxcatcher a plutôt tendance à avoir un effet somnifère. Il y a des longueurs et on ne peut s’empêcher de se dire que ce récit aurait pu être beaucoup plus efficace s’il faisait moins de 2h10.

En dehors de ce point négatif, il faut bien reconnaître que Miller est brillant.  Le scénario et la mise en scène constituent un travail de maître. Et si les effluves de la Palme d’Or se font sentir avec force à chaque minute,  Steve Carell devrait sans doute possible remporter le Prix d’Interprétation que pour son incarnation de John E. Du Pont. D’ailleurs, les trois acteurs sont magistraux : Tatum, Ruffalo et Carell s’effacent complètement derrière leurs personnages respectifs, leur transformation physique est impressionnante, et leur interprétation, sans faille, illustre à merveille l’expression « performance d’acteur ».

Danse funèbre

John E. Du Pont, héritier d’une des plus grandes fortunes américaines, décide de s’offrir une équipe de lutte. Il commence par séduire Mark Schultz (Channing Tatum), lutteur paumé cherchant à retrouver la gloire. Convaincant son frère, Dave (Mark Ruffalo), de les rejoindre, le trio va essayer alors de former la prochaine équipe de lutte des USA en vu des J.O. Du Pont agit à grand renfort de billets verts et de paroles mielleuses. La relation entre Mark et John devient rapidement perverse. Et le cinéaste, à l’aide de ses acteurs, dévoile peu à peu la domination que Du Pont exerce sur son poulain. C’est malsain et on ne peut s’empêcher d’être parcouru de sueurs froides tant Steve Carell est bluffant. De l’amour à la haine, il n’y a qu’un pas. Et quand le pas est franchi, il est trop tard pour faire marche arrière. Du Pont est un grand malade. Avili par sa mère, désireux de prouver qu’il peut tout réussir, qu’il est un être supérieur, il en devient dangereux, incontrôlable et effrayant.

La lutte transcende le simple sport, elle devient une danse entre ces personnages, qui en laissera forcément au moins un sur le tapis au gong final.

Foxcatcher est loin d’être un film sportif, tout comme Moneyball d’ailleurs. C’est un drame social qui met en scène l’importance de l’argent et le pouvoir qu’il donne à celui qui le possède. Ce film foncièrement glaçant, bien que long et parfois ennuyeux, provoque une certaine fascination effrayante.

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