En 2014, 80 milliardaires possédent autant que 3,5 milliards de personnes
Alors qu'une personne sur neuf ne mange pas à sa faim et que plus d'un milliard de personnes vivent avec moins de 1,25 dollar par jour, l'étude " Insatiable richesse : toujours plus pour ceux qui ont déjà tout ", publiée le 19 janvier 2015 par Oxfam, montre que la part du patrimoine mondial détenu par les 1 % les plus riches est passée de 44 % en 2009 à 48 % en 2014, et dépassera les 50 % en 2016. En 2014, les membres de cette élite internationale possédaient en moyenne 2,7 millions de dollars par adulte !
Selon l'étude, la majeure partie (46 %) des 52 % restant du patrimoine mondial se trouve entre les mains du reste du cinquième le plus riche de la population mondiale. Les autres 80 % de la population mondiale ne se partagent que 5,5 % et possédaient en moyenne 3 851 dollars par adulte, soit 700 fois moins que le patrimoine moyen des 1 %.
L'an dernier, Oxfam avait déjà créé l'événement en révélant que les 85 personnes les plus riches possédaient autant que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Elles sont aujourd'hui 80 à posséder autant que 3,5 milliards de personnes, ce qui représente une baisse spectaculaire, si l'on considère que ce chiffre s'élevait à 388 en 2010. En termes nominaux, le patrimoine des 80 personnes les plus riches du monde a doublé entre 2009 et 2014.
Où les milliardaires ont-ils placé leur argent ?
20 % des milliardaires ont des intérêts dans le secteur de la finance et de l'assurance, et le patrimoine nominal de ce groupe a augmenté de 11 % en douze mois, de mars 2013 à mars 2014. En 2013, ces secteurs avaient dépensé 550 millions de dollars pour faire pression sur les responsables politiques à Washington et à Bruxelles. Rien que pendant les élections américaines de 2012, le secteur financier a financé les campagnes à hauteur de 571 millions de dollars.
L'ensemble du patrimoine net des milliardaires ayant des intérêts dans le secteur pharmaceutique et de la santé a augmenté de 47 %. Eux aussi avaient dépensé 500 millions de dollars pour faire pression sur les responsables politiques à Washington et à Bruxelles, en 2013.
Oxfam craint aujourd'hui que la force de lobbying de ces secteurs ne soit un obstacle majeur à la réforme du système fiscal international et n'impose des règles de propriété intellectuelle qui empêchent notamment les plus pauvres d'accéder à des médicaments vitaux.
Les inégalités extrêmes : un préjudice moral et une abérration économique
"Voulons-nous vraiment vivre dans un monde où 1 % possèdent plus que le reste d'entre nous", s'interroge Winnie Byanyima, directrice générale de l'organisation internationale Oxfam, dans un communiqué. "L'ampleur des inégalités mondiales est tout simplement vertigineuse et, malgré les questions brûlantes qui font l'actualité, le fossé entre les grandes fortunes et le reste de la population se creuse rapidement. Au cours des douze derniers mois, les dirigeant-e-s du monde ont, à l'instar du président Obama et de Christine Lagarde, de plus en plus évoqué le besoin de réduire les inégalités extrêmes. Mais pour beaucoup, nous attendons encore qu'ils joignent le geste à la parole. Il est temps que nos dirigeant-e-s s'attaquent aux intérêts particuliers des poids lourds qui font obstacle à un monde plus juste et plus prospère. "
Et Winnie Byanyima d'ajouter : " Les populations pauvres souffrent doublement de la montée des inégalités : non seulement leur part proportionnelle du gâteau économique se réduit, mais comme les inégalités extrêmes nuisent à la croissance, le gâteau lui-même devient plus petit. "
Suite à la publication de ce rapport, Lynn Forester de Rothschild, PDG de la société E.L. Rothschild et présidente de la Coalition for Inclusive Capitalism a également déclaré : "Le rapport d'Oxfam n'est que le dernier d'une longue liste d'éléments établissant que les inégalités ont atteint des extrêmes scandaleux et continuent d'augmenter. Il est temps que les grandes pointures du capitalisme moderne, ainsi que nos responsables politiques, s'emploient à changer le système pour qu'il devienne plus équitable, plus durable et s'ouvre plus largement à toutes et tous. Les inégalités extrêmes ne constituent pas seulement un préjudice moral. Elles sapent la croissance économique et pèsent sur les profits du secteur privé."
Que faire pour lutter contre les inégalités ?
Oxfam appelle les États à adopter un plan en sept points :
- Mettre un frein à l'évasion fiscale des entreprises et des grandes fortunes
- Investir en faveur de la gratuité et l'universalité de services publics comme la santé et l'éducation
- Répartir équitablement la charge fiscale, l'allégeant du côté du travail et de la consommation tout en taxant davantage le capital et les richesses
- Instaurer un salaire minimum et oeuvrer à un salaire décent pour l'ensemble des travailleuses et travailleurs
- Instaurer une législation en faveur de l'égalité salariale et promouvoir des politiques économiques assurant le traitement équitable des femmes
- Mettre en place une protection sociale suffisante pour les plus pauvres, notamment la garantie d'un revenu minimum
- Adopter l'objectif commun de lutter contre les inégalités à l'échelle internationale
Parce que ces inégalités extrêmes ne sont pas (plus) acceptables, il est grand temps que nos responsables politiques agissent en urgence et de manière concrète !
Stella Giani