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Que dire de plus, sinon que ce livre est une ode à la montagne, à ses beautés, à sa sauvagerie. Un manifeste sur la nécessité de la conserver telle qu'elle est, sans la défigurer, quitte à la réserver à une élite. Certaines phrases pourraient choquer quelques randonneurs du dimanche, ceux qui voudraient que la montagne soit accessible à tous et à tout moment, domptée, dressée, dominée et dévouée. Antoine de Baecque dit souvent tout haut des choses qu'on pense tout bas. Non, la montagne n'est pas une cour de récréation pour Parisiens en manque d'oxygène. C'est le sanctuaire des loups, c'est le domaine des animaux sauvages et des bergers, la solitude des cimes au coeur de laquelle le marcheur se confronte à l'ennui, à la souffrance et à la rudesse, portes d'accès à la beauté du paradis alpin. "Mon corps s'est tissé à la montagne, en marchant. Elle m'a nourri, m'a endurci, j'ai sué sur elle : elle m'a donné son énergie, m'a rempli d'elle et je le lui ai rendu en humeurs et en graisse. Je n'ai pas vécu la montagne comme un cadre aux beaux paysages, mais tel un immense corps vivant où je me suis vidé. Marcher, c'est tenter de recueillir cette force intense, cette wilderness, la sauvagerie, tout en se purgeant. La marche relève de cette ascèse, au sens grec d'exercice, un programme d'exercices qu'on s'impose parce qu'ils participent à la construction de soi en vous intégrant dans la sauvagerie de la nature."
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