J’avais prédit en 2011 que si Ngozi Okonjo Iweala devenait ministre des Finances, elle finirait par démissionner pour garder son intégrité. Que Dieu me pardonne pour cette illusion. Mme Okonjo Iweala est chargée de coordonner l'économie, mais sa prestation reste décevante.
Le 8 janvier 2012, elle a déclaré que les Nigérians tireront des avantages clairs et concrets de la suppression des subventions sur le carburant. Certains des avantages escomptés incluent la construction, l'achèvement et la réhabilitation des chemins de fer, des raffineries, des principales autoroutes fédérales, des centrales hydroélectriques, la technologie de l'information et les projets hydrauliques. Elle a en outre déclaré que le réinvestissement des subventions sur le carburant et le programme d'autonomisation SURE-P, financé par la suppression des subventions, permettrait d’offrir aux populations des chantiers de travaux publics, la formation à l'artisanat pour les jeunes non qualifiés, des services sociaux, et des soins de santé. Elle a déclaré aussi que le gouvernement allait mettre à disposition des citoyens 1 600 autobus pour remédier à la suppression des subventions. Puissions-nous rappeler à Madame la Ministre qu'aucune de ces promesses n’a été tenue depuis la suppression des subventions. Malgré le taux de chômage de plus de 80% et un taux de pauvreté de 70%, Okonjo-Iweala soutient que l'administration de Jonathan a créé 1,6 million d'emplois en 2013. Où sont ces emplois?
Okonjo-Iweala a constamment soutenu que l'économie du Nigeria est en bonne santé, une déclaration justifiée par la réévaluation du produit intérieur brut du Nigeria (PIB) à environ 432 milliards de dollars, faisant du Nigeria la plus grande économie d’Afrique, et le pays d’accueil du Forum Économique Mondial. Cependant, peu de temps après cette réévaluation et l’accueil de cet évènement, il y eut une chute du prix du pétrole. Moins d'un mois après, la plus grande économie autoproclamée en Afrique va mal, au point que l’on n’arrive même pas à payer les salaires. Notre monnaie est dépréciée.
Le gouvernement fédéral, par l'entremise du ministre des Finances et du ministre de coordination de l'Économie, Mme Ngozi Okonjo-Iweala, a annoncé des approches pour relever les défis économiques dela plus grande économie en Afrique. Certaines de ces approches incluent : la réduction du budget de référence, l’instauration d’un impôt spécial sur les produits de luxe, le retrait de 2 milliards de dollars du Compte de l’excédent des revenus de pétrole brut (ECA), le rejet des appels à imprimer plus de monnaie (Naira), et la diversification de l'économie. Nous pouvons diversifier seulement si nous possédons une agriculture mécanisée, une technologie sophistiquée et une industrialisation compétitive. Nous ne pouvons pas fonctionner uniquement avec une économie dépendante de l'importation et s'attendre à une stabilisation de notre monnaie.
En ce qui concerne notre production d’électricité, nous produisions 4 500 mégawatts (MW) par jour en 2007 lorsque nous n’avions pas de ministre de coordination. Après l’arrivée de celle-ci, nous luttons pour produire 3000 mégawatts (MW) par jour. En 2007, nos réserves en devises étaient de 47 milliards de dollars. À l'heure actuelle, nous avons moins de 45 milliards de dollars. En 2007, l’ECA comptait 24 milliards de dollars ; aujourd'hui, on se retrouve avec environ 7 milliards de dollars. Certains Nigérians y compris les gouverneurs d'État soutiennent que le compte est vide. En 2007, nous avions 0% de dette extérieure ; à l'heure actuelle, nous avons plus de 9 milliards de dette et nous continuons à emprunter. De quelle coordination parle-t-on? La ministre de coordination est prompte à souligner que l'économie du Nigeria croît à un taux de 7%. La croissance qui s’accompagne d'inégalités et d'exclusion est-elle souhaitable ou durable?
J’excuse Okonjo Iweala qui ne se rend pas compte que pour être la plus grande économie en Afrique, le Nigeria doit être un État de développement qui agit de façon proactive pour, transformer l'économie et l’appareil étatique, diriger ses affaires, construire des institutions solides, créer un espace pour les organisations de la société civile, et renforcer la capacité de ses citoyens à s’engager dans la bonne gouvernance. D'énormes investissements doivent être faits dans l'éducation et la santé, la croissance inclusive et la création d'emplois. Ce ne sera pas atteint par la réévaluation de notre PIB, mais à travers des politiques et des modèles de développement qui transforment nos 170 millions de personnes en des atouts.
Une façon de devenir la plus grande économie en Afrique, est de mettre l'industrialisation au cœur du processus de développement. Sans industrialisation, nous n’allons pas construire une économie qui va créer des opportunités et mettre fin à la pauvreté. Apparemment, tous les pays qui ont réduit la pauvreté l'ont fait parce que leurs économies se sont développées sur la base de stratégies de croissance industrielle, qui ont créé des emplois durables et des revenus décents. Notre modèle, hérité du colonialisme et fondé sur l'intensification de l’exportation rentière, n’est pas viable pour soutenir notre croissance et notre développement.
Quant à savoir si nous sommes la plus grande économie en Afrique, des bureaucrates payés, des universitaires et des agents du gouvernement font rapidement référence à notre population, la croissance de notre PIB et la réévaluation récente de notre PIB pour amplifier l’illusion de notre grandeur qu’ils ont propagée et promue sans aucun fondement. Notre manque de structure socio-économique solide, de base industrielle opérationnelle, et d’auto-réglementation stable exacerbe encore davantage l'illusion et le manque de compréhension de notre réalité actuelle.
Je suis particulièrement inquiet qu’en dépit du taux de pauvreté élevé au Nigeria, de la poussée des jeunes, du chômage, de l'insécurité, de la corruption endémique, de la dépendance à l'importation, du manque d'éducation, du logement inadéquat et de l'échec de leadership, certains milieux estiment que le Nigeria est la plus grande économie de l'Afrique.
Audu Liberty Oseni, analyste pour www.africanexecutives.com- article initialement publié en anglais par African Executive – Traduction en français réalisée par Libre Afrique – Le 16 janvier 2014