Un lecteur a estimé que mon précédent billet était le fruit d’un esprit pinailleur. Je dois reconnaître que les apparences sont contre moi. Je pense toutefois que l’on n’est jamais assez précis dans l’emploi du langage. Le français fait partie de notre bagage culturel et il me semble important de le préserver. Certains se sont élevés contre le fait d’appeler déportation le mouvement de population préconisé par Zemmour. Ils ignorent sans doute que ce n’est qu’il y a que quelque soixante-dix ans que ce terme a pris un sens supplémentaire, celui d’envoyer des êtres humains dans des camps d’extermination, et que ce mot conserve naturellement son sens premier, déplacer une population contre sa volonté. De même, certains persistent à appeler délation ce qui, bien souvent, n’est que de la dénonciation. Et que dire de ceux qui nous infligent des pléonasmes, tels les casernes militaires, le tri sélectif, le partager ensemble, j’en passe et des pires. Que penser aussi des cuistres qui, pensant exposer leur science, s’obstinent à parler de low cost ou, employant l’expression bas coût pourtant plus accessible à n’importe quelle personne parlant le français, jugent utile d’en faciliter la compréhension en la faisant suivre de son équivalent anglais.
Pour en revenir à notre sujet de caricature, celle-ci, par la seule force du dessin, doit permettre d’identifier le personnage en question. Selon moi, si son auteur doit lui adjoindre un commentaire ou inscrire le nom de la personne « caricaturée » sur une partie de ses vêtements, il a raté sa cible. Supposons que quelque artiste dessine une personne ayant l’allure d’un singe et que moi, simple lecteur, ne parvenant pas à identifier cette personne, je m’imagine reconnaître un certain député auquel je trouve une allure simiesque. Si je conclus que je suis bien devant un dessin de ce député ainsi assimilé à un singe, c’est moi qui manque de respect à cette personne et pas le dessinateur.
On peut ainsi supposer que ceux qui ont reconnu dans un dessin un personnage non identifiable par ses traits peuvent l’avoir fait à partir des caractéristiques que le dit dessin lui attribue. C’est alors eux qui manquent de respect à celui qu’ils croient avoir reconnu car ce sont eux qui imaginent l’avoir identifié grâce à des caractéristiques qu’ils tiennent pour négatives.