La France vient de traverser des jours très difficiles. Des évènements meurtriers l’ont touchée profondément et c’est dans les rues de ses villes, dont surtout celles de Paris, que les Français ont démontré leur angoisse et leurs détresse alors qu’ils étaient en plein désarroi. La réaction fut générale et spontanée.
Du Canada, comme la plupart des Canadiens j’ai suivi ces évènements. D’autant plus que nous étions sensibles devant tant de folie puisque que nous venions de vivre des actes de terrorisme à St-Jean-d’Iberville au Québec et dans notre capitale Ottawa durant lesquels deux de nos braves militaires furent tués sauvagement. Et, il en fallut de peu pour que le nombre de morts soit plus grand. Depuis des années, le journal Charlie Hebdo se moque des religions. Et particulièrement du prophète Mahomet, du pape et d’autres. Même si la direction de ce journal savait qu’un très grand nombre de musulmans du monde étaient offusqués de voir leur prophète être le sujet de ses caricatures, pas toujours flatteuses, et que cela lui avait été souventes fois exprimé par des mouvements musulmans de par le monde qui leur demandaient de cesser cette pratique, elle continuait de ridiculiser Mahomet. De plus, elle connaissait, comme tout le monde, le sort de Salman Rushdie qui avait généré une vague d'émotions dans le monde musulman pour devenirl’objet d’une fatwa (décret d’une société religieuse) de mort suite à la parution de son livre « les versets sataniques » et les violences qui ont suivi. La direction se défendait par le fait qu’en France, il y a la liberté d’expression. Oui, et cela est une bonne chose à laquelle une très forte majorité de français comme de canadiens, américains et occidentaux en général souscrivent. C’est la base de notre démocratie et c’est défendable. Mais peut-on tout faire et tout dire sans croire qu’aucune vive réaction ne surgisse suite à certains propos verbaux, écrits ou caricaturés ? Et s'il y a réaction doit-on simplement dire d’offrir l’autre joue ? On peut circuler en auto partout, mais il ne faut pas dépasser la ligne blanche ou passer tout droit au feu rouge. On peut chanter et crier mais pas la nuit dans un milieu résidentiel. La liberté d’expression nous permet-elle de tout dire et de tout faire ? Le pape François est en voyage pastoral aux Philippines et au Sri Lanka. Il est en Asie dans une partie du monde à forte majorité musulmane. Il ne faut pas oublier que 25% des individus de la planète sont musulmans. Profitant de ce voyage, il a parlé aux journalistes dans l’avion papal qui le mène à sa destination pour répondre clairement à leurs questions justement sur la question de la liberté d’expression. Pour lui, « deux droits humains sont fondamentaux : la liberté d’expression et la liberté religieuse. On ne peut empêcher tout individu de pratiquer librement sa religion sans offenser personne. On ne peut ni offenser, ni faire la guerre, ni tuer au nom de Dieu à cause de sa religion ». Il a rappelé l’Histoire dumonde durant laquelle des guerriers ont conquis des territoires entiers et tué des millions de personnes au nom de la religion. « Une abberration » a-t-il dit. « La liberté religieuse, on doit l’exercer avec liberté, sans offenser, sans l’imposer et sans tuer ».« Non seulement chacun a la liberté du droit d’expression et il a aussi l’obligation de dire ce qu’il pense pour aider le bien commun ». « On ne peut pas insulter la foi des autres ». Ni insulter ceux qui ne pratique aucune religion.« Il ne faut pas réagir violemment, mais si mon ami M. Gaspari (c’est son organisateur de voyages qui est près de lui durant sa rencontre avec la presse), dit un gros mot sur ma mère, il doit s’attendre à recevoir un coup de poing ! C’est normal ». C’est le pape qui parle. « On ne peut pas provoquer, on ne peut pas insulter la foi des autres, on ne peut pas se moquer de la foi ».Son message est clair. On ne devrait pas se moquer impunément des religions des autres qui ont de la dignité et qui respectent la vie humaine et l’homme. C’est le droit religieux de chacun. C’est la limite du droit d’expression.
Claude Dupras