Atis rezistans
La Ghetto Biennale
André Eugène
Madame Ledan
Catalogue de l’exposition Haïti, deux siècles de création artistique
L’art de récupération se pratique souvent dans des milieux défavorisés et c’est particulièrement vrai dans le cas de la Ghetto biennale. Pour Lena Iñurrieta Rodriguez, historienne de l’art cubaine, un milieu ambiant, d’une extrême pauvreté matérielle, serait la source d’inspiration des Atis Rezistans. Peut-on alors associer la pratique d’un art de récupération à un projet social visant à changer la vie d’un groupe à l’aide de matériaux avec lesquels ils vivent tous les jours ? André Eugène propose une réponse : « La Ghetto Biennale représente un changement positif dans mon quartier, elle nous donne une chance de montrer un autre visage de la vie dans les ghettos de Port-au-Prince. Je pense que nous avons beaucoup à offrir et beaucoup à apprendre ». De son côté, dans un récit sur la gestion des débris suite au tremblement de terre, l’auteur haïtien Gary Victor fera dire à un de ses personnages : «Les débris doivent devenir une porte d’entrée dans les quartiers pour qu’on puisse y changer les conditions de vie ». La grand-rue était et est encore un de ces quartiers.
Ces hommes, jeunes et moins jeunes, ont certes quelque chose à offrir, ne serait-ce que l’occasion d’affirmer de telles possibilités créatrices dont ils font aujourd’hui la démonstration. Mais il semble qu’ils veulent aussi montrer que les créateurs haïtiens du groupe sont bien dans un «main stream» puisqu’ils ont invité la participation d’artistes étrangers contemporains, et donc le regard et la «bénédiction» d’une certaine critique étrangère. Celle-ci, on l’a vu dans le passé, est particulièrement attirée par l’exotique, l’étrange. On ne s’étonne point alors du fait que les commentaires insistent, presque tous, sur l’aspect vodou des œuvres présentées par les participants haïtiens. Pourtant, toutes les œuvres présentées à la biennale de 2011 ne sont pas inspirées du vodou.
Frantz Jacques dit Guyodo
Catalogue de l’exposition Haïti, deux siècles de création artistique