Ce livre est un roman-scenario de Jean-Paul Sartre, écrit en 1947, et qui a été adapté au cinéma par Jean Delannoy la même année. Son écriture est donc celle d’un scenario, avec beaucoup de dialogues et surtout de jeux de scène, et un découpage de l’histoire en scènes situées dans des lieux bien définis et bien décrits.
L’histoire : Eve Charlier est une grande bourgeoise, très riche, qui est assassinée par son mari. Celui-ci, chef de la Milice, est un homme sans scrupule qui n’a épousé Eve que pour sa dot, et qui convoite maintenant la jeune sœur d’Eve, Lucette, une jeune fille naïve et égoïste. Eve, empoisonnée par son mari, se retrouve, morte, à faire la queue devant le bureau d’enregistrement des morts, impasse de Laguénésie.
Parallèlement, Pierre Dumaine, une homme modeste, qui a fondé « La Ligue » et se bat clandestinement contre la Milice et le Régent qui gouverne le pays, sa fait assassiner par un jeune homme, un de ses anciens amis, qui l’a trahi. Pierre, abattu par une balle, se retrouve, mort, à faire la queue devant le bureau d’enregistrement des morts, impasse de Laguénésie.
C’est ainsi qu’Eve et Pierre se rencontrent, tous deux réduits à l’état de fantômes, et ne tardent pas à tomber amoureux l’un de l’autre.
Grâce à l’article 140 du règlement qui dirige le monde des morts, Eve et Pierre obtiennent le droit de retourner à la vie et de vivre leur amour pour une journée-test qui décidera de leur sort définitif …
Mon avis : L’idée de faire naviguer des personnages entre le monde des morts et celui des vivants est très séduisante, et très poétiquement traitée dans ce scenario.
On retrouve bien sûr, comme souvent chez Sartre, les préoccupations politiques et de conflit entre les classes sociales (Pierre Dumaine, d’un milieu populaire, pense que son amour pour Eve, une grande bourgeoise très fortunée, est voué à l’échec, et les milieux sociaux sont décrits d’une manière assez caricaturale, mais qui reste plausible).
La morale de l’histoire est pessimiste : « les jeux sont faits », autrement dit : il n’y a pas de deuxième chance, il est inutile pour un mort de retourner sur terre. Ou encore, comme le dit un autre personnage, « on rate toujours sa vie » car on meurt toujours trop tôt ou trop tard.
Il n’en reste pas moins que ce livre a beaucoup de charme, car il est plein de sentiments contradictoires, et que l’amour y occupe finalement une grande place.