Aujourd’hui, je vous raconte comment sont apparues les premières communautés religieuses aux alentours de l’année 513. C’est pas compliqué, il faut des femmes (vierges), de la place, une église, et un mec pour dicter les lois. Ça pue un peu le patriarcat. Ça pue un peu tout court en fait.
Césarie et Césaire sont sur un bateau. Ah non.
C’est l’histoire d’un mec qui est évêque à Arles, (Saint) Césaire, et de sa sœur, Césarie, qui est vierge et qui s’emmerde. En fait, Césarie passe beaucoup de temps à l’Église avec certaines de ses copines, du coup, elles n’ont pas le temps de pécho. Et puis, elles vieillissent et décident de vivre ensemble physiquement leur amour pour Dieu. Par physiquement, je veux pas dire qu’elles couchent ensemble en récitant des Pater Noster, non non. Elles veulent vivre sous le même toit. Ni une ni deux, avec les fonds de l’Église, Césaire va faire construire un monastère à Arles et foutre sa sœur et ses copines dedans. Pour ne pas que ça tourne mal, il va indiquer quelques règles à respecter par les 200 pensionnaires. Des règles religieuses, et chiantes. Evidemment.
Les règles de Césaire
Césaire est la première personne à écrire des règles de vie pour une communauté religieuse de femmes, et ce qui lui importe pour les meufs, c’est leur esprit. Il veut qu’elles soient épanouies dans la religion, sans complaisance, mais sans rigidité non plus. En gros, il veut des règles trankil. Mais des meufs vierges et qui la ferment.
Le noviciat
Le noviciat c’est la période de transition entre la vie laïque et la vie religieuse. Chez Saint-Césaire, la période d’essai est variable. En général, elle dure un an. Or, si la fille est vraiment motivée et fait ses preuves rapidement, en quelques mois ça peut être terminé. En revanche, ça peut durer jusqu’à deux ans pour certaines. C’est la prieure qui décide quand s’arrête le noviciat.
Le vœu de pauvreté
Césaire a décidé qu’il n’y aurait aucune austérité de bouche, c’est pas le régime sec. Ce qui lui importe c’est que la femme abandonne complètement sa vie et son argent. Bin oui, quand on rentre au couvent, on doit donner tout son argent et ses biens (vêtement personnel, mobilier, bijou) à la communauté. C’est facile pour les petites jeunettes qui n’ont pas connu grand chose de la vie, mais pour les plus âgées, souvent veuves et de bonnes familles, c’est compliqué. Il faut accepter d’abandonner ses enfants et sa vie de petite bourgeoise. Au nom de Dieu. A l’intérieur du monastère, il n’y aura pas de différence entre les femmes. Qu’importe qu’elles aient été riches, mariées, pauvres ou célibataires, ce qui compte c’est leur amour absolu pour Dieu.
La loi du travail
Les femmes portent toutes la même tenue. Une robe blanche fabriquée par la communauté. Avec impossibilité de customiser. Les ornements sont interdits. Chaque jour, les femmes vont chercher quelques kilos de laine et vont passer une partie de la journée à filer. Elles ont aussi du boulot à l’infirmerie, pour l’assistance aux malades. A tour de rôle, elles doivent également travailler en cuisine. Il n’y a pas de sœurs particulières vouées aux taches domestiques. Non non, tout le monde s’y met.
Le silence obligatoire
Là,on commence à moins rigoler. Le silence. Les moines ont appris la lecture intérieure, et du coup, on le transmet aux meufs. C’est terminé la lecture à haute voix et la cacophonie dans le monastère. On lit en silence, on mange en silence et évidemment, on prie en silence. J’suis pas du genre bavarde, mais quand même, ça doit être un peu pénible ce silence. Tout le temps. Partout. Enfin, partout sauf à l’infirmerie, où, nécessairement pour être efficace, il faut communiquer. Du coup, le bâtiment est détaché du couvent.
Des vierges sinon rien
Césaire a voulu faire de la chasteté le point le plus important de ses règles monastiques. C’est vrai quoi, Saint-Jean c’est pas un bordel ! Il n’y a qu’une seule personne à qui les meufs peuvent se donner, c’est le Sauveur Jésus ! Il faut lui garder toutes les affections du cœur (et pas du cul) c’est le moyen le plus évident de prouver fidélité et persévérance. « Mes filles, aimez le Christ, si vous voulez garder fidèlement cette virginité que vous lui avez consacrée avec tant d’ardeur. »
Voilà, voilà.
Le monastère n’existe plus aujourd’hui, tout à été pété pendant la Révolution mais il se situait proche de l’Eglise Saint-Jean-le-Moustier, Saint-Blaise et de l’abside paleochrétienne proche des remparts, dans la ville d’Arles.
Et les autres communautés ?
En fait, on parle rarement des moniales, seulement des moines. Du coup, les meufs passent à la trappe coté histoire. On a pas beaucoup d’info. Encore moins du VIème siècle. On sait qu’il y a eu une communauté féminine importante au monastère Sainte-Croix de Poitiers. C’est l’histoire de Radegonde, une fille qui arrive à la cour de Clotaire en tant qu’esclave (avec son frère). Elle a l’avantage d’être très jolie, du coup, elle va rapidement monter en grade (c’est un peu le même schéma que celui de Judith) et devenir l’épouse de Clotaire en 532. Sauf qu’il va faire tuer son petit frère, donc elle décide de s’enfuir et va fonder le monastère à Poitiers. Elle se rend régulièrement à Arles pour apprendre la règle de Saint-Césaire.
Deux autres monastères sont connus, celui institué par Clotilde (femme de Clovis) aux Andélys, et l’autre à Tours. Au VIIème siècle, il y aura celui de Chelles fondé par Bathilde (épouse de Clovis II), qui par la suite, aura la sœur de Charlemagne comme Abbesse. Que du beau monde dans ces couvents !
Parce que vous avez été sages, voilà une moniale qui cueille des phallus sur un arbre. Ca ne s’invente pas.
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- Les règles de Saint-Césaire
- La femme au temps des cathédrales, Régine Pernoud, 1981
- Illustrations Gallica : 1 - 2 – 3 - 4