Cool.
Vous croyez peut-être comprendre ce que je dis quand je dis "cool". Mais l'idée du "cool" est toujours délicate. Subversive. Le "cool" peut être vite dépassé. Ce qui est cool une minute ne le sera peut-être plus du tout dans un an ou deux. Ce ne sera plus cool quand ça manquera de substance, ou si il y a trop de substance, pire, si C'EST une substance. Ça peut aussi cesser d'être cool parce qu'on avait pas réalisé à quel point c'était con sur le coup. Ou parce que ça devient beaucoup trop populaire et c'est dénaturé. Le populaire est souvent inscrit en faux par rapport au cool. Mais avec un peu de chance, vous ou ce que vous trouvez cool serez/sera encore cool dans dix ans. Peut-être plus. La durée est dure à cerner. Travolta 1976: Cool. Travolta 1987: passé date. Travolta 1994: Cool encore. On pourrait dire la même chose des vinyles. 1979: cool. 1989 ringard. Grâce aux DJ et à la tendance vintage, 1996 à nos jours: cool again. Le cool change.
Le culte est pareil. Ce qui est culte implique quelque chose d'underground. Un plaisir souterrain. Partagé, mais entre initiés. L'impression de détenir un secret délicieux que vous êtes presque seul à savourer. C'est presque le concept de l'amant ou de la maîtresse. Mais un brin plus public aussi. Et sans heurts. Le culte est aussi plus ou moins compatible avec le (trop)populaire.
JG Ballard était un écrivain britannique que l'on disait dystopique, post-apocalyptique. Un écrivain de l'anticipation sociale postmoderne. Un homme lourdement affecté par la guerre qui, enfant, a grandi prisonnier des japonais et séparé, avec sa soeur, de ses parents, dans les années 40. Tout ça est documenté dans son livre le plus accessible qui a été adapté en film par Spielberg en 1987. C'est là qu'il tombe en affection avec les avions, mais aussi qu'il apprend à craindre le monde dans lequel il vieillira.
Dans toute son oeuvre, Ballard questionnera toujours subtilement l'évolution des machines et leurs effets sur l'Homme, toujours plus vulnérable à ses yeux. Dans son univers de piscine vides, de techonologies difformes, de voitures érotiques démolies et de séquestrés de l'ennui de Vermillon Sands, Ballard explorera l'urbanisme contemporain et son effet potentiellement étouffant sur ses occupants.
High Rise est publié en 1975 et se trouve à être la dernière partie de la trilogie de béton de Ballard qui comprenait aussi Crash (1973) l'histoire de gens sexuellement déviants, attirés par des prothèses, des corps blessés ou encore des voitures lourdement accidentés. Cronenberg l'a fait en film dans un Toronto qui ne ressemblait pas beaucoup au Londres du livre. La seconde partie est parue en 1974 et s'appelle Concrete Island où l'histoire d'un homme victime d'un accident de voiture et dont l'engin tombe entre plusieurs échangeurs le gardant prisonnier d'un univers de plus en plus dangereux.
High Rise pour sa part, raconte la vie qui dérape au sein d'une communauté habitant une luxueuse tour à logement. À mes yeux de lecteur dans la vingtaine, c'était un chef d'oeuvre. à mes yeux de lecteurs dans la trentaine, une oeuvre grandiose que j'ai aussitôt adaptée en version pour le cinéma. Quand je l'ai relue il y a deux ans je la savourais autant.
Dans les années 70, le producteur britannique Jeremy Thomas a voulu adapter ce livre pour le cinéma avec Nicolas Roeg à la réalisation et Paul Mayersberg au script. C'eût probablement été fameux. Roeg est le réalisateur culte de The Man Who Felt To Earth et Mayersberg en était aussi le scénariste. Mayesrberg allait plus tard, en 1982, co-scénariser avec Nagisha Oshima l'excellent Merry Christmas, Mr Lawrence, encore avec David Bowie à l'image et avec Jeremy Thomas comme producteur.
Le projet n'a jamais débloqué.
Pas avant les années 2000, où Richard Stanley, co-scénariste de la troisième adaptation de The Island of Dr.Moreau en 1996, a à son tour adapté High Rise pour le cinéma. Le réalisateur Étasuno-canadien Vincenzo Natali, auteur du film (culte) Cube allait réaliser le film. Toutefois Natali étant très en demande, il a dû céder sa place à un autre.
L'acteur réalisateur scénariste britannique Bruce Robinson a aussi à son tour adapté ce fameux roman pour le cinéma. Celui qui avait joué dans L'Histoire d'Adèle H. de Truffaut l'année de la parution du livre, qui avait raflé un Oscar pour sa toute première adaptation cinématographique et qui a tourné (et scénarisé) un très culte premier film sur sa vie à Londres dans les années 60 et dont le dernier scénario est une adaptation du premier livre du très culte Hunter S, Thompson , n'a pas trouvé preneur.
Toutefois, Ben Wheatley a repris le projet l'an dernier avec Jeremy Thomas et a confié à son amoureuse, Amy Jump, l'adaptation du livre de Ballard.
Tom Hiddleston (sans barbe sur la photo avec Wheatley), Jeremy Irons, Sienna Miller, Luke Evans, Elisabeth Moss & James Purefoy sont dans le casting.
Brillant d'avoir pensé à un acteur associé à Cronenberg pour jouer du Ballard. Jeremy Irons est un acteur remarquable d'élégance et aussi porteur d'angoisse à l'écran.
Weathley a entre autre réalisé des épisodes de la (culte) série Doctor Who et des clips de musique.
Sa femme et lui peuplent aussi un blogue.
Il a exactement mon âge.
Le film doit sortir cette année.
Les premières projections ont laissé certains de glace.
Cool.
Le culte se conjugue mal avec le populaire.
Sortie discrète quelque part en 2015.
(Gardons ça entre nous)