Dans la peau de Jean-Marie Le Pen

Un de nos auteurs occasionnels reprend sa plume en ces circonstances particulières... 



Aujourd’hui, après m’être mis dans la peau de la fille Le Pen, Marine de son prénom, je reprends laplume et, bon pied bon œil – surtout bon œil – je me mets dans celle du père, Jean-Marie. Autantvous dire qu’à ce rythme, je vais enfin finir dans la petite Marion dont je rêve la nuit la tête posée surmon oreiller de plumes bien blanches de volaille bien française. Je suis Jean-Marie Le Pen donc et jevais vous raconter ma semaine un peu mythomane.Français, gens français (oui c’est de famille),Mon Dieu bien catholique !Sur la tête de mon saucisson pas casher, une semaine pareille ça fait longtemps que j’en avais plusvécu ! Oh oui quelle forme je tiens !Mercredi, attentats dans les locaux de Charlie Hebdo. Jeudi, policière assassinée. Vendredi, prised’otage dans une épicerie casher. Au total, 2 musulmans, 17 morts dont 8 journalistes, 3 policiers et4 juifs, voilà pour le détail. Quelle aubaine !Face à cette opportunité magnifique de voir grandir la haine des étrangers français-malgré-moi,vendredi, alors que je dégustais un bon rôti de porc avec quelques amis et la famille – mon petitLouis et Dieudo (qui n’a mangé que des quenelles) à ma droite, Marine et Christine à ma gauche – jeme dis : « Tiens, des gens sont en train de souffrir, d’avoir peur, d’être tuer peut-être – tout cela n’estqu’un détail, l’essentiel étant qu’ils le sont par des musulmans – je vais appeler à voter pour toi mapetite chérie, histoire de faire une croix bien catholique sur cette histoire de chien qui aurait mangéta chatte. J’ai une idée magnifique : ‘’ Keep calm and vote Le Pen ‘’ ». « Au diable la décence et lerespect, ce n’est pas à mon âge que je vais commencer non plus, faudrait pas veiller à exagérer ».Samedi, tout le monde est Charlie, sauf moi. Non moi, face à l’union nationale sans queue ni tête nifront, face à l’hommage aux victimes de ces attentats, je déplore la mort de 12 français mais je nesuis pas Charlie, non, je suis Charlie Martel, le héros qui en 732 à Poitiers a sauvé la France del’invasion musulmane réussissant là où les partis du système qu’on critique mais dans lequel on veutentrer surtout a depuis fortement échoué. Samedi, je me surprends moi-même à être aussi drôle.J’avais pas ri autant depuis mes propos sur les chambres à gaz comme détail de l’histoire, quelgénie !Dimanche enfin, journée historique ! D’abord, en voyant tous ces gens qui défilent ensemble etparticulièrement les hommes politiques français, je me laisse aller une nouvelle fois à un jeu de motmagnifique comme je sais les faire si bien – « je suis Charlie Martel », « monsieur Durafour crématoire» - et qualifie de « charlots – charlot, charlie - responsables de la décadence de laFrance » tous les gens qui marchent avec la pancarte « je suis Charlie ». Quelle grosse marrade ! Tantpis si ma chère Marine a prononcé elle aussi un discours sous une banderole « je suis Charlie », je memarre ! J’en profite au passage pour annoncer ma candidature aux élections régionales dans le PACAet en rentrant, avec un grand sourire apaisé, cerises sur le gâteau ! Christine qui twitte qu’ils étaientautant à la Manif Pour Tous que dans les rues de Paris aujourd’hui ! Après le comptage de la police,celui des organisateurs, il faudra compter sur celui de Christine ! Pour résumer, au moment la ManifPour Tous sauf pour plein de monde, toute la France était dans la rue ! Bravo Christine ! Ah etDieudo ! « Je me sens Charlie Coulibaly ». Bravo ! Même moi, j’aurais pas osé – de toute façonj’aurais voulu j’aurais pas pu, me faire appeler Coulibaly il y a des limites quand même ! Je l’aime bien ce gars ! Il a des défauts mais son penchant antisémite me plaît bien. Et enfin, Gilbert, ah Gilbert ! Pas l’aveugle, l’autre ! « Jean-Marie Le Pen fait du Charlie ». Faire passer mes conneries pour unhommage à Charlie Hedbo... chapeau !Vive la France…aux français et vive la République !Lundi, je redeviens moi-même et je dégueule. A.M.