Ces derniers jours ont été compliqués pour beaucoup d’entre nous, l’important est de toujours rire de tout, mais j’ai pas envie de vous raconter une histoire sordide. J’ai pourtant un bon article sur la torture sous le coude. Loin des armes, loin du sang et loin de la mort, ça n’a pas été tâche aisée de trouver une idée d’article qui fait du bien, là où on a mal. Aujourd’hui je vous parle de fées, et vous vous dites que j’ai complètement dégoupillé. Devenue cinglée, je me lance dans la science fiction. Mais en fait non. C’est du Lol et de l’art. Du lolart en quelque sorte.
Des vacances en famille
Nous sommes en 1920, en Grande-Bretagne, la petite Frances Griffiths et sa cousine Elsie Wright ont dix et seize ans et vont passer leurs vacances d’été dans une maison de campagne, avec leurs parents. Genre, y’a rien de super folichon dans ce début d’histoire et en plus les noms sont imprononçables pour les franchouillards que nous sommes. Bref, un jour, les deux cousines passent la journée au bord d’une rivière, c’est cool, elles se baignent. Lorsqu’elles rentrent à la maison, elles disent à leurs parents qu’elles ont vu des fées, et que ce sont elles qui les ont poussées dans la rivière. Pas des humains de petite taille avec de fausses ailes, non non, des fées, des vraies fées. Les parents les écoutent, mais n’en ont rien à foutre. Évidemment. Qui écoute des gamines parler de fées ? Personne. Les filles sont punies, les fées n’existent pas.
Pour prouver qu’elles disent vrai, les meufs prennent l’appareil photo du père d’Elsie et partent toute la journée suivante faire des clichés. Au moment de développer les photos, stupéfaction, les filles sont entourées de fées. C’est incroyable. D’ailleurs, le père d’Elsie n’y croit pas et pense à un montage, mais sa mère commence à douter. La première d’une longue série.
Les photos des fées font le tour du pays
Frances et Elsie ne cessent de parler de leurs fées, et leurs parents finissent par parler des clichés. C’est quand même fou, l’histoire se diffuse, petit à petit, et un jour le bruit des fées vient aux oreilles de Sir Arthur Conan Doyle, le mec qui a écrit Sherlock Holmes. Il est super enthousiasmé par les photographies, mais il sait pas trop qu’en penser, alors il va envoyer la série de cinq clichés chez le directeur de Kodak pour faire une expertise. Y’a t’il trucage ?
Suite aux analyses, le mec peut juste répondre qu’il n’en sait rien du tout. Il ne peut pas confirmer qu’il s’agit d’un montage, mais d’un autre coté, il ne peut pas croire à l’existence de fées. Aussi Conan Doyle va envoyer les clichés partout pour prouver l’existence des fées dans cette partie de la Grande-Bretagne. Il va les faire publier dans le magazine « Strand Magazine ». En 1922, il publie même un livre à ce sujet. L’impact médiatique est immense et la polémique va durer de nombreuses années, mais alors ? Elles existent vraiment les fées ?
L’art de l’occulte et du mensonge
L’appareil photo sert à montrer le réel, donc, il peut servir à prouver tout ce qui est paranormal. Aussi, au début du XXème siècle, on fait des photos de fantômes, vampires ou autres trucs à la con.
William Mumler a été un des premiers à photographier des fantômes. Enfin, à faire des clichés plus ou moins grossiers pour nos yeux de XXIèmistes. Âmes vraiment sensibles s’abstenir de cliquer, mais bon ce sont des trucages, hein, on se calme. Fantôme 1 – 2 – 3 – 4 !
Bref les gens y croient. Genre vraiment. Du coup, rapidement, on va oublier les fées. Les filles vont grandir, se marier et vont passer à autre chose Enfin… Jusqu’en 1966, ou le Daily Express va contacter Elsie Wright pour avoir des informations. Elsie et Frances sont unanimes, elles ont rencontré des fées et les ont prises en photo. En 1976, les cousines sont interviewées par la Yorkshire Television, le journaliste demande à Elsie si des figurines ont été fabriquées « Bien sûr que non. Dites-nous comment elle [Elsie] aurait pu le faire. Souvenez-vous qu’elle avait seize ans et que j’en avais dix. Pour une enfant de dix ans, pouvez-vous ainsi traverser la vie et garder un secret ? »
Visiblement, non, puisqu’en 1983, alors qu’elle a 83 ans, Elsie explique dans une lettre avoir confectionné avec sa cousine des fausses fées. Elles ont pris des illustrations d’un livre pour enfant les ont coupées puis collées sur du carton et les cousines ont accroché le montage aux feuilles des arbres avec de fines épingles. En revanche, Frances ne lâche rien et prend encore les gens pour des cons en 1986 où elle nie la déclaration de sa cousine. Et puis, les deux sont mortes, et on saura jamais la vérité. Enfin si. Les fées n’existent pas, mais on le sait depuis toujours.
- Controverses : une histoire juridique et éthique de la photographie, Daniel Girardin, Christian Pirker.
- Voir aussi l’article sur le Baiser de l’Hotel de ville.