Je n'avais jamais entendu parler de L'Amant de Lady Chatterley avant de découvrir la chronique d'Onee sur son blog. Ce classique de la littérature anglaise avait l'air d'aborder un thème intéressant et que je ne rencontre pas souvent dans les romans que je lis : la sexualité. C'est un thème qui m'intéresse beaucoup et que j'espère avoir l'occasion de plus croiser dans mes lectures de 2015 (attention, je ne parle pas de littérature érotique !). Je vous laisse avec Lady Chatterley et son amant et j'espère que cette chronique vous donnera envie à vous aussi de découvrir ce livre :-)
« Époque essentiellement tragique que la nôtre », écrit Lawrence. A la vieille Angleterre aristocratique et rurale déjà meurtrie par l'industrialisation, la Première Guerre mondiale a infligé de profondes blessures. Les protagonistes de ce récit en sont marqués dans leur esprit, dans leur chair, et la déchirure se prolonge dans leur aventure intime.
L'Amant de Lady Chatterley est ainsi, pour le romancier, l'occasion de réaffirmer sa conception de l'amour physique comme moyen de retrouver le contact avec les forces instinctives et naturelles de la vie. Censuré pendant trente ans en Angleterre et aux États-Unis en raison de ses audaces de forme, le récit devait longtemps connaître un succès de scandale. Le lyrisme poétique de l'écrivain y trouve pourtant son ultime expression, un lyrisme provocant, véhément, parfois désespéré, à l'avant-garde de la croisade moderne contre l'intellectualisme.
Constance grandit et rencontre Clifford Chatterley avec qui elle est fière de partager une intimité qui est au-delà du sexe. Il est appelé pour la guerre en 1917 et en revient un an plus tard avec la moitié inférieure du corps paralysée à partir des hanches. Leur envie d'enfant est anéantie.Les époux Chatterley réinventent alors leur intimité : Clifford écrit des romans et Connie le soutient dans cette entreprise. Leur quotidien est calme jusqu’au jour où Connie prend un premier amant et où son mari lui laisse entendre qu'il ne lui en voudrait pas si elle décidait d'avoir une liaison pour donner un héritier au domaine des Chatterley, conscient qu'il en est incapable. La vie de Connie bascule vraiment le jour où elle rencontre le garde chasse du domaine : Mellors... A partir du profil sociologique des personnages et de leur histoire personnelle, on devine facilement les enjeux de la rencontre entre Connie et Mellors. En effet, Connie va s’intéresser à des questions moins spirituelles, elle va prendre de la distance avec la vie qu'elle pensait si noble pour prendre conscience de son corps et de ses sens.
Le thème de la sexualité est selon moi le thème central de cette histoire. Connie, qui ne connaissait que le plaisir intellectuel découvre avec Mellors la sensibilité de la chair et l’importance de la sensualité. A partir de cette découverte, elle va se redécouvrir et se réinventer progressivement en bouleversant ses idées reçues.Si l’on pense souvent que la culture et la pensée élèvent l’homme et l’invitent à l’interroger sur sa vie et sa façon de voir les choses, on s’aperçoit ici que la vie de l’esprit seule ne peut pas combler totalement une personne : Connie va se rendre compte de la nécessité d'écouter son corps et de s'épanouir aussi de manière sensible.
« Voilà qui est vraiment extraordinaire, car il est indéniable que le corps est un embarras. Mais il faut croire que les femmes ne trouvent pas un plaisir supérieur dans la vie de l’esprit.
- Un plaisir supérieur ? demanda Connie en se tournant vers lui. C’est ce genre d’idiotie que tu appelles le plaisir supérieur de la vie de l’esprit ? Alors, non merci ! Je préfère le corps, et je crois que la vie du corps est une réalité supérieure à la vie de l’esprit, à condition que le corps soit vraiment appelé à la vie. Mais il y a tellement de gens qui sont comme tes fameuses machines à vent, des esprits agrafés sur des cadavres physiques. » p.229L'autre point qui me paraît important dans ce roman est le contexte social dans lequel il s'inscrit. En effet, L’Amant de Lady Chatterley a été publié en 1928, or les femmes avaient obtenu le droit de vote dix ans plus tôt mais à partir de leurs 30 ans. Elles obtinrent le droit de vote à partir de 21 ans (comme les hommes) en 1928.Le contexte social de l’époque fait donc la part belle au féminisme et Connie représente ainsi la volonté de liberté et d’indépendance des femmes de l’époque. On remarque en effet que Connie n'est pas un simple pantin fidèle à son éducation : on la voit évoluer au fur et à mesure du roman, ses opinions et sa vision des choses changent. Connie s'impose ainsi comme une vraie héroïne romanesque, un individu à part entière qui prend des décisions, prend le risque de changer d'avis et de s'affirmer.
« Quels menteurs, les poètes et tous les autres ! A vous faire croire que l’on a besoin de sentiment. Alors que le besoin suprême est celui de cette sensualité aiguë, consumante et plutôt terrible. » p.316J'ai trouvé le style de Lawrence agréable et facile à suivre. Il donne un ton particulier à son roman, à la fois tragique et très dynamique. Le ton dramatique qu'il emploie parfois est immédiatement contrebalancé par le patois que parle Mellors par exemple, de telle sorte que l'ambiance générale n'est jamais totalement sombre, comme si Lawrence voulait nous dire que, malgré le désespoir de la situation de Connie, elle n'est pas dans une impasse et elle a le pouvoir de changer les choses.
En fait, j'ai du mal à mettre les mots sur l'atmosphère du roman parce que pendant cette lecture, j'ai senti une certaine distance avec les personnages et les événements. Les personnages, leurs motivations et leurs sentiments profonds m'ont parfois parus difficiles à cerner. Je pense à Mellors en premier lieu, mais Connie m'a aussi parue assez distante. Cela vient peut-être aussi du fait qu'elle-même n'avait pas l'air de savoir ce qu'elle voulait, comme si elle était dépassée par les événements. Malgré sa volonté d'être une femme indépendante et autonome, Connie est en réalité beaucoup plus fragile qu'elle n'en a l'air, mais ça je ne l'ai compris qu'après avoir refermé le livre...
Ce roman nous invite ainsi à nous interroger non seulement sur la façon dont on conçoit l'amour et la place que l'on accorde au sexe dans une relation, mais aussi sur la façon dont se construit un individu par rapport au contexte social qui l'entoure. Le thème de la sexualité est un thème que je ne retrouve pas souvent dans les romans que je lis, et j'ai bien aimé la façon dont il était abordé ici : sans tabou et sans chichi, avec beaucoup de sensibilité et d'émotion finalement.
J'ai beaucoup aimé découvrir Constance, voir la façon dont elle a évolué et les décisions qu'elle a prises. C'est une vraie héroïne qu'on admire facilement : on la plaint dans sa relation avec Clifford et on est facilement enclin à la soutenir dans ses choix et dans émotions.En définitive, c'est un roman que je conseillerais à beaucoup de monde ! D'une part, c'est un classique qui plaira à tous ceux qui en lisent et d'autre part, c'est un livre qui plaira aussi à tous ceux qui veulent voir des thèmes « tabous » ou moins communs abordés dans des livres. En tout cas, c'est certainement un roman qui vous fera réagir et qui vous invitera à réfléchir sur vos propres opinions.
Dites-moi tout : avez vous déjà lu ce livre ou avez-vous envie de le lire ? N'hésitez pas à me conseiller des livres qui traitent du même thème si vous en connaissez ! Je vous embrasse, on se retrouve en milieu de semaine : j'ai très hâte de vous parler de mon premier coup de coeur de 2015 ;-)