un mari jaloux

Publié le 10 janvier 2015 par Dubruel

d'après CONFESSION D’UNE FEMME de Maupassant

Nous avions deux domestiques :

Un garde forestier, Éric,

Particulièrement fidèle

À mon mari, Jean-Noël

Et pour mon service

Une servante, ramenée de Galice

Il y a cinq ans.

Elle n’avait alors que seize ans.

Mon mari et moi, nous chassions beaucoup

Chez nos voisins et chez nous.

Un jour,

L’un des invités,

Le baron Victor de La Ferté,

Me fit un brin de cour.

Quand Jean-Noël partait

Voir ses métayers,

Victor me rendait des visites

Charmantes et fortuites.

Mon mari se montra anxieux,

Jaloux et sourcilleux.

Je m’en suis aperçu :

…Car il ne m’embrassait plus !

Un soir, après le diner,

Il m’a questionné:

« Vous plairait-il

De venir avec moi tuer ce Goupil

Qui cherche sa pitance

En permanence

Dans mon poulailler. »

Surprise, j’allais m’habiller.

Jean-Noël ne disait plus un mot.

Nous partîmes aussitôt

Et atteignîmes en un instant

Le bord de l’étang.

Il me sentit frémir et m’a dit :

-« Est-ce que cette épreuve vous suffit ?

Si oui, rentrez ! »

-« Non. Vous m’avez demandé

De vous accompagner. »

Alors il m’a signalé :

-« Le voyez-vous sous la futaie ? »

Une ombre en effet s’agitait.

Une flamme passa devant mes yeux.

Et sur le sol caillouteux,

À dix mètres, un homme s’écroulait.

J’étais affolée.

Mon mari m’empoigna

Me traina

Jusqu’au corps étendu

Et allait me jeter dessus.

J’ai cru qu’il allait me tuer.

C’est alors qu’il distima

Ma servante Paquita

Amoureusement couchée

Sur le cadavre du garde-forestier.

Elle baisait sa bouche, ses yeux.

Comme un chat furieux.

Mon mari aussitôt comprit

Et s’est excusé :

-« Oh ! Pardon, ma chérie,

Je t’avais soupçonnée. »

Mais moi, au-delà

Des baisers de Paquita,

De ses douloureux sanglots,

De ses vibrants sursauts,

Je me suis juré :

’’Jamais plus, je ne serai

Fidèle

À Jean-Noël.’’