Les auteurs de l’excellent one-shot « Lydie » proposent la suite et fin de ce diptyque qui s’intéresse à la Mondaine.
Si le premier volet invitait à suivre les débuts du jeune inspecteur Aimé Louzeau dans le Paris des années trente, plongeant ainsi le lecteur dans les coulisses de l’ex brigade des mœurs du 36 Quai des Orfèvres, cette conclusion se déroule cinq ans après les évènements du tome précédent.
Au niveau de la grande Histoire, l’occupation Allemande se fait de plus en plus ressentir et le ton devient de plus en plus sombre. En évoquant la rafle du Vel d’Hiv, montrant des milliers de juifs entassés au vélodrome d’hiver dans des conditions inhumaines avant d’être déportés vers les camps de concentration, les auteurs s’attaquent à une page particulièrement sombre de l’Histoire et mettent en avant les faiblesses d’êtres humains qui ne font pas toujours les bons choix durant ses périodes où les notions du bien et du mal ont malheureusement souvent tendance à se perdre.
Malgré des affaires de mœurs qui continuent de mettre à jour des pratiques sordides et un ancrage historique de plus en plus présent, Zidrou s’intéresse en effet principalement à l’humain, comme il sait si bien le faire. En se concentrant sur les états d’âme du policier, Zidrou brosse le portrait d’un personnage finalement attachant, malgré ses défauts. L’inspecteur Louzeau a beau avoir mûri par rapport au tome précédent, il doit néanmoins toujours faire face à des démons intérieurs de plus en plus présents. Il y a d’une part son passé familial très lourd à porter, mais surtout ses sentiments amoureux indécis. Entre une prostituée dont il est follement amoureux, une sauvageonne tahitienne qui continue d’hanter son esprit et une gentille concierge qui constitue une solution de rechange plus convenable, le jeune enquêteur de la Mondaine s’embourbe dans une impasse sentimentale à l’issue fort incertaine. Les seconds rôles ne sont évidemment pas en reste et viennent admirablement compléter ce tableau débordant d’humanité. J’ai cependant trouvé que l’entrelacement de ces drames personnels et de la grande Histoire manquait parfois de naturel, notamment au niveau du changement de ton.
Visuellement, le travail de Jordi Lafebre est par contre toujours aussi efficace. De son admirable restitution du Paris de l’époque à l’expressivité incroyable de ses personnages, en passant par sa capacité à mettre en images les scènes les plus chaudes sans verser dans le voyeurisme, le dessinateur espagnol livre un véritable sans-faute.