En 1958, le Général de Gaulle fit rédiger une Constitution à sa mesure. Sa stature de personnage historique lui donnait la légitimité nécessaire à l’exercice du large pouvoir ainsi attribué au président de la République. Comme il craignait qu’il n’en n'aille pas de même avec ses successeurs, il proposa en 1962 par référendum de changer le mode de scrutin de l’élection du président, le suffrage indirect étant remplacé par le suffrage universel direct. Au terme de son premier mandat, en 1965, il se soumit à cette procédure et fut réélu, après avoir dû toutefois affronter un second tour.
C’est donc cette élection au suffrage universel qui assure la légitimité du président. La récente élection au suffrage universel du président de la République égyptienne illustre cette affirmation puisque la presse a pu dire qu’il était le premier président de la République élu démocratiquement, son prédécesseur n’ayant été élu qu’au suffrage indirect.
Je ne me souviens pas qu’on ait jamais mis en cause la légitimité d’un président de droite. Par contre, il en va tout autrement pour les présidents de gauche. En 1981, Alain de Boissieu, grand chancelier de la Légion d’honneur, avait démissionné pour ne pas avoir à remettre à François Mitterrand, comme cela est la tradition pour tout président élu, le collier de grand maître de l’ordre. Comment un haut dignitaire de la République a-t-il pu ainsi dédaigner la volonté du peuple ? En mai 2012, Alain Minc avait osé déclarer « Celle-ci [La gauche] ne peut gagner que par effraction ». Depuis quand la volonté du peuple peut-elle être assimilée à un fric-frac ? À la même époque, Madame Joissains-Masini, députée et maire d’Aix-en-Provence, avait déclaré : « Même si M. Hollande est proclamé président de la République, je ne pense pas qu'il soit légitime parce qu'il y arrive après un combat anti-démocratique comme on ne l'a jamais vu dans ce pays. »
On voit maintenant poindre ce même refus de la légitimité d’un président élu lorsque certains commentateurs ou hommes politiques se demandent gravement si le président Hollande pourra terminer son mandat. En 2008, négligeant le fait que le Sénat était une assemblée prorogée, Nicolas Sarkozy fit convoquer le Parlement pour une révision constitutionnelle. Celle-ci institua, entre autres dispositions, une procédure de destitution du président en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat. Il a fallu attendre le 24 novembre 2014 pour que la loi correspondante fût promulguée. Heureux retard pour celui qui, le 30 juillet 2010, à Grenoble, avait déclaré « La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère ». Respectait-il alors la Constitution, celui qui était le garant de la loi suprême, laquelle stipule, en son article premier : « Elle [La France] assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion » ?