Un film de Stephen Frears (2014 - UK, France, USA) avec Judi Dench, Steve Coogan, Sophie Kennedy Clarke, Anna Maxwell Martin, Sean Mahon
Emouvant.
L'histoire : Philomena, irlandaise installée à Londres depuis des années, avoue à sa fille que, cinquante ans auparavant, elle a eu un petit garçon, qu'elle n'a jamais oublié. Mère célibataire, dans une Irlande et une époque très puritaines, elle a été placée chez des soeurs catholiques qui offraient un refuge aux jeunes dévergondées, en échange de quelques "menus" travaux... "Libération" prévue au bout de quatre ans consacrés entièrement au service de la congrégation. Philomena et ses consoeurs ont le droit d'aller voir leurs petits bouts une heure par jour et ont hâte de pouvoir partir avec eux, trouver un job, commencer une nouvelle vie. Mais ce qu'elles découvrent, c'est que les soeurs mènent parallèlement une agence d'adoption, sans avertir les mamans. Et Philomena voit ainsi partir un jour son petit Anthony sans même avoir pu l'embrasser. Aujourd'hui, elle ne renonce pas à le retrouver, mais les tentatives qu'elles a faites auprès des religieuses sont restées vaines. Sa fille contacte un journaliste au chômage qui pourrait peut-être les aider à combattre l'omertà.
Mon avis : Un mélo qui a de l'humour. Heureusement, sinon on tombait dans le mièvre, archi vu et revu. Mais grâce à Dame Judi, merveilleuse comme toujours, dans un personnage de femme modeste, pas très cultivée, mais extrêmemement pragmatique, le film est sauvé par sa drôlerie.
L'histoire, adaptée d'un roman autobiographique, est certes bouleversante, mais pas vraiment originale, si ce n'est qu'elle met le doigt sur un fait de société des années 50/60 où des couvents religieux irlandais très stricts recueillaient de jeunes pécheresses, mamans célibataires, et leur enlevaient leurs enfants pour les vendre donner à l'adoption aux Etats-Unis. On pense évidemment aux Magdalene Sisters, de Peter Mullan, bien plus féroce.
Le film est plutôt à considérer comme une sorte de buddy movie, avec une mamie intrépide et déteminée, et un journaliste un peu snob, dépité et désabusé.
Mais à voir surtout pour la prestation de notre belle Judi, ses mille et une expressions, son visage si beau, si finement ridé... Comme le botox semble ridicule et dérisoire lorsqu'on contemple avec tendresse cette femme qui a vécu tant de vies et qui est si belle. Respect.
Steve Coogan est un excellent choix pour donner la réplique à cette actrice qui crève l'écran. Il réussit à s'imposer face à elle (il a fait ses preuves auparavant, remarquez...), le duo fonctionne formidablement bien.
La presse est très généreuse, un poil trop à mon goût. Les spectateurs aussi sont ravis. Tant mieux. Mais je noterai donc, pour équilibrer, les bémols de Télérama : "On note bien quelques fausses notes — dans les flash-back, appuyés et inutiles. Mais, la plupart du temps, le réalisateur évite le chantage lacrymal, à l'image de Judi Dench, formidable en mère Courage qui ne s'apitoie pas sur son sort.", des Inrocks : "On a un peu honte pour Stephen Frears qui, de cette affaire qui révèle l’existence d’un trafic d’enfants organisé entre l’Irlande et les Etats-Unis dans les années 50, n’a su tirer qu’une pochade de boulevard médiocre et populiste, servie d’ailleurs par des acteurs livrés au démon du cabotinage" et des Cahiers : "L’usage à outrance du tire-larmes et des chatouille-zygomatiques, si laborieusement agencés autour de ce tas de bons sentiments, témoigne d’un réel savoir-faire dans le genre téléfilm fondant sous la langue, mais on a le droit de trouver ça ennuyeux et inintéressant au possible."
Sans être aussi méchante, je reconnais que je trouve également le cinéma de Stephen Frears (à part les sublimes Liaisons dangereuses) souvent un poil décevant et convenu. C'est encore une fois le cas... mais il y a Dame Judi.