Les communautés de marque sont des entités complexes, qu’il s’agit d’accompagner à leur juste mesure pour les valoriser à leur juste niveau. Et ne pas les casser leur dynamique socioculturelle qui est leur actif le plus précieux.
What about “brand community”
Tout d’abord, une communauté implique une relation entre des gens qui partagent une connexion commune (l’ADN de la marque en l’occurrence). Cela implique qu’ils partagent un sens de l’ethos, c’est à dire une manière d’être, résultat d’une longue histoire. Ce qui amène à partager naturellement des valeurs et devoirs entre eux (comme avec la marque) (Muniz, O’Guinn). A noter, cet ethos induit une hiérarchie et des statuts en fonction des pratiques, des connaissances et de l’expérience avec la communauté.
“La colle culturelle”
Par ailleurs, les rituels et l’utilisation d’un langage commun construit une “colle culturelle” (cultural glue), qui distingue les membres de la communauté des autres communautés. (Ibid) En conséquence, les membres de ces communautés sont caractérisés par des comportements symboliques qui prouvent leur attachement émotionnel et leur engagement à la marque. Une communauté se distingue d’un simple style de vie (ie Ralph Lauren), car elle produit un système social autant qu’une forme de dévotion / implication. C’est une compréhension commune d’une identité partagée. Sans de liens forts, la communauté se dissout dans une simple loyauté à la marque… du tourisme de marque (voir Disney ou Sephora par exemple).
Les communautés de marque sont rares et spéciales. Ce qui implique qu’elles doivent être accompagnées de manière spécifique. Et humbles. Comme disent Fournier, Sele, Schögel, “n’importe quel manager n’est pas apte à proclamer les buts de la communauté.” En effet, les communautés de marque ne sont pas juste des liens entre consommateurs.
Quels sont les défis ?
Tout d’abord, l’accompagnement des communautés de marques doit être considéré comme une mission stratégique de long terme (Aaker, Joachimsthaler), ce qui parait pour le moins normal. On ne construit pas de relation avec une logique de retour sur investissement à court terme (essayez dans votre couple vous verrez :-)).
Ensuite il faut commencer par bien saisir la nature des relations communautaires : elles sont de quatre niveau : le lien entre consommateur et produit, entre consommateur et marque, entre consommateur et l’entreprise, entre consommateur et…les autres consommateurs (sans doute les plus importants). Or, la moindre relation intègre une partie de la vie et de l’expérience du consommateur. Donc, plus le consommateur est inclus et impliqué dans la communauté de marque, plus il risque d’être loyal (Mc Alexander, Schouten, Koenig).
L’exemple d’Harley Davidson et de “Posse Ride” est une excellente illustration. Les 4 niveaux de relation ont intérêt à être nourri en soi mais aussi en interconnexion les uns avec les autres pour nourrir la logique de réciprocité (Fournier). L’enjeu est alors de proposer des opportunités d’écoute, d’apprentissage et d’échanges… sur le mode de la sérendipité. Les évènements, les forums et les plateformes communautaires sont des excellents outils. A condition de bien savoir les irriguer…
Le principal défi pour l’accompagnateur et donc de développer une vraie intimité avec les consommateurs (et non pas une simple empathie concernant leurs questions). Et l’intimité n’existe pas sans le contexte d’amitié. En ce sens, il est essentiel de partager une profonde et (la plus) complète connaissance (possible) de l’autre : c’est le fondement évident de la confiance. Tout le monde n’est pas doué pour cela : l’accompagnateur doit donc réfléchir à comment il veut être proche de ses publics. Le second défi touche à la loyauté… et son ambivalence, entre celle vis à vis de ses publics et de son entreprise. Or, une communauté est avant tout la propriété de ses membres (consommateurs) et de la culture qui les façonne.
Le rôle de l’accompagnateur est donc plus subtil et nuancé qu’un marketer : il est donc invité à faciliter et rendre accessible la culture communautaire. COmme dit Michael Keefe, VP de HOG, “Mon boulot, c’est de maintenir la flamme et de ne pas tout gâcher.”
En pratique, cela donne :
1. Nourrir la vie sociale de la marque
2. Faciliter la socialisation des nouveaux utilisateurs avec la communauté
3. Accélérer l’acculturation des membres et leur intégration dans le système social
4. Proposer des outils et des marqueurs pour intégrer l’expression dans le système social et développer le capital culturel
5. Nourrir la philosophie et la mystique de la marque
6. Refuser les opportunités qui diluent l’ADN de la marque
7. Offrir des opportunités d’interactions pour la communauté… notamment en créant des contacts rapprochés
8. Ne pas perdre de vue l’équilibre de la communauté : croissance vs cohésion
9. Evaluer…suivant des indices pertinents à l’égard de la relation
En bon “manager”, un accompagnateur doit avant tout savoir garder sa place… et trouver le bon moyen d’alimenter le foyer (sans lequel la communauté risque de se déliter… et de disparaitre).