Les gens de culture, plus que les autres, s’attachent aux formes. Moins au contenu. Je regarde mes livres. Les bibliothèques forment enceinte, autour de ma table de travail. Nostalgie. Je sais que leurs jours sont comptés. Ils ne pourront résister au numérique.
De la Renaissance à nos jours, le livre a été le principal dépositaire, le véhicule de la culture. Il était source culturelle et objet culturel. Un fétiche pour beaucoup. Qui n’a pas entendu les expressions : « odeur de l’encre », « odeur du livre neuf », « craquement du papier », « texture de la page »… Combien ont possédé des collections de luxe qu’ils n’ont jamais feuilletées ?
On en a oublié le contenu.
Le livre importe par ce qu’il contient. Il n’est que support. Après la pierre, les papyrus, la tablette de cire, les parchemins… Et aujourd’hui, nous en sommes aux fichiers électroniques qui permettent le soulignement, la prise de notes, la possession d’une bibliothèque de grande qualité sur un support équivalent à un paquet de cigarettes – et surtout l’accession des moins fortunés à la propriété d’œuvres et de chefs-d’œuvre. Les contenus ne font plus défaut ; c’est le désir – la soif – qui manque. Notre civilisation tend à racornir la part du transcendant en chacun — c’est-à-dire de ce qui dépasse les formes.
L’auteur…
Auteur prolifique, Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon