« Qui, en 1972, aurait-eu l’idée de qualifier le Programme commun porté par le Parti socialiste, le Parti communiste et le Parti radical de gauche, de programme d’extrême gauche ? Quel journaliste ou homme politique conséquent se serait aventuré à déclarer, en 1981, que les 110 propositions du candidat à la présidence de la République François Mitterrand étaient des mesures populistes ?
Pourquoi alors, aujourd’hui, les mouvements et partis de gauche européens tels que Syrisa en Grèce, Podemos en Espagne, le Parti de Gauche en France, affichant des revendications clairement de gauche, mais certainement pas davantage radicales que ne l’étaient à l’époque celles du Programme commun ou des 110 propositions sont-ils qualifiés par les médias et jusqu’à sur ce blog – il ne peut s’agir que d’une maladresse - de partis d’extrême gauche ? (Voir les articles du Monde du 26 décembre 2014 intitulé « Grèce, Espagne : l’envolée de la gauche radicale affole l’Europe » et sur ce blog, l’article du 29 décembre intitulé : « Le Mouvement Syrisa fait peur aux capitalistes et à la bourse d’Athènes » )
Car, ne nous y trompons pas, si le titre de l’article du Monde procède d’une certaine modération, il en va tout autrement de son contenu. À plusieurs reprises, l’expression « extrême-gauche » y est utilisée pour qualifier ces partis et leurs idées qui sont le plus souvent affublées du qualificatif « populistes ».
Dans une remarquable analyse critique parue sur son blog, Antoine Léaument, du Parti de Gauche, dénonce la prétendue neutralité du Monde et décortique la rhétorique employée ayant pour objectif de discréditer ces partis. En les diabolisant par l’emploi des termes d’extrême-gauche, de populiste, voire en leur prêtant des pensées à la limite de la xénophobie. En ridiculisant leurs électeurs à qui l’on prête un épuisement intellectuel et dont on souligne la ringardise de leurs idées. En renvoyant dos à dos, grâce à l’emploi du qualificatif populiste, et comme si elles étaient équivalentes, la gauche radicale et l’extrême-droite. Enfin, et pour conforter le contenu de l’article, à qui fait-on appel en tant qu’experts pour livrer leurs analyses sur la question ? À Dominique Reynié et sa Fondapol, ultralibéral bon teint, à Yves Bertoncini, de Notre Europe, européiste béat et à Yves Camus, un spécialiste nous dit-on de l’Extrême droite…
Cet article du Monde ne relève donc pas de l’information mais bien de la propagande.
Quand un président de la République reniant ses promesses électorales et un gouvernement, prétendument de gauche, adoptent le même discours que la Droite sur la plupart des sujets : l’allongement du temps de travail pour bénéficier de la retraite à taux plein, la banalisation du travail du dimanche, la nécessité de baisser les « charges » de toutes les entreprises sans discernement en leur consentant des cadeaux sans contrepartie, le renforçant du contrôle social sur les chômeurs dans le même temps où l’on ferme les yeux sur l’évasion fiscale opérée par la plupart des entreprises transnationales opérant sur le territoire français, etc., comment s’étonner après cela que les valeurs qui ont fondé la Gauche : l’égalité des chances, la solidarité, le progrès social, la redistribution équitable des richesses, la participation de chacun à l’impôt selon ses moyens, l’émancipation des peuples par l’éducation, apparaissent aujourd’hui comme révolutionnaires ?
Et que cette dérive droitière assumée, ne cherche à se justifier en faisant passer pour extrémistes, toutes celles et ceux qui défendent encore ces valeurs universelles et intemporelles du socialisme telles que les exprimait en son temps le grand Jaurès. »
Reynald Harlaut
(1) le titre est du titulaire de ce blog