Les nouveaux concept-stores parisiens : du beau, du bon et du bien

Publié le 05 janvier 2015 par Adamantium

Pendant les soldes, Colette sera encore plus bondé et L’Éclaireur encore plus dédaigneux, tandis que le personnel de Merci sera totalement débordé ! Si malgré tout vous ne jurez que par les concept-stores, voici quelques boutiques nouvelles, intéressantes et sympathiques où vous ferez de belles trouvailles.

L’année dernière, j’ai travaillé sur un projet de concept-store autour du parfum de niche. Désireux de connaître les « best practices » de cette forme de distribution, j’ai visité les incontournables Nose, Jovoy et Liquides, mais aussi ce que Paris pouvait compter de boutiques répondant à cette définition, devenue assez floue depuis l’inauguration du premier d’entre eux en… 1980 ! Parmi quelques boutiques classique voulant « faire genre » et bon nombre de pièges à bobos, j’ai tout de même eu l’occasion de découvrir des endroits qui représentent la nouvelle tendance des concept-stores : des boutiques qui mettent en avant la proximité, l’authenticité ou la solidarité. A quelques jours de l’ouverture des soldes d’hiver, je vous livre ces bonnes adresses.

Tendance n°1 : Le shopping comme chez soi

Née dans une semi-clandestinité à New-York en réaction au prix élevé des pas de porte, cette tendance s’est rapidement exportée dans toutes les grandes capitales et Paris ne fait pas exception à la règle. Celui qui a poussé le concept à son apogée s’appelle Jean-Baptiste Charpenay-Limon. A 24 ans, ce jeune diplômé de l’ISC Paris et enfant de la télé-réalité a eu l’idée d’emménager réellement dans sa boutique-appartement. Chez Moi, c’est vraiment chez lui ! Ses clients peuvent s’allonger sur son lit et feuilleter ses magazines préférés, ce n’est que tard le soir qu’il ferme les rideaux et qu’il est libre de « se promener tout nu ». Il  joue jusqu’au bout le jeu de la transparence « pour vivre avec son temps et donner aux gens ce qu’ils attendent », selon ses propres termes.. et peut-être aussi pour réduire intelligemment son loyer ?

Dans un genre plus conventionnel, on trouve à Montmartre un appartement-boutique nommé Lekker, ce qui veut dire « agréable » en néerlandais. On y entre par le salon et on termine la visite dans la cuisine aux couleurs pastels pour y prendre un café ou un thé de chez Kusmi. « On avait envie de retrouver un rapport de commerce de proximité avec les gens », m’ont expliqué Sophie et Solène, les créatrices. Elles y multiplient les activités, proposant de nouvelles expos et changeant régulièrement la déco pour toucher différents publics. Un « kkoncept » soigneusement marketé mais réalisé avec délicatesse, et où rien n’est hors-de-prix.

Tendance n°2 : Le sourcing transparent et responsable

A l’heure où même le consommateur lambda se méfie des multinationales de la santé et de l’agroalimentaire, le besoin de transparence grandit et certains concept-stores se sont emparés de cette préoccupation. Ces boutiques valorisent le geste et prônent le respect des belles matières, tout en proposant des produits fabriqués de façon plus éthique.

Alice et Stéphanie, deux sœurs passionnées de design, ont ainsi ouvert nordBØ : une boutique-cocon blanche où souffle l’esprit créatif des pays du Nord et où tout est fait-main et en très petites séries. Si les designers sont en majorité scandinaves, ils se sont installés en Inde ou en Afrique du sud et travaillent en étroite collaboration avec l’artisanat local. La plupart viennent livrer leur travail en personne, à la boutique ! « C’est agréable de travailler avec eux parce qu’ils font du très bon travail, il y a une histoire et de l’émotion. Ça n’est pas la grosse machine et c’est ce qu’on apprécie », explique Alice.

Cette envie de connaître l’histoire de chaque produit est au centre du concept de Storie, un petit espace baigné de lumière ouvert au 20 rue Delambre par Fiona Cameron et Fabien Fournier. S’adressant à une clientèle prête à payer plus cher pour un objet qui a du sens, ils se veulent les promoteurs d’un artisanat responsable et expliquent que derrière chaque objet « il y a des gens, des heures de travail et une culture ». Si on y entre par curiosité, on y reste aussi pour papoter : entre récits de voyage et discussion érudite autour de l’artisanat, la souriante fondatrice a plus d’une « storie » dans son magasin !

Dans la même veine, il est difficile de faire moins standardisé que les produits que propose Amaury Cagniard dans son Amaury Store, un savant mélange entre une droguerie parisienne et une galerie d’art. Celui-ci ne vend que des objets « de belle facture » qu’il dessine lui-même dans son atelier situé au sous-sol, entourés  des créations d’autres artisans qui sont dans le même esprit que lui. Lunettes, sacs en cuir de taurillon mais aussi chapeaux, meubles ou parfums d’Hervé Domar, tous ces produits s’inscrivent dans une même exigence de qualité, avec comme volonté de perpétuer les savoir-faire.

Tendance n°3 : Le financement collaboratif

Time Magazine présentait dès 2011 l’économie collaborative comme l’une des dix grandes idées qui allaient changer le monde. Les concept-stores ne pouvaient pas échapper à cette tendance lourde, à l’instar de L’Avant-Scène. La boutique de Sonia Boukobza et Jérôme Cohen, située dans le quartier de la Bastille, offre régulièrement une vitrine à de jeunes créateurs ne disposant que de peu de moyens financiers et dont certains sont encore étudiants. « Souvent, ils viennent directement avec leurs valises à la boutique et on y trouve des petites merveilles. C’est ce côté frais et spontané qu’on aime », expliquent-ils.

Une démarche d’entraide bien utile, voire nécessaire lorsqu’on veut se lancer dans l’aventure entrepreneuriale, comme l’a bien compris Adrien Crosas. C’est grâce au financement participatif qu’il a pu ouvrir Place-A, d’abord un e-shop créé en 2011 et devenu en octobre dernier une boutique du « South Pigalle ». Une adresse qui regorge de petits objets, souvent des exclusivités repérées sur Tumblr (j’ai décidé d’ignorer la présence des atroces bougies Yankee Candle…) pour se faire plaisir avec un budget raisonnable.

On aurait pu penser les concept-stores démodés ou banalisés, il n’en n’est rien. Alors que Colette est devenu une usine à gadgets griffés aux prix exorbitants qui n’attire plus guère que les touristes, de nouveaux concept-stores parisiens font leur apparition. Ceux-là se veulent plus humbles, plus tournés vers l’humain et ils prônent la sincérité de leur démarche. De bonnes raisons pour aller fureter chez eux, tout en ayant le sentiment d’y respirer l’air du temps.

Hervé Mathieu – Fragrance Forward

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