Nous avons décidé de larguer les amarres, prendre un peu le large pendant quelques temps pour naviguer sous d’autres latitudes, découvrir d’autres ports, rencontrer des personnes différentes qui partageront leurs expériences.
Rassurez-vous, pendant cette période sabbatique, nous ne vous abandonnerons pas : nous avons écrit des articles pour une année entière, qui paraîtront chaque jour à la première minute. Pour vous, ce sera donc « comme si nous étions près de vous »…
Cependant, pour éviter que de petit-e-s « malins » ne profitent de notre absence pour se défouler, les commentaires et évaluations sont désactivés pendant 365 jours.
Pendant cette longue année, nous avons eu l’idée saugrenue, puisque nous devions préparer nos articles très en avance, de les lier à l’éphéméride : chaque jour, nous vous parlerons d’un évènement survenu à Venise à cette date-là. Un pari un peu fou, mais que nous avons réussi (inutile au vénétophages de planquer leurs éphémérides, nous avons terminé d’écrire nos articles depuis longtemps).
Par exemple, en ce premier janvier, nous aurions pu vous parler de :
- La mort à Venise du peintre Francesco Guardi, le 1er janvier 1793,
- La mort de Marino Morosini 44ème doge de Venise, le 1er janvier 1253,
- Casanova, qui, une nuit durant, le 1er janvier 1754, honore sans discontinuer la none M.M. devant le cardinal de Bernis caché derrière des tentures,
- Casanova, encore, qui, dans sa prison, a enfin droit de recevoir des livres le 1er janvier 1756,
- La naissance d’Alvise Pisani, futur 114ème doge de Venise le 1er janvier 1664,
- George Sand et Alfred de Musset qui s’installent à l’Albergo Reale Danieli de Venise, le 1er janvier 1834,
- La première à la Fenice de « Le villi » (Les Willis), opéra-ballet en deux actes de Giacomo Puccini, livret de Ferdinando Fontana, le 1er janvier 1886,
- L’église Santa Maria Mater Domini consacrée pour la 9ème congrégation de Venise le 1er janvier 1773, et dont les membres portent une cagoule blanche sur laquelle est brodée cette marque :
Mais, c’est ce même 1er janvier 1773 qu’autre chose a attiré notre curiosité.
Comme de nombreux praticiens vénitiens, Pietro Gradenigo tient chaque jour un diari. La précision des informations qu’il note dans ce journal chaque jour font que ce document est remarquable pour connaître la vie vénitienne de son temps (au point que ce seul document nous aurait permis de réussir notre entreprise de l’éphéméride – mais c’eût été trop facile).
Ce premier janvier mille sept cent soixante-treize, Pietro Gradenigo note donc ceci à la marge :
Leva il sole ad ore 14; m. 54.
Terza ad ore 17.
Nona ad ore 19; m. 13.
Rialtina ad ore 4.
Mezza notte ad ore 7; m. 13.
Soit : le soleil s’est levé à 15 heures, la Terza a sonné à 17 heures, la Nona a 19 heures, la Rialtina à 4 heures, et minuit était à 7 heures et quart.
Étrange, n’est-ce pas ?
L’explication tient dans le fait que les vénitiens commençaient à compter les heures du jour à partir du coucher du soleil (tramonto).
En cette période de l’hiver, le soleil se couchait, sur Venise vers 17 heures (selon notre mode de calcul).
Donc, un calcul simple permet de comprendre que le soleil s’est levé ce jour-là à 7:54 heures, comme de nos jours, que la troisième cloche (la Terza) sonnait bien à 8 heures en été, et 10 heures en hiver, la Nona a sonné à 12:13 heures, quand à la Rialtina, qui sonnait 4 heures après le coucher du soleil, elle a sonné à 21 heures. Et en fait, il était minuit à 0:13 heures.
… et le temps que vous lisiez cet article, la neige a fondu.