Libérons les gazelles en Algérie

Publié le 30 décembre 2014 par Amroune Layachi
Opérations sauvons les dromadaires en Australie, libérons les gazelles en Algérie

Quand bien même 15 000 km de terres et de mers les séparent, il ne fait pas bon être un dromadaire en Australie ou une gazelle en Algérie. Points communs : le milieu dans lequel ils évoluent, un peu, et les volées de plomb qui les visent, beaucoup. Certains se sont en effet mis en tête de les massacrer, mais d'autres aussi de les sauver. Avec une particularité : des ressortissants de pays du Golfe dans des rôles diamétralement opposés.

Le dromadaire et l'Australie partagent une histoire commune d'un siècle et demi. Introduits aux XIXe siècle par les Européens, les mammifères ont notamment contribué à la construction des lignes de chemins de fer. L'achèvement du réseau et l'arrivée de concurrents nommés camions leur ont ensuite rendu la liberté. Ils ont pu ainsi prospérer dans le bush au point qu'on dénombrait un million de leurs arrière-petits-enfants au début des années 2000. Soit la plus grande population sauvage au monde.

"Horreur" dans le monde arabe

Résultat : l'Australie ne sait désormais que faire d'une espèce qu'elle considère comme une "plaie", détruisant cultures, abreuvoirs et asséchant la moindre source d'eau dans un pays qui en manque cruellement.

En 2009, les autorités ont ainsi débloqué une vingtaine de millions de dollars pour gérer la population de ces animaux. C'est-à-dire en tuer un tiers, selon la chaîneAl-Jazira, qui dénonce des massacres organisés depuis des hélicoptères. Ces images"horrifient" les Arabes pour qui l'animal est – théoriquement du moins – considéré comme un roi, explique la chaîne.

C'est là qu'intervient le Qatarien Ali Sultan Al-Hajri, "un enfant du désert"ayant "grandi avec les dromadaires"qui a débarqué en Australie avec une équipe de la chaîne Al-Jazira dans l'espoir de faire cesser ces tueries. Son idée : que le dromadaire ne soit plus considéré comme une source de problèmes, mais de profits.

De retour dans son pays, "le cœur gros mais plein d'espoir",  Ali Sultan Al-Hajri veut réunir un tour de table d'investisseurs pour développer une "industrie du dromadaire en Australie". Dans les pays arabes et nord-africains, les dromadaires, domestiqués, sont notamment élevés pour leur viande ou pour leur lait.

Dans le sud algérien – une autre contrée du dromadaire –, c'est un autre mammifère qui est sur la sellette : la gazelle. Son habitat naturel s'est en effet dégradé depuis qu'il est devenu champ de tir. Des émirs du Golfe transforment des étendues de désert en réserves de chasse privées pour abattre le bovidé, une espèce pourtant protégée en Algérie.

"Massacrer", disent plutôt les habitants, qui ont orchestré récemment "l'évasion" de tout un troupeau afin qu'il ne soit pas retrouvé par les 4×4 des fines gâchettes émiraties, nous apprend le site d'informations Algérie-Focus : "En clair, des gens très connaisseurs du Sahara ont fait évader tout un troupeau de gazelles pour qu’il ne soit plus fixé dans une zone sillonnée par les caravanes des émirs braconniers."

Car le spectacle de gazelles éventrées et régulièrement abandonnées a fini par faire perdre patience aux habitants de la wilaya d'El-Oued (Sud-Est), d'autant plus que les braconniers-VIP bénéficient d'escortes de gendarmes. "Ces émirs viennent chasser pendant la période de la reproduction des gazelles. Ils ne respectent aucune règle élémentaire de la chasse. Ils tuent le mâle dominant et tirent des balles réelles sur ces animaux protégés”, explique au site un chasseur local.

Après le succès de leur opération, les habitants espèrent sensibiliser leurs concitoyens d'autres régions du Sud touchées par le braconnage. A commencer par ceux de la région de Béchar (Sud-Ouest) où, à l'occasion d'un reportage d'Algérie-Focus dédié à l'agriculture saharienne, on apprend que des Saoudiens ont accaparé les meilleures terres pour s'adonner à... la chasse à la gazelle.

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