Christian de Metter
Casterman
Avril 2014
Colorado, hiver 1896. dans la ferme des McKinley, un homme approche à cheval. Il s'adresse à madame, qui semble vibre seule avec son fils : Sean.
Cet inconnu leur présente ses condoléances pour la mort de son mari, intervenue 6 ans plus tôt, et qu'il a bien connu.
Son cousin est adjoint du shérif d'un patelin proche : Ouvray, et un homme a été arrêté récemment. Ce dernier aurait enlevé une enfant. Or la fille de madame Mc Kinley a disparu il y a six ans. est-ce que l'homme emprisonné pourra l'aider à retourner sa trace ?
...Se servant d'un contexte historique peu glorieux et assez méconnu en France, ou des amateurs d'histoire américaine (le massacre de Wounded knee en 1890)*, Christian de Metter (Emma, Dusk), connu pour ses BD aux peintures expressionnistes, construit un récit prenant, western au ton très polar, se déroulant dans les plaines et montagnes du Colorado.
Celui-ci alterne présent : fuite de Buck Mc Fly, le présumé coupable, aidé par la maman et son fils qui l'ont fait échapper de prison, et flashbacks en 1890 où Mc Fly, dans la neige, sur son cheval, se confie. A cette occasion, il raconte comment, la veille et le jour du désarmement des Sioux à Wounded knee creek, le destin a frappé George, le mari de Jody mc Kinley, mettant en branle l'enlèvement de leur fille.
Mais alors que nos protagonistes chevauchent tous dans ce rude hiver qui les absorbe, Sean et sa mère vont devoir malheureusement continuer seuls leur quête désespérée. Jusqu'à ce que la dure réalité du présent les rattrape…
Une ambiance digne des plus grands "réalisateurs"
Cette poursuite à cheval, jusqu'aux contreforts enneigés a quelque chose de beau qui rappelle les meilleurs films du genre western. La chevauchée des bannis venant immédiatement en mémoire. Tandis que l'épisode tragique de Wounded knee fait bien sûr penser à Little big man, mais refroidit aussi par son implacable aspect documentaire. On reconnait d'ailleurs le vieux chef Big foot figé dans la neige, dans sa célèbre dernière pose.
Christian de Metter, avec ce western intelligent et finement dessiné**, fait de lavis, hachures ou trames sépia (plus un peu de rouge sang) de toute beauté, a produit un récit fascinant et puissant qui reste longtemps gravé après sa lecture. Normal qu'il ait été de nombreuses fois acclamé, (et sélectionné pour le grand prix de la critique Acbd 2015.)
Cet album de 110 pages est un petit chef-d’œuvre, qui pourrait, s'il était adapté au cinéma, devenir aussi un western classique.
(*) Wounded knee, un terrain à vendre.
(**) L'auteur ne nous avait pas habitué à ce genre, qu'il sublime ici.
On relira aussi, avec plaisir dans la même veine, le "Martha Jane Canary", de mathieu Blanchin.
(3 tomes parus chez Futuropolis, 2008-2012)