Permettez-moi un retour en arrière, le temps d'une introduction à un billet, qui sera ensuite présenté en deux parties (Partie 1 ici et partie 2 ici).
L'affaire se passe en 2012, en plein conflit étudiant. J'assiste alors à un party de famille, pour la fête de ma filleule je crois, à qui j'ai offert des cadeaux dont le chou est remplacé par un carré rouge. Je sais que la règle d'or au Québec est de ne pas parler politique en famille, mais je ne planifie pas d'en parler, justement, mais je ne peux nier ce que je suis, et ce pour quoi je me bât dans mes écrits comme quand je marche dans la rue avec les étudiants et autres citoyens qui refusent le projet de société néolibéral du gouvernement Charest. Nous avons donc (un peu) discuté, mes parents, mes soeurs, mes beaux-frères, ma conjointe et moi, de politique québécoise. Je ne reviendrai pas sur les détails de la discussion ici, ce ne sont pas ces détails qui sont importants, ni les opinions des uns et des autres, mais je citerai les trois éléments qui forment le point de départ d'un billet promis depuis deux ans à un de mes beaux-frères.
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Le premier de ces éléments, c'est l'incapacité de mes proches de prendre ma conjointe ou moi au sérieux - je veux dire professionnellement - quand nous abordons les questions de politiques publiques. Pourtant, ma conjointe est diplômée en Études internationales (option sciences politiques) en plus de l'être en administration. Elle a également fait une partie de ses études internationales en Angleterre. Pour ma part, je suis comptable professionnel de formation, diplômé HEC, avec un tronc commun qui incluait l'économie et je me suis, au fil des ans, spécialisé en fiscalité, donc sur certains effets et sur les applications des politiques publiques sur les individus et entreprises.
Ce qui m'étonne encore quand je repense à cette discussion, c'est la non reconnaissance d'une certaine expertise (ou au moins d'une meilleure connaissance du sujet) par mes proches. Pourtant, quand on parle de génie chimique, d'informatique en réseau, de finance agricole, d'enseignement ou de physique mécanique, personne n'irait contester l'expertise de mes proches dans leur domaine respectif, ou ne pas reconnaître au minimum qu'ils savent un peu (plus que les autres) de quoi ils parlent. On parle pourtant de gens éduqués - majoritairement des diplômés universitaires d'ailleurs - et de plusieurs scientifiques. Évidemment, personne n'agit ainsi par mauvaise foi, c'est juste l'habitude issue de certaines couvertures médiatiques des politiques publiques, qui favorise souvent les raccourcis intellectuels, qui est en cause et fait croire à tous que les solutions sont simples. L'idée que l'État se gère comme un budget familial, ou qu'il se gère comme une entreprise privée relève de ce genre de lieu commun réducteur qui est devenu accepté par tous à force d'être répété comme un mantra.
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Le second élément concerne un beau-frère en particulier, qui avait eu l'opportunité (par hasard) de croiser des ministres du gouvernement, dont Raymond Bachand, qui défendait à l'époque la hausse des frais de scolarité comme une "révolution culturelle" au Québec (révolution qui se poursuit aujourd'hui sous l'actuel gouvernement Couillard). J'avais soulevé un sourcil et mentionné que je ne sais pas si j'aurai été jusqu'à serrer la main du Ministre des Finances, puisqu'il était intellectuellement malhonnête dans le dossier des frais de scolarité, et que même si moi, j'étais contre cette hausse, j'aurais aimé qu'il y ait réel débat de société sur la question - un débat honnête - alors que le gouvernement se contentait de diaboliser ceux qui souhaitaient ce débat au lieu d'expliquer leur position et de la défendre honnêtement.
Mon beau-frère nous a expliqué qu'il ne partageait pas nécessairement les opinions du ministre (ni du gouvernement), mais qu'il respectait la fonction. C'est un argument fort louable, mais je n'ai pas pu m'empêcher alors de mentionner que je ne pourrais serrer la main de Jean Charest ou Stephen Harper, tellement ils étaient eux-mêmes cyniques et n'avaient plus de respect pour cette fonction et pour le système parlementaire en général. La discussion qui a suivi a été particulièrement animée, puisque je passais alors pour celui qui n'avait pas de respects pour la fonction et les élus, alors que je dénonçais au contraire que c'était les gens en poste et non moi, qui étaient cyniques et favorisaient le développement du cynisme et du désengagement politique.
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Enfin, le troisième élément est apparu vers la fin de cette discussion politique, alors que je tentais de faire valoir les dizaines (plusieurs dizaines en fait) de textes scientifiques qui existent pour démontrer que les politiques néolibérales sont néfastes, partout où elles ont été appliquées dans le monde. Mon beau-frère m'a invité à lui transmettre ce genre d'articles ou de livres, de lui suggérer des lectures sur le sujet. Après quelques années à lire sur le sujet, je me suis promis de le faire, mais j'ai rapidement réalisé l'ampleur d'une telle tâche et l'étendue qu'aurait ma liste. Je me suis aussi dit que mon beau-frère avait peut-être un peu de temps libre pour lire quelques trucs, mais il ne s'embarquerait certainement pas dans la lecture de 9-10 briques de collectifs ou les centaines d'articles scientifiques de 20-30 pages chaque, souvent en anglais en plus, que je pourrais colliger. J'ai donc laissé tombé et n'ai plus reparlé politique pendant les partys de famille.
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Rassurez-vous, je ne ferai pas cet exercice ici, mais depuis 2012, il s'est écoulé de l'eau sous les ponts (même si ceux-ci menacent parfois de s'écrouler), et nous sommes en période de partys des fêtes en famille, et le mot qui est sur toutes les lèvres semble être «Austérité». je vais donc articuler ce billet en deux parties sur l'austérité autour de cette discussion et dans le but avoué d'informer mon beau-frère - et tous ceux qui ont la curiosité de d'informer proprement à coeur.
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Dans cet esprit, j'invite donc celui-ci (et vous chers lecteurs) à commencer par lire ce micro-guide de survie au partys de famille si jamais ils parlent d'austérité.
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Puis, de passer aux deux parties principales de ce énième billet socio-politique sur ce blogue.
Joyeuses Fêtes,
L'Esprit Vagabond.
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