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Manuel Valls veut ouvrir une nouvelle page dans le socialisme Français. Il peut compter sur une fenêtre de tir particulière. Aura-t-il la volonté de franchir le pas ?
L'analyse et l'espace de Manuel Valls résultent de constats objectifs liés à l'actuel marché politique.
Sur le plan général, trois tendances fortes se dégagent :
- sur le plan social, les différents types d'appartenance prennent de plus en plus d'importance ;
- le moral des Français est en baisse avec la prise de conscience de difficultés croissantes (crise économique, financement des retraites, insécurité, terrorisme international, essoufflement généralisé des atouts français traditionnels…) ;
- l'envie et besoin de changer la société car la vie globalement trop stressante.
Face à ces nouvelles tendances, l'offre politique est décevante :
- les élites, dont les experts, ne sont plus aptes à apporter des réponses efficaces ;
- les programmes des candidats se ressemblent de plus en plus d'où une certaine confusion démotivante ;
- des efforts sont demandés pour des résultats lointains alors que le " citoyen-consommateur " veut des satisfactions " ici et maintenant ". Le dernier espace d'espoir occupé par Nicolas Sarkozy lors de la présidentielle 2007 a rapidement échoué.
Sur la base de ce constat, tout est donc réuni pour un divorce profond entre la demande des citoyens et l'actuelle ou traditionnelle offre politique. Dans ce contexte, le PS se limite à l'offre locale de capitalisation des déceptions.
Sur le plan national, il est encore peu performant parce que :
– il n'arrive pas à symboliser le besoin de changement face à une vie politique frustrante,
– il demeure un parti politique en panne de nouvelles méthodes de démocratie moderne,
– il est manifestement à côté d'attentes incontournables dont le besoin de sécurité des personnes et des biens.
– il n'est pas parvenu à trouver un équilibre entre les nouvelles attentes et ses repères idéologiques traditionnels sur des thèmes sociétaux majeurs dont :
- Droits / devoirs
- Prévention / sanction
- Individu / collectivité
- Liberté / interdiction
- Nation / région
Pour toutes ces raisons, le PS ne parvient pas à capitaliser l'actuelle impopularité de Nicolas Sarkozy.
Tout l'espace de Manuel Valls réside dans sa capacité à incarner le neuf pour :
- accentuer l'image usée de ses concurrents,
- incarner le besoin de changement du PS,
- incarner le besoin de changement ressenti par l'ensemble de l'opinion publique.
Dans cet esprit, trois moyens se dégagent.
Tout d'abord, le changement de nom du PS. Le nom c'est la marque. Il s'agit de bâtir une nouvelle référence à l'exemple de l'opération " New Labour " conduite par Tony Blair à la fin des années 80.
Ensuite, avec lui et autour de lui, il s'agit de rassembler une nouvelle équipe dans un esprit de synthèse. Il faut sortir de l'ambianc des " contre " pour s'installer dans la logique des " pour ". Cette étape suppose que des personnalités emblématiques acceptent de témoigner leur sagesse en se rangeant désormais dans des positionnements de " seconds rôles ".
Enfin, il faut secouer les références idéologiques pour montrer à l'opinion combien le changement est profond.
Cet enjeu n'est pas seulement celui de Manuel Valls.
Il est celui d'une nouvelle génération qui doit s'affirmer, s'émanciper de tutelles anciennes, montrer qu'il est ainsi temps que le pouvoir soit exercé par elle.
Bref, faire l'équivalent de la démarche de Nicolas Sarkozy de 2002 à 2006. Cette génération montrera alors la réalité de l'étendue de ses compétences comme de ses motivations.