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Et si les femmes âgées, souvent seules et précaires, décidaient de vivre en communauté ? C’est l’incroyable projet de la bientôt nonagénaire Thérèse Clerc, fondatrice de la Maison des Babayagas, premier habitat participatif pour femmes retraitées, qui a ouvert ses portes en 2013 à Montreuil (Ile-de-France). Rencontre avec cette militante de la première heure pour qui “innovation” rime avec “ovation”.
A 87 ans, Thérèse Clerc n’a rien perdu de la ferveur qui l’animait déjà il y a cinquante ans quand elle militait pour le droit des femmes et qui faisait déjà d’elle ce qu’on appelle “un personnage”. Et c’est peu dire. Si elle nous accueille aujourd’hui dans sa maison des Babayagas, il aura fallu plus de dix ans de bataille acharnée avec les pouvoirs publics pour parvenir à ouvrir en février 2013 à Montreuil cette maison collective pour femmes âgées à petites retraites. Une maison pour “vieilles” comme les appelle, non sans affection, Thérèse pour qui, “refuser de nommer, c’est refuser la réalité”. Son combat à elle, c’est justement de donner corps à une réalité pas toujours souriante. Et à celle des femmes surtout, qu’elle avortait clandestinement chez elle à l’époque où cela était encore interdit, et dont elle a découvert, avec l’âge, que la vieillesse venait également discriminer. Car ces femmes vieillissantes, souvent divorcées ou veuves, se retrouvent pour beaucoup, faute d’avoir voulu, surtout pu travailler, avec une trop petite retraite. En 1999, alors qu’elle accompagne, faiseuse d’ange encore, sa propre mère dans ses dernières heures, lui apparaît l’urgence de trouver une alternative aux maisons de retraite. Pour cette militante de la première heure, la solution ne peut être que communautaire. Germe alors l’idée d’ouvrir un habitat participatif dédié aux femmes âgées précaires. La maison des Babayagas, référence au personnage mi-fée mi-sorcière des vieux contes russes, est née. La canicule de 2003 et les milliers de décès de personnes âgées laissées pour compte, ne fera que renforcer sa détermination. Après de nombreuses péripéties administratives, le projet, pour être innovant, ne rentrant pas dans des cadres prédéfinis par les aides sociales, finit par trouver ses mentors. Notamment en la personne de Jean-Pierre Brard, alors Maire communiste de la ville de Montreuil (banlieue est de Paris) qui réserve un terrain pour la construction du futur habitat participatif pour “vieilles”. Un article dans le Monde initiant un engouement médiatique de taille, l’engagement de la nouvelle Maire Dominique Voynet et celle du directeur de l’OPHM (office public de l’habitat montreuillois), Jean-Michel Bléry, scelleront le destin des Babayagas. L’Etat, à hauteur de 318 000 euros, la région de 275 000, la commune de 612 000 et le conseil général de 88 000 euros, apporteront les fonds nécessaires à la réalisation du projet. En 2013, la maison des Babayagas, dont l’architecture a été pensée par Thérèse Clerc et ses acolytes des débuts en concertation avec les ingénieurs, ouvre ses portes. C’est le premier habitat participatif autogéré par des femmes âgées sous condition de ressources. Aujourd’hui, ce sont 21 femmes de 66 à 89 ans qui co-habitent, avec plus ou moins de facilité, au 6 rue de la Convention à Montreuil. Les tâches communes ne sont pas toujours bien remplies, les décisions pas toujours unanimes, les atomes pas toujours crochus, mais la maison des Babayas fêtera bientôt ses deux ans, et essaime dans le reste de la France, à Lyon, à Bagneux ou à Palaiseau, où la franchise “Babayagas” ouvrira bientôt ses petites sœurs. http://www.futuremag.fr/la-maison-des-babayagas-unir-ses-forces-au-quotidien?utm_content=buffer87919&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer