Entre Royce Da 5'9 et DJ Premier, c'est une longue histoire. Il y a d'abord eu ce son qui a fait " Boom" , et notre coeur avec. Puis Street Hop, album solo de Royce paru en 2009 que Primo supervisait, et le résultat était assez inégal. Inutile de dire que les attentes sur ce premier projet commun entre le monstre de la rime originaire de Detroit et le légendaire producteur texan étaient grandes, trop grandes peut-être, comme c'était le cas pour l'EP du duo Bad Meets Evil avec Eminem...
PRhyme est le nom de cet album, mais aussi de leur duo et de leur label (PRhyme Records). Un MC, un producteur, neuf titres, quelques gros noms du rap actuel en featuring, sur le papier, cela semble plié d'entrée. Pour relever le tout, et ce qui rend ce projet plus conceptuel qu'il en a l'air, un autre paramètre vient influer sensiblement sur les données de l'équation : une tierce personne, le compositeur Adrian Younge, reconnu pour ses travaux avec Ghostface Killah ( Twelve Reasons to Die) et Souls of Mischief ( There is only now). L'idée (qui ne date pas d'hier puisque Oh No a déjà fait cet exercice) est de sampler uniquement les oeuvres d'un seul auteur, Adrian Younge le cas présent, dont le style soul/rock vinage riche en orgues imprègne tout ce mini-album ('mini' car ne dure que 35 minutes seulement).
Autant aller au fond du problème de PRhyme, et qui justifie la note: c'est le calme plat, en moyenne. La faute à... DJ Premier. Trois, voire quatre morceaux, font réellement vibrer, sur les neuf. Le meilleur titre est " You Should Know" , sample magnifique, la voix de Dwele, des infra-basses qui rehausse le beat, Royce qui " y va jambon " en mode " God level ". En 2e position (mais ça discute), " Wishin' " avec un passage Common (pas transcendant mais quand même là), là encore grâce au beat qui switche sur du gros son bien lourd après un passage presqu'ennuyeux. Les autres morceaux méritant notre intérêt sont " Dat Sound Good" , grâce aux invités Ab-Soul et Mac Miller qu'on n'attendait pas du tout et qui sont de vraies bonnes surprises. Pareil pour Schoolboy Q qui fait sensation sur " Underground Kings " au même titre que Killer Mike qui rend hommage à J Dilla et aux Slum Village.
L'autre moitié de PRhyme, l'électrocardiogramme dessine une ligne horizontale, avec quelques fluctuations de l'encéphalogramme sur " To Me, To You" , grâce au couplet de Jay Electronica (PUTAIN QUAND TU VEUX TU SORS UN DISQUE*) et les Slaughterhouse sur " Microphone Preem" . Depuis quand Primo n'a pas fait des beats qui nous brisent la nuque? " You " de Evidence au moins? et la production d'un album en étant en bonne forme, Blaqprint de Blaq Poet ? ça remonte à loin. Royce de son côté s'en tire avec les honneurs. Certes il stagne à son niveau habituel (très élevé) pour ses égotrips, quoique moins hardcore, mais il met tellement de force et d'investissement dans flow que le emceeing de Five-Nine n'a de cesse de nous impressionner.
En somme, il aurait juste fallu pour PRhyme que Royce da 5'9 pose directement sur les compositions d'Adrian Younge et que DJ Premier ne s'occupe que des scratches et/ou ne fasse que deux-trois beats comme il savait si bien les faire. Les featurings en tout cas, on les garderait tels quels tellement ils font sensation pour la plupart.
*désolé, fallait que ça sorte.