Les États-Unis ont une histoire relativement récente et les Amérindiens n'ont pas laissé de bâtiments aussi spectaculaires qu'au Mexique ou au Pérou. C'est pourquoi l'architecture américaine est marquée par la modernité et l'on pense spontanément aux gratte-ciel des XIXe et XXe siècles comme symboles de cette modernité. Existe-t-il une architecture spécifiquement américaine ? Ou bien n'est-elle que la pâle copie de traditions européennes ? L’architecture aux États-Unis est diverse selon les régions et s'est construite grâce aux apports extérieurs, qui n'ont pas été uniquement anglais. Il semble que cette architecture soit marquée par l'éclectisme, ce qui ne peut surprendre dans une société multiculturelle.
Empire State Building et Chrysler Building, New York
Les Amérindiens
Les exemples d'architecture les plus anciens aux États-Unis se répartissent en deux foyers principaux : le premier se situe dans la moitié orientale, où l'on trouve des témoignages très anciens de la culture des Mound Builders qui construisait des tertres zoomorphes et des pyramides de terre pour enterrer leurs morts. Située dans la vallée du Mississippi, la ville de Cahokia comptait au XIIe siècle entre 15 000et 30 000 habitants. Le site, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, possédait quelque 120 tumulus et/ou temples. Le sud-ouest est la seconde région qui abritait des civilisations amérindiennes disparues au moment où Christophe Colomb « découvre » l'Amérique : les sites archéologiques les plus connus viennent de la culture Anasazi comme Mesa Verde (Colorado) et Chaco Canyon (Nouveau-Mexique), tous deux classés au patrimoine de l'humanité. Occupé depuis 1150, Acoma est le plus ancien pueblo des États-Unis : il s'agit d'un village aménagé sur une mesa et constitué de maisons à toit plat construites en adobe, une brique de terre crue séchée au soleil. Elles tiennent grâce à des poutres en bois apparentes. Leur forme cubique et leur enchevêtrement donnent aux villages cet aspect si singulier qui sera repris par la suite par les Américains (style pueblo).
L'architecture coloniale (XVIe - XVIIIe siècles)
Lorsque les Européens s'installent en Amérique du Nord, ils apportent avec eux leurs traditions architecturales et leurs techniques de construction. L'architecture coloniale est donc évidemment soumise aux influences occidentales. La construction est cependant dépendante des matériaux disponibles sur place : le bois et la brique sont les éléments omniprésents des édifices anglais de la Nouvelle-Angleterre. Elle est aussi liée à la logique de colonisation qui donne lieu à une appropriation politique de l'espace par la métropole (palais du gouverneur, forts). La marque de la domination européenne est aussi économique (douanes, plantations, entrepôts) et religieuse (églises, temples protestants, missions franciscaines et jésuites).
L'exploration espagnole du Sud-Ouest américain commence dans les années 1540. Le conquistador Francisco Vásquez de Coronado parcourt cette région aride à la recherche des mythiques cités d'or des indiens pueblos. Les Espagnols prennent possession des villages amérindiens et font de Santa Fe la capitale administrative de la région en 1609. Le palais des gouverneurs est construit entre 1610 et 1614 en mêlant les influences indiennes (adobe) et espagnoles (grilles en fer forgé). La bâtisse est longue et possède un patio. La chapelle San Miguel de Santa Fe date de 1610 et emploie la technique de l'adobe qui donne à cet édifice religieux une massivité et une austérité frappantes.
Chapelle San Miguel à Santa Fe
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les Espagnols fondent une série de forts (presidios) dans le Sud-Ouest et sur le littoral californien, de l'actuelle Los Angeles à l'actuelle San Francisco. Ils créent également tout un réseau de missions destinées à évangéliser les Amérindiens. La plus célèbre est sans doute celle de San Antonio au Texas (Fort Alamo). Celle de San Gabriel de Yungue-Ouinge (Nouveau-Mexique) est la plus ancienne (1598). La mission d'Isleta au Nouveau-Mexique possède une église en adobe, avec une nef rectangulaire, des contreforts extérieurs, deux clochers symétriques et sans ornementation. La Mission San Xavier del Bac en Arizona est un bon exemple du style churrigueresque en vogue dans le reste de l'Amérique latine. La façade est encadrée par deux tours massives et le portail est rythmé par des estipites, colonnes ouvragées qui ne servent qu'à l'ornementation.
La domination espagnole concerne également la Floride de manière discontinue de 1559 à 1821. Ici, le conch style connut un certain succès à Pensacola par exemple. Il s'agit d'orner les maisons avec des balcons en fer forgé ; on retrouve cette tendance dans le quartier français de La Nouvelle-Orléans, en Louisiane. Les Espagnols construisent aussi des forts comme ceux de Pensacola et de St. Augustine (Castillo de San Marcos National Monument, 1565), qui demeurent les rares vestiges architecturaux du XVIIe siècle aux États-Unis.
A l'Est, l'architecture coloniale ou « victorienne » des 13 colonies est marquée par le modèle anglais. Mais les différences climatiques et religieuses introduisent des éléments américains. En Nouvelle-Angleterre, dans la maison du pasteur Capen à Topsfield (Massachusetts, 1683), la position centrale de la cheminée répond au besoin de chaleur en hiver. Elle est couverte de bardeaux et utilise le bois pour la charpente, deux traits spécifiquement américains. Le puritanisme impose des lieux de culte simples et sobres, dégagés de toute ornementation ostentatoire : les meeting houses (maison de réunion) font office de temple, mais aussi de lieu de sociabilité. La Old Ship Meeting House de Hingham (Massachusetts, 1681) est la plus ancienne église en bois des États-Unis. Son plan n'est pas en croix latine comme celui des églises catholiques. La chaire est placée au centre et la charpente est laissée volontairement visible et nue. Il n'y a pas de décoration ni d'abside.
Le vieux Capitole, Boston, Massachusetts, style georgien
Au XVIIIe siècle se développent le style géorgien et le palladianisme à partir de la ville de Williamsburg en Virginie. Le palais du gouverneur, édifié en 1706-1720, est précédé d'un vaste pignon d'entrée et surmonté d'un lanternon posé sur une plate-forme à balustrade. Il respecte le principe de symétrie. Il associe des matériaux que l'on retrouve en Nouvelle-Angleterre : la brique rouge, le bois peint en blanc et l'ardoise bleue pour le toit à double pente. Il s'inspire aussi de l'architecture baroque anglaise de Christopher Wren et sert de modèle aux demeures des planteurs et des riches marchands de la côte atlantique. Les principes de construction sont la symétrie axiale, l'importance du bâtiment central et le souci des proportions. À Philadelphie, l'Independence Hall fut construit en 1731 sur les plans d'Andrew Hamilton : celui-ci s'inspire de Christopher Wren pour la façade et de James Gibbs pour la tour.
Dans l'architecture religieuse, les éléments communs sont l'utilisation de la brique, parfois du stuc imitant la pierre et d'une flèche unique qui surmonte l'entrée précédée d'un portique à fronton triangulaire : l'église Saint-Michael de Charleston (1752-1761) ou celle de la chapelle Saint-Paul de New York (1764-1766) s'inspirent de l'église St Martin-in-the-Fields à Londres. La First Baptist Church in America à Providence (Rhode Island) est la première à posséder des ouvertures de type palladien et des colonnes toscanes.
Les architectes de cette période sont fortement influencés par les canons du Vieux Monde. Peter Harrison (1716-1755) rapporte de ses voyages des techniques européennes qu'il applique dans l'État de Rhode Island : entre 1748 et 1761, il construit la bibliothèque Redwood et le marché de Newport. Boston et Salem sont les deux principales villes où le style anglais se manifeste, mais un style épuré et adapté au mode de vie américain. L'architecte Charles Bulfinch dote la Massachusetts State House en 1795-1798 d'un dôme doré original. Il travaille à la construction de plusieurs maisons du quartier de Beacon Hill et de Louisburg Square dans sa ville natale de Boston.
Beacon Hill, Boston
Le peuplement de l'ouest des États-Unis modifie les besoins de l'architecture. Les pionniers utilisent la technique de la charpente-ballon dans les années 1840 et 1850. La première utilisation semble remonter à 1833 pour l'édification de l'église St. Mary's à Chicago. Son succès tient à la rapidité de la construction (planches et clous standardisés). Elle permet à chacun de monter facilement la charpente et l'ossature de l'habitation qui est ensuite recouverte de bardeaux. L'intérieur des murs est recouvert de plâtre ou de bois. Elle encourage le développement rapide des villes et autorise une grande mobilité. Cependant, ces maisons n'offrent pas de bonnes conditions sanitaires et brûlent facilement en cas d'incendie.
L'architecture publique de la jeune nation (XIXe siècle)
En 1776, les membres du Congrès déclarent l'indépendance des 13 colonies américaines. Le traité de Paris (1783) reconnaît l'existence d'un nouveau pays républicain, les États-Unis d'Amérique. S'il y a rupture avec le Royaume-Uni sur le plan politique, les influences anglaises continuent de marquer les édifices construits dans cette partie du Nouveau-Monde. Les commandes publiques, philanthropiques et commerciales se développent en parallèle avec la croissance démographique et l'extension territoriale. Les édifices des nouvelles institutions fédérales et judiciaires adoptent le vocabulaire classique (colonnes, dôme et fronton), en référence à l'Antiquité gréco-romaine. Les publications concernant l'architecture se multiplient : en 1797, Asher Benjamin publie The Country Builder's Assistant. Les Américains cherchent à affirmer leur indépendance dans tous les domaines : politique, économique, mais aussi culturel, avec la fondation d'universités et de musées. C'est à la fin du XIXe siècle que cette indépendance et ce dynamisme s'expriment le mieux.
Thomas Jefferson, qui fut président des États-Unis entre 1801 et 1809, a manifesté de l'intérêt pour plusieurs domaines dont l'architecture. Ayant séjourné à plusieurs reprises en Europe, il souhaite appliquer la syntaxe formelle du palladianisme et de l'Antiquité à des édifices publics et privés, en ville et à la campagne. Il contribuaeà ce titre au plan de l'université de Virginie, construite à partir de 1817. Le projet, complété par Benjamin Henry Latrobe, lui permet d'appliquer ses conceptions architecturales. La bibliothèque universitaire est située sous une rotonde coiffée d'un dôme qui s'inspire du Panthéon de Rome. L'ensemble présente une grande homogénéité grâce à l'utilisation de la brique et du bois peint en blanc. Pour le Capitole de Richmond en Virginie (1785-1796), Jefferson a pris le parti d'imiter la Maison Carrée de Nîmes, mais en choisissant l'ordre ionique pour ses colonnes. Il avait étudié le projet avec Charles-Louis Clérisseau alors qu'il était à Paris. Homme des Lumières, Thomas Jefferson a participé à l'émancipation de l'architecture du Nouveau Monde en imposant sa vision d'un art au service de la démocratie. Il contribue à développer le Style Fédéral (néoclassique appliqué aux bâtiments publics) dans son pays et à adapter l'architecture néoclassique européenne aux valeurs républicaines nées de la Révolution américaine. Il détestait l'architecture de Willamsburg parce qu'elle était le symbole de la domination anglaise sur les Treize colonies.
Le style néogrec, qui s'inscrit dans le courant néoclassique, exerce un véritable attrait sur les architectes travaillant aux États-Unis dans la première moitié du XIXe siècle. La jeune nation, affranchie de la tutelle britannique, est persuadée d'être la nouvelle Athènes, c'est-à-dire un foyer de la démocratie. La constitution, rédigée en 1787, donne naissance à de nouvelles institutions qui nécessitent des bâtiments et imposent les principes de souveraineté nationale et de séparation des pouvoirs. L'architecture officielle et même civile ou religieuse (ce qui constitue l'originalité des États-Unis), reflète cette vision et prend pour modèle les édifices de l'Acropole. Benjamin Henry Latrobe (1764-1820) et ses élèves William Strickland (1788-1854) et Robert Mills (1781-1855) obtiennent des commandes pour construire des banques et des églises dans les grandes villes. Latrobe s'illustre par l'édification de la Banque de Pennsylvanie qu'il dote de deux portiques ioniques et par la cathédrale St Mary de Baltimore. Surtout, les capitoles des États adoptent le type néogrec comme en Caroline du Nord ou dans l'Indiana.
Capitole de Raleigh, Caroline du Nord
Pour capitale fédérale, le plan d'ensemble est imaginé par le Français Pierre Charles L'Enfant. Cet idéal de ville monumentale et néoclassique est repris par plusieurs villes mais Washington DC semble le plus abouti d'entre tous. Après un concours, James Hoban, un Américain d'origine irlandaise, est choisi pour la construction de la Maison Blanche et la construction commence en octobre 1792. Le bâtiment qu'il a conçu est calqué sur les premier et deuxième étages de Leinster House, un palais ducal de Dublin en Irlande et maintenant le siège du parlement irlandais. Mais pendant la guerre de 1812, une grande partie de la ville brûle, et la Maison-Blanche est ravagée. Seuls les murs extérieurs restent debout, est elle est reconstruite. Les murs sont peints en blanc pour masquer les dégâts causés par la fumée. Au début du XXe siècle, deux nouvelles ailes sont ajoutées pour faire face au développement du gouvernement.
Le capitole des États-Unis a été construit par étapes successives à partir de 1792. Le projet est d'abord confié au Français Étienne Sulpice Hallet mais sera finalement réalisé par l'Anglais William Thornton. Peu après la fin de la construction, il est partiellement brûlé par les Britanniques durant la Guerre de 1812. Sa reconstruction débute en 1815 pour ne se terminer qu'en 1830. Durant les années 1850, le bâtiment est agrandi de manière importante par Thomas U. Walter. En 1863, une imposante statue, Freedom, est placée au sommet du dôme qui s'inspire de celui du Panthéon de Paris. Le Washington Monument est un mémorial en forme d'obélisque érigé en l'honneur de George Washington, le premier président américain. C'est Robert Mills qui a fait les plans originaux en 1838. On peut apercevoir une différence de couleur vers le bas, c'est parce que sa construction a été arrêtée à cause du manque d'argent. D'une hauteur d'environ 170 mètres, il a été achevé en 1884 et ouvert au public en 1888. Le Lincoln Memorial (1915-1922) est un autre monument de la même série : d'un marbre et d'un calcaire blancs, le bâtiment reprend la forme d'un temple grec de l'ordre dorique sans fronton. Son architecte, Henry Bacon, formé aux idées des Beaux-Arts, voulait que les 36 colonnes du monument représentent chacun des 36 États de l'Union à la mort de Lincoln.
Enfin, le Jefferson Memorial est le dernier grand monument construit dans la tradition des Beaux-Arts, dans les années 1940. Son architecte, John Russell Pope, veut mettre en relief le goût de Jefferson pour les bâtiments romains. C'est pourquoi il décide d'imiter le panthéon de Rome et de doter l'édifice d'un dôme spectaculaire, qui s'élève à 39 mètres au-dessus du sol. Il est sévèrement critiqué par les partisans du nouveau mouvement qui s'installe : le style international.
Capitole de Washington
Le goût pour le gothique n'a jamais totalement disparu, que ce soit en Europe ou en Amérique. À partir des années 1840, le style néo-gothique tend à s'imposer aux États-Unis. Il s'épanouit dans un contexte de réaction au classicisme et de développement du romantisme. Il se caractérise par un retour au décor médiéval (cheminées, pignons, tours à créneaux, fenêtres en ogive, gargouilles, vitraux..) et à l'utilisation de toits à forte pente. Les édifices adoptent un plan complexe qui s'écarte de la symétrie et de la rigueur néo-classique. Mais le néo-gothique est aussi utilisé pour la construction des universités (Harvard) et des églises. Richard Upjohn (1802-1878) se spécialise dans les églises rurales du nord-est, mais son œuvre majeure reste Trinity Church à New York. Son architecture en grès rouge fait référence au XIVe siècle européen, mais se trouve aujourd'hui noyée au milieu des immenses gratte-ciel de Manhattan.
Toujours à New York, c'est à James Renwick Jr que l'on doit la cathédrale Saint-Patrick, synthèse élégante des cathédrales de Reims et de Cologne. Le projet lui est confié en 1858 ; l'édifice sera achevé en 1888. L'utilisation de matériaux plus légers que la pierre permet de se passer d'arc-boutants et contreforts extérieurs.
Renwick illustre aussi son talent à Washington DC avec la construction de la Smithsonian Institution. Mais ses détracteurs lui reprochent d'avoir rompu l'harmonie architecturale de la capitale en édifiant un ensemble hétéroclite (emprunts byzantins, romans, lombards et ajouts personnels) en brique rouge.
Le succès du néo-gothique se prolongea jusqu'au début du XXe siècle dans de nombreux gratte-ciel, notamment à Chicago et New York.
Cathédrale Saint Patrick, New York
L'éclectisme (1860-1914)
L'éclectisme est une tendance en architecture qui se manifeste en Occident entre les années 1860 et la Première Guerre mondiale. Elle consiste à mélanger des éléments différents empruntés à des traditions hétéroclites. Elle se distingue du néo-classique qui construit des bâtiments homogènes d'inspiration unique (antiquité gréco-romaine). L'Académie des Beaux-Arts de Paris met en application les préceptes de l'éclectisme et influence plusieurs architectes américains. Formés à l'École des Beaux-Arts de Paris, les grands architectes américains appliquent à la lettre les principes qu'ils ont appris en France : plans symétriques, bâtiments grandioses et monumentaux, richesse de la décoration et grandes baies en demi-cercle. Le décor classique est appliqué à des édifices complètement nouveaux comme les gares.
L'église de la Trinité de Boston compte parmi les édifices les plus remarquables de cette époque. Adoptant un plan centré, l'architecte Henry Hobson Richardson empile plusieurs volumes pour donner à l'ensemble une configuration pyramidale. Il utilise différents matériaux, comme le grès et le granit. Les arcs en plein cintre qui encadrent les vitraux sont typiques du né-oroman. La ville de New York est, avec Washington DC, le principal champ d'application du style Beaux-Arts : il est incarné dans la bibliothèque publique, le campus de l'université Columbia, le Metropolitan Museum of Art, l'American Museum of Natural History et le Brooklyn Museum. Grand Central Terminal, la plus grande gare de Manhattan, est guidée par le même esprit et achevée en 1913. Sa façade monumentale est rythmée par les colonnes et les grandes baies en plein cintre.
Le Pont de Brooklyn est emblématique de l'éclectisme et de la ville de New York. Il donne l'image positive du progrès en marche et il peut être comparé à la tour Eiffel, car il est l'œuvre d'un ingénieur, John Augustus Roebling et parce qu'il a été critiqué par une partie des contemporains... Les arcs en ogive rappellent la tendance historiciste, mais les câbles en acier ainsi que la performance technique (480 mètres de portée, une des constructions les plus hautes de la ville à la fin du XIXe siècle) en font un édifice résolument moderne.
À partir des années 1920, le style Beaux-Arts est concurrencé par la tendance Art déco.
L'architecture domestique suit la tendance de l'architecture publique.
Maisons victoriennes à San Francisco
Autres styles en vogue à la fin du XIXe siècle
Le Stick Style est une méthode américaine de construction des maisons qui utilise les clayonnages de baguettes de bois. Les constructions sont coiffées de toits hauts, à pentes raides. Le plan est asymétrique et l'espace intérieur s'ouvre sur plusieurs vérandas. L'extérieur n'est pas démuni de décoration (consoles surdimensionnées et raffinées), même si l'objectif principal reste le confort. Le Stick Style est progressivement abandonné après la crise de 1873.
Puis le Shingle Style remplace le Stick Style. Il est caractérisé par un revêtement en bardeaux (petits morceaux).
Le quartier d'Haight-Ashbury, à San Francisco, est représentatif des maisons de style victorien italianisant (1860-1900). Construites grâce au bois des séquoias, elles ont résisté à l'incendie de la ville en 1906 et sont extrêmement décorées et colorées. À l'époque, elles offraient tout le confort moderne : chauffage central, électricité, eau courante… Leurs dimensions sont standardisées : 8 mètres pour la façade et 30 mètres pour la profondeur. Elles comportent plusieurs étages et des oriels.
Le goût pour la simplification des volumes et de la décoration extérieure progresse grâce aux réalisations d'Irving Gill à qui l'on doit plusieurs maisons californiennes à toit plat dans les années 1910.
Stick style et Shingle style
Maisons victoriennes colorées de San Francisco - Maison à toit plat Irving Gill
La seconde moitié du XIXe siècle est celui de la reconstruction après la guerre de Sécession et du développement économique des États-Unis. La révolution industrielle fait naître de nouveaux matériaux de construction (acier, béton). L'urbanisation, la croissance démographique et le capitalisme suscitent des bouleversements profonds dans l'architecture américaine (gare, bureaux...), qui connaît son âge d'or.
Les industriels font valoir les qualités du métal en architecture : les pièces standardisées réduisent le coût de la construction. Les risques d'incendie sont diminués grâce au procédé d'ignifugation. James Bogardus (1800-1874) est l'un de ces entrepreneurs qui fait la publicité de ce mode de construction lié à la révolution industrielle et appelé cast-iron building. Plusieurs usines et magasins utilisent cette technique à New York, comme l'immeuble Haper, construit en 1854 et qui imite la façade d'un palais de la Renaissance. Daniel Badger (1806-1884) fabrique les éléments métalliques qui décorent la façade de l'immeuble Haughwout. Il est doté du premier ascenseur à vapeur Otis qui dessert les cinq étages. Les fenêtres sont encadrées par des colonnes corinthiennes et l'ensemble est surmonté d'une corniche minutieusement ornée. Le décor de la façade cache l'ossature métallique interne.
L'architecture métallique se pare de verrières qui éclairent l'espace intérieur : à Cleveland, les arcades de 1890 ont été dessinées par John Eisenmann sur le modèle de la galerie Victor-Emmanuel de Milan. Elles sont composées de 1800 panneaux de verre.
Les constructions de gratte-ciel sont rendues possibles grâce à l'invention de l'ascenseur et au progrès de la sidérurgie. Le plan en damier et la spéculation foncière dans les centres urbains américains ne sont pas étrangers au succès de ce mode de construction. Enfin, le regroupement des entreprises et la compétition capitaliste incitent à l'élévation verticale des bâtiments.
Il est difficile de dire quel est le premier gratte-ciel de l'Histoire. Les New-Yorkais affirment qu'il s'agit du New York Tribune Building, dessiné par Richard Morris Hunt (1875, 79 mètres). Le Woolworth Building.
Rapidement, plusieurs architectes américains critiquent cette nouvelle architecture verticale. L'élévation vertigineuse des buildings empêche la lumière d'atteindre le sol. Le plan orthogonal entraîne un engorgement de la circulation. On risque d'uniformiser l'aspect des centres-villes. Enfin, des problèmes nouveaux de sécurité émergent, notamment en matière d'incendie. Dès 1916, pour répondre à ces difficultés est adoptée à New York une loi sur le zonage (Zoning Law). Le règlement oblige les architectes à adapter la hauteur des immeubles en fonction de la taille de la parcelle. Il reste en vigueur jusqu'en 1961. Cela donne lieu à la construction d'édifices pyramidaux (derniers étages en retraits) tels que l'Empire State Building, voire construit sur une partie seulement de la parcelle, comme le Seagram Building qui ménage un retrait de 28 mètres par rapport à Park Avenue, et propose un moyen original d'intégration du gratte-ciel dans la ville. Encore aujourd'hui, ce droit au ciel est très réglementé.
En 1904, Frank Lloyd Wright s'intéresse aussi au problème de la lumière ; il dessine le Larkin Building à Buffalo qu'il organise autour d'un grand puits central éclairé par le haut et sur lequel donnent les pièces de chaque étage. L'immeuble s'ouvre donc vers l'intérieur et ménage une grande salle commune en son milieu. En utilisant la pierre et la brique, en découpant des plans horizontaux, Wright refuse la standardisation des gratte-ciel.
L'architecture du XXe siècle (depuis 1914)
La Prairie School inaugure la période de l'architecture organique aux États-Unis. Louis Sullivan et Frank Lloyd Wright sont considérés comme ses principaux représentants. La maison est représentative de l'idée d'ouverture sur la nature et d'horizontalité. L'entrée est modeste et les pièces basses de plafond.
À la fin des années 1920, l'influence de l'Art déco se fait sentir dans l'architecture américaine, en se mélangeant avec les exigences urbanistiques locales et les sources d'inspiration précolombienne. Le parti pris de la simplification géométrique, de la stylisation et de l'emploi de matériaux luxueux s'illustre essentiellement dans les gratte-ciel de New York (Chrysler Building, Empire State Building, Chanin Building, etc.). Le Rockefeller Center, énorme complexe architectural au cœur de Manhattan, marque l'idée ambitieuse de construire une « ville dans la ville », à une époque plutôt morose. Pour soutenir cet élan et baisser le chômage dans le secteur du bâtiment, le président Roosevelt engage une série de grands chantiers publics. L'Art déco a connu un développement singulier en Floride : de nombreux hôtels sont construits à Miami Beach après l'ouragan de 1926. Les éléments décoratifs en stuc et en marbre reprennent la faune et la flore locales (flamants roses, palmiers...) si bien que l'on parle de tendance Tropical Art Deco. Elle utilise des couleurs pastel.
L'expression Style international est pour la première fois utilisée en 1932 dans un ouvrage de Henry-Russell Hitchcock et Philip Johnson, rédigé à la suite d'une exposition du MoMA de New York intitulée Modern Architecture. La montée des dictatures en Europe a laissé à l'Amérique l'initiative de diffusion du modernisme architectural en accueillant les architectes européens émigrés, en particulier allemands et autrichiens. En 1933, l'école du Bauhaus ferme ses portes en Allemagne sous la contrainte des nazis, ses artistes durent s'enfuir souvent aux États-Unis, notamment à Chicago.
Les trois règles de base marquent une rupture avec l'architecture traditionnelle : mettre en valeur les volumes par des surfaces externes lisses ; éviter tout élément décoratif, mais soigner les détails architecturaux ; enfin suivre le principe de régularité. Le Style international se présente donc comme une tendance résolument moderniste et recherche le dépouillement.
Le siège de l'ONU à New York est l'illustration la plus remarquable du style international après 1945. Il fut construit le long de l'East River et inauguré le 9 janvier 1951.
La période de l'après-guerre est marquée par les œuvres du Finlandais Eero Saarinen dont l'éclectisme se manifeste dans l'auditorium Kresge du Massachusetts Institute of Technology (MIT - 1956), l'arche de Saint Louis (1967) ou encore dans son travail sur les terminaux des aéroports de New York et Washington DC. L'Allemand Walter Gropius enseigne l'architecture à Harvard et construit avec Pietro Belluschi l'immeuble controversé de la Pan Am à New York (1963). Il forme les grands architectes de la génération suivante.
Ludwig Mies van der Rohe arrive aux États-Unis en 1937 et applique ses conceptions du classicisme moderniste à New York (Seagram Building, 1958), Chicago (université à South Side). Il est l'architecte le plus fécond de tous.
Victor Gruen (1903-1980), architecte d'origine autrichienne, est concepteur de grands centres commerciaux (Le South Coast Plaza et le Southdale Center).
Le Carpenter Center for the Visual Arts sur le campus de Harvard est le seul bâtiment dessiné par Le Corbusier aux États-Unis.
Après la Seconde Guerre mondiale, les années de croissance économique voient éclore le Pop Art qui influence les réalisations architecturales. Robert Venturi et Charles Willard Moore sont des architectes qui osent utiliser une décoration pittoresque et variée, en totale contradiction avec l'austérité du style international contemporain. La mode du California Crazy, utilisée par James Wines, consiste à faire d'un objet trivial et quotidien une forme architecturale (un snack-bar en forme de hamburger). Les parcs d'attractions utilisent cette architecture du loisir, critiquée comme étant une architecture de façade, vulgaire et éphémère. On trouve cette tendance colorée, voyante et excentrique à Las Vegas.
Les années 1970 marquent un tournant dans l'architecture américaine : le choc pétrolier et la prise en compte de l'héritage patrimonial constituent la nouvelle donne pour les architectes. On assiste alors à la critique du style international et de sa tendance minimaliste et austère. De nombreux architectes réhabilitent les styles Beaux-Arts et Art déco.
Les œuvres majeures du postmodernisme sont le Lincoln Center et le Metropolitan Opera (New York, 1962–1966). La tendance éclectique s'exprime sur les campus universitaires. Les gratte-ciel de Philip Johnson s'éloignent aussi de la banalité et de la tendance à l'uniformité (IDS Center à Minneapolis). Cet architecte cherche à placer des codes érudits, les références au passé et des éléments totalement modernes. L'American Telephone and Telegraph Company (1979) à New York dispose d'un arc d'entrée monumental sur 8 niveaux et d'un sommet en forme de fronton inachevé ; il a été largement critiqué.
Enfin, les musées ont besoin d'un renouvellement architectural pendant cette période. On pense en premier lieu au Musée Guggenheim de New York. Le Metropolitan Museum of Art se dote de nouvelles ailes, qui utilisent de grandes verrières. Edward Larrabee Barnes adopte un plan audacieux en hélice pour le Walker Art Center de Minneapolis (1968–1971). Enfin, Pei et Richard Meier marquent de leur empreinte plusieurs lieux de culture dans les années 1980. Pour la National Gallery of Art, Pei juxtapose les volumes. Richard Meier renouvelle le genre Le Corbusier (Getty Center à Los Angeles (1985–1997), High Museum of Art à Atlanta (1980-1983)).
Le déconstructivisme s'exprime en architecture à la fin des années 1980 avec les œuvres de Frank Gehry : Weisman Art Museum (1993), Walt Disney Concert Hall (2003), Pavillon Jay Pritzker (2004). Michael Graves a également une renommée mondiale grâce à ses bâtiments conçus pour la société Disney : hôtels du Walt Disney World Resort à Orlando, siège social à Burbank par exemple.
L'architecture high-tech émerge dans les années 1970, incorporant des éléments industriels hautement technologiques dans la conception de toute sorte de bâtiments, logements, bureaux, musées, usines. Parmi les architectes américains, Richard Buckminster Fuller fut l'un de ses principaux représentants : il créa le concept du dôme géodésique, qui fut utilisé pour le pavillon des États-Unis à l'exposition internationale de 1967 ainsi qu'à Seattle.
Weisman Art Museum, Minneapolis
XXIe siècle
Les attentats du 11 septembre 2001 ont provoqué le début d'une réflexion sur les gratte-ciel, leur symbolique et leur sécurité. De nouvelles exigences écologiques (architecture verte) apparaissent et l'utilisation de l'informatique bouleverse la façon d'appréhender l'architecture. Dans le contexte de la mondialisation, on aurait tendance à penser que les mégapoles se ressemblent toutes. Pourtant, on assiste plutôt à une augmentation de la diversité grâce aux nouveaux matériaux (acier tendu, structures membranes) et à l'audace des architectes. L'architecture du site prend en compte les contraintes du milieu (séisme, froid...) et cherche à utiliser des panneaux solaires (Californie). Une nouvelle génération de gratte-ciel « verts » voit le jour dans les métropoles américaines : usage de la lumière naturelle et emploi de matériaux recyclés. James Wines est l'un des principaux représentants de la nouvelle architecture bioclimatique.
Enfin, les architectes américains sont invités à réfléchir, avec leurs collègues urbanistes, à la revitalisation des centres d'affaires et des quartiers intermédiaires dégradés (création de loft, réhabilitation du quartier de Harlem par Roberta Wash).
Les États-Unis eurent la chance d'être épargnés par les destructions occasionnées par les deux guerres mondiales. Ils n'ont pas connu les bombardements et la destruction des villes comme l'Europe ou le Japon. Par contre, le territoire présente des risques naturels importants pour le patrimoine : séismes en Californie, cyclones autour du golfe du Mexique sont particulièrement dévastateurs. Pour protéger les bâtiments historiques des appétits spéculatifs et privés, l'État fédéral s'est doté de plusieurs institutions : au début du XXe siècle, les Monuments Nationaux Américains sont créés pour protéger des sites naturels, mais aussi des réalisations architecturales (villages amérindiens, forts de l'époque coloniale, missions espagnoles…) ; depuis 1935, le Service des Parcs Nationaux se charge de répertorier les bâtiments, les monuments ou les quartiers d'intérêt historique aux États-Unis.
Mais le mouvement de réhabilitation des bâtiments anciens se développe surtout à partir des années 1970. On proteste contre les opérations de rénovation urbaine destructrice (à New York, Pennsylvania Station démolie en 1963 et Singer Building détruit en 1968). À l'occasion du bicentenaire de la Déclaration d'indépendance (1976), le gouvernement décide de rénover l'héritage urbain et local de la nation. Il prend conscience de défendre aussi le patrimoine plus récent. Avec la désindustrialisation, la réhabilitation des anciens entrepôts ou usines est devenue très active.
D'après Wikipédia