Assis sur leurs chaises qui roulent, le regard absent, leurs yeux sautent par-dessus le paysage pour se fixer ailleurs, au-delà du soleil qui brille dans le vide, incongru, aussi déplacé que le vol d’une hirondelle sur les plates-bandes écarlates qui balafrent les allées du premier jour de novembre.
Couchés sur leurs lits qui roulent, les gens ont une odeur de médicament. Ils respirent encore et quand ils ne respirent plus on les branche, et quand ils ne mangent plus on introduit les repas dans leur sang.
Alors ils mangent en dormant.
Les gens meurent indéfiniment.
Alors, bien sûr, ils vivent jusqu’à cent ans, les paupières presque transparentes d’avoir trop essayé d’éteindre les dernières lumières qui viennent de l’intérieur. Et pourquoi pas un jour, jusqu’à deux ou trois-cents ans ? Deux ou trois-cents ans chimiques, électroniques, génétiques, bioniques ou cryogénisés. Deux ou trois-cents ans végétatifs à attendre les yeux mi-clos en priant chaque jour pour qu’enfin la nuit vienne et que ce soleil inutile se couche définitivement.
Nous ne sommes pas faits pour mourir éternellement.