Les trains fantômes d'Alstom

Publié le 14 décembre 2014 par Blanchemanche
#Astom
Plus de la moitié des salariés du site de Belfort devraient partir en 2015. La branche ferroviaire fait tourner ses usines étrangères au détriment des françaises.


Le site de Belfort serait touché par les suppressions d'emplois. (Jérôme Mars pour le JDD)
Une atmosphère de plomb plane depuis plusieurs semaines sur les usines d'Alstom à Belfort. Vendredi, les actionnaires, (dont Bouygues à hauteur de 30%), voteront comme un seul homme la vente de la division énergie à General Electricpour 12,35 milliards d'euros. Le berceau historique de ce fleuron français des transports et de l'énergie s'apprête à tourner la page d'une histoire démarrée en 1879. Elle risque, toutefois, de se poursuivre dans la douleur pour Alstom Transport, qui fabrique des trains à l'autre bout du site dans une usine en briques rouges. La branche encore française du groupe navigue à vue. La SNCF ne commande plus les TGV qui assuraient les trois quarts de l'activité.«Le groupe américain s'est engagé à créer 1.000 emplois en France d'ici à trois ans»Il y a quinze jours, la direction du site a fait fuiter aux syndicats qu'elle préparait un gros plan de départs volontaires. Sur 550 salariés, 320 sont concernés. "À Belfort, il y a des baisses de charges de travail et des mesures de chômage partiel, assure gênée une porte-parole d'Alstom. Il n'y a pas de plan annoncé pour l'instant…

Des géants chinois deux fois plus gros que le groupe

La "charrette" pourrait être annoncée lors du comité central d'entreprise d'Alstom Transport le 13 janvier et bouclée pour la fin 2015. "L'usine n'a pas pris de commandes depuis trois ans, déplore Olivier Kohler, représentant de la CFDT. Si ça continue, l'usine risque de fermer d'ici à 2017." Tout un symbole : Alstom pourrait disparaître de Belfort. Un front renversé avec General Electric, qui compte embaucher sur place. Le groupe américain s'est engagé à créer 1.000 emplois en France d'ici à trois ans. Le site de La Rochelle, qui construit aussi des TGV, pourrait également subir des restructurations. Au-delà de la fin du "tout-TGV" en France, les commandes de métros et de tramways sont en berne. Toute la filière ferroviaire souffre, et Alstom avec. "À partir de 2016, il n'y aura plus grand-chose à fabriquer dans les usines françaises, explique Jean-Pierre Audoux, le président de la Fédération des industries ferroviaires. Et plus rien après 2020."Pourtant, Alstom Transport a réalisé cette année un chiffre d'affaires record de 3 milliards au premier semestre. Le groupe engrange les commandes mais les usines françaises tournent au ralenti. Le contrat géant de 4 milliards d'euros en Afrique du Sud, pour 600 trains, sera honoré là-bas et ne remplira pas les sites en France. Idem pour le contrat de 1,3 milliard d'euros avec le Kazakhstan. "Les clients demandent une localisation de la production chez eux", se défend la direction. Un argument insuffisant aux yeux des salariés, notamment belfortains. "Alstom organise la pénurie dans ses usines françaises, s'agace un concurrent. Il préfère produire à l'étranger pour casser les prix et délocaliser." Et à cause de la reprise de la branche énergie par GE, Alstom transport va manquer de moyens financiers suffisants. Sur les 12,35 milliards d'euros de la vente de la division énergie à General Electric, il ne devrait récupérer que 1 à 2 milliards d'euros, après le remboursement d'une partie de la dette et le versement de près de 4 milliards d'euros aux actionnaires, et au premier chef Bouygues. L'entreprise doit aussi faire face à l'émergence de géants chinois deux fois plus gros qu'elle.

Un rapprochement avec son partenaire russe ?

Une alliance semble inévitable à terme. Selon plusieurs sources proches d'Alstom, le PDG Patrick Kron avait envisagé en début d'année un rapprochement avec son partenaire russe Transmashholding. "Le marché russe est le plus porteur, explique le cabinet de conseil Roland Berger. Et à cause des baisses de commandes, il y aura des regroupements dans le secteur." Après les Américains, l'avenir d'Alstom se jouera-t-il à Moscou?14 décembre 2014http://www.lejdd.fr/Economie/Entreprises/Les-trains-fantomes-d-Alstom-706664