Chaque année aux confins de l’automne, le Creux-du-Van retrouve son calme. Les promeneurs se font de plus en plus rares, les feuillus se dénudent à mesure que la température baisse, et les brumes de fin de saison emplissent le cirque d’un doux duvet cotonneux… L’automne est sans doutes la plus belle période pour découvrir cette magnifique réserve naturelle.
La paix retrouvée permet d’observer différents habitants qui se sont fait forts discrets durant la belle saison. Ainsi les chamois qui se cantonnaient au fond du cirque ou sur les flancs des crêtes voisines se réapproprient les pâturages supérieurs du Creux, les timides renards viennent exhiber leur robe rousse fournie sur la carafe et le discret chevreuil ose à nouveau venir brouter près du point de vue…
Mais chaque automne, des hôtes particuliers font leur retour dans « leur » cirque du Creux-du-Van. Pressés par une force invisible et irrésistible, les grands boucs savent qu’ils doivent revenir passer l’hiver en compagnie des étagnes et des jeunes. La survie de l’espèce en dépend… Ces grand et solides explorateurs, qui aiment partir à l’aventure sur les reliefs voisins (parfois jusqu’au Chasseron) durant l’été répondent tous présents pour le rituel séculaire et immuable appelé le rut.
Si les premiers contacts entre boucs et étages sont plutôt timides, les mâles deviennent de plus en plus entreprenant à mesure que leur taux d’hormones augmentent. Tête en arrière, queue relevée, langue frétillante, ils tournent frénétiquement autour des femelles pour humer leurs phéromones qui leur indiquera le moment venu pour l’accouplement. Durant cette période de frénésie, les boucs se mesurent dans des duels majestueux afin de déterminer la hiérarchie. Seul le plus fort aura le privilège d’assurer sa descendance. Face à face, les boucs se dressent sur les pattes arrières et entrechoquent leurs cornes dans un fracas invraisemblable. Cette lutte violente est répétée jusqu’à ce que le plus faible capitule.
Profitant d’une matinée douce de novembre, je me suis rendu au Creux-du-Van pour guetter l’arrivée des grands mâles en espérant réaliser une image qui me hante depuis plusieurs années; celle d’un bouc surplombant le cirque sur fond de brouillard. Si l’image rêvée n’a pas été mise en boîte, j’ai quand même eu le plaisir d’observer la présence de deux grands mâles qui semblaient de force égale, ce qui augure de jolis duels dans les semaines à venir…
Val-de-Travers, le 14 décembre 2014