Retour de notre WE Bourguignon traditionnel. Cette année, une organisation au cordeau, bien préparée, nous a évité les quelques inconvénients des précédentes années : un retour à des visites en plus petit nombre pour bien profiter des échanges, des séquences de RDV optimisée, des diners aux nombres de bouteilles limités.
Question dégustation, un tour des 2012, 2013 et 2014 selon les vignerons. Les quelques 2014 dégustés, tous partis en malo étant donné les températures quasi printanière de cet automne chaud (il fait 15°), présentent des jus toniques, vivants, au fruit éclatant avec de belles concentrations. Pour les 2013, je suis indécis, chez certains vignerons cela goutait très bien, chez d'autres, des fruits mats, manquant d'éclat, des tanins pas toujours séduisant et des amertumes prononcées, pas le souvenir que j'avais de l'année dernière ou les jus avant malo se gouttait plutôt bien. Sur les 2012, une belle homogénéité, pas un millésime d'une grande densité mais un équilibre intéressant entre maturité, fraicheur et concentration. J'avais noté petit 2010 l'année dernière, on n'est pas loin, mais ça manque un poil de densité et d'éclat. Dans l'ordre des visites.
Domaine Chicotot : des 2014 très séduisant et de nouvelles cuvées chez Pascale, des Beaunes (bon, grêlés pour cette première année avec quelques pièces à peine), et un Pommard Tavannes, à la délicatesse marquant le climat côté Epenots. Comme d'habitude, Vaucrains et Saint-Georges sont excellents. Pour 2013, je note des amertumes marquées mais donnant de la classe chez Pascale.
Chez les frères Rossignol Trapet, je ne sais ce qui se passe ce matin là et mais ça goutte pas super (ce qui sera une constance de la journée d'ailleurs). Les vins (2013) sont assez fermés et proposent à nouveau des amertumes assez prononcées. Je note cette année un Cherbaude comme j'aime, sexy, gourmand et plein, il sort vraiment du lot au niveau des 1er crus. Enfin cette année 2013 révèle de réelles différences de niveaux entre les différents crus/terroirs et le Chambertin final domine les autres crus (y compris le Latricières et le Chapelle) de la tête et des épaules !
Chez Nicolas au domaine Groffier, on attaque par un Bourgogne rouge 12 très friand au fruit éclatant, c'est très bon. On poursuit avec Chambolle Sentiers 2013 assez puissant pour un Chambolle et cette fois le fruit est plus avenant pour un 13, de belles notes épicées, de la profondeur, du peps, pas d'amertume, une pointe végétal fraiche. C'est excellent. Nicolas adore ses 13, pour lui, c'est un mix entre la fraicheur des 96 et la maturité des 10. ça promet ! On revient au 12 avec un Haut doix, pas très dense mais bien soyeux, un vin charmant à l'image d'un Chambolle. Une amoureuse 12 a l'attaque ronde mais à la finale encore serrée, vive, structure droite et persistance longue, a attendre impérativement. Ensuite l'amoureuse 11 a déjà un coté évolué avec des notes sous-bois, champignons, une bouche tendue, tanins précis, note de cuir (?), et belle persistance. ça se boit déjà bien, moins de profondeur que 12.
Nous voilà chez Pierre Bart à Marsanay, une étape que j'aime beaucoup. A la maison, nous sommes grand fan des Marsanays de Pierre que nous avons du mal à garder tant c'est un réflexe plaisir d'ouvrir une bouteille. Les 12 ne dérogent pas à la règle mais méritent 2 à 3 ans avant de procéder au déstockage. On retrouve à chaque cru les caractères spécifiques de chacun, d'année en année. Des Longeroys droits, des Echezots plus souple, des Grandes Vignes gourmandes bien mûrs, enfin Clos du Roy et Champs Salomon terminent les Marsanay en beauté apportant plus de densité, et de profondeur, l'un jouant l'élégance, l'autre la puissance.
Ensuite c'est le Chambolle Veroilles, et une fois de plus je suis sous le charme de ce village fin et délicat, gardant de la densité et finissant long et classe; j'adore ce cru, un top rapport Q/P. Les Bonnes Marres et le Clos de Beze le dépasse en puissance et densité, bien sûr, surtout le Bonnes Marres, mais pas au même prix !
Chez Amiot Servelle, cette fois, c'est le fils Antoine avec qui nous faisons la dégustation des 12. Le Chambolle est toujours aussi agréable, il faudra probablement l'attendre plus que le 11 qui est d'une gourmandise terrible, le 12 est plus élégant avec ces notes fleuries, mais présente une petite sécheresse finale. Les Plantes est un Chambolle droit, plus carré et un peu plus rigide. Les Charmes est plus concentré, très avenant, et finit avec une jolie souplesse séduisante. Enfin, le Charme Chambertin fait cette année très Chambertin avec ses notes réglisses, une puissance en bouche qui s'impose dans une matière dense mais bien soyeuse, un très beau vin.
Le lendemain, on attaque traditionnellement chez Jean Pierre, au domaine Voillot. Le domaine à connu une année difficile entre les épisodes de grêles pour la 3eme année et la mort de Joseph Voillot. Mais par contre les vins 13 restent toujours au top. Le Bourgogne VV et le Volnay VV sont des musts pour moi en rapport Q/P. Le Frémiet présente des notes agrumes surprenantes mais une bouche toujours aussi friande, les Brouillards me rappelle que l'amertume ne se sent pas qu'en Nuit. J'ai trouvé le Cailleret très beau cette année, un peu serré encore mais dense, plein et aux notes épicées séduisantes, un vin franc à beau potentiel. Les Champans était assez fermé et peut être plus souple, mais quelle densité, belle promesse. Les Epenots gouttait aussi très bien avec des notes de clou de girofle plus typique des vins nuitons et une finale sur le Thym surprenante mais très séduisante. Les Rugiens, comme d'habitude, est a attendre impérativement pour livrer sa puissance et sa classe. Ensuite Jean Pierre nous propose un exercice très intéressant sur les problématiques du gaz avant la mise. Ainsi, il nous a ressuscité le Champans qui de fermé a tout d'un coup gagné en expression et éclat après une petite cure de CO2.
Direction Thibault au domaine Morey Coffinet ensuite pour passer en revue les 2013. Force est de constater qu'année après année, Thibault gagne en précision, en finesse sur tous ces vins. Un travail méticuleux sur chaque cru pour en tirer le meilleur et ça se goutte !
Comme chez jean Pierre, le bourgogne et le Chassagne village sont tops en terme de rapport Q/P. L'interprétation du Meursault par Thibault s'éloigne des classiques gras et rond pour chercher la profondeur et le fraicheur, très intéressant, a suivre... La série des Chassagne débute par DDC puisque les Remilly ne sont plus à la carte. Cette année DDC présente des notes crayeuses et de cailloux marquées que l'on retrouve dans les Caillerets mais avec un gras supplémentaire. La Romanée rappelle l'élégance et la noblesse classique du cru dans une expression un peu fermé ce jour là. Les Fairandes se gouttent dans la lignée de l'année dernière et très différentes de ce que j'ai connu au domaine. Moins marqué de fruit exotique, d'un côté très mûr, je les trouve beaucoup plus élégante tout en gardant cette puissance singulière, j'aime de plus en plus et Thibault m'indique qu'il les vendange beaucoup plus tôt qu'avant, cette année pour la première fois, je vais en prendre. Ensuite les Blanchots, quoique discrète présente une bouche complète, riche, dense avec une longue persistance. Les Pucelles sont encore magnifiques, droite, fine, intense, et longue, j'adore cette précision et ce côté cristallin. Le Batard a gagné en densité avec une grosse attaque, de la puissance, certes, mais la finesse arrive avec les années. Une très belle dégustation, comme d'habitude !
Chez Daniel, au domaine Rebourgeon Mure, je n'ai pas pris de note, les conditions de la dégustation ne le permettant pas ou peu. Mais comme toujours les vins sont très bons et à des prix... Quelques crus de très hautes volées (ce qui sera confirmé le soir même), comme ces Charmots, ou ce Clos des Arvelets et puis surtout ce Volnay Caillerets et le Pommard Grands Epenots, un des plus beaux, fins mais denses, cru de Pommard que je connaisse.
Enfin, nous finissons chez Patrick au domaine Buisson Charles qui nous a réservé une belle dégustation dans un contexte tranquille. en haut, assis, avec des échantillons préparés, cette dégustation des 2013 va s'avérer magique en ce qui me concerne tant ces Meursaults représentent ce que j'aime dans les blancs Bourguignons, de la nature, et une explosion de fruit pure, franc et nature. Une VV franche et pure sur la poire, ciselée, droite, matière suave, du grand art dans une expression d'un naturel confondant. Un Tesson marqué par des notes crayeuses moins habituelles mais toujours puissant et droit. Un Chassagne Remilly plus tendue que celui de Thibault. Une Romanée pleine droite, avec une pointe sésame grillé très classe, jouant un peu moins la séduction et plus la profondeur que chez Thibault. Un Puligny sur la pêche de vigne avec une pointe gourmande presque sucré. Un Chablis Vaudésir dans une version Beaunoise qui mérite d'être attendu quelques années pour digérer son élevage et laisser s'exprimer ces notes de pierre, cette structure tendue et cette finale citron et tellurique. Ensuite la série des premiers crus de Meursault avec des Cras moins marqués de craie que les Tessons, dans un profil riche au note de noisette fraiche, un Charmes, riche, ample, dense à la finale puissante mais délicate. Un Bouchechere typique, superbe, une fois de plus, mon cru préféré chez Patrick, dense mais aérien, délicat sur la poire, l'aubépine, quelle amplitude et quelle finesse, magique. Un goutte d'or plus trapu, puissant, plus murisaltien classique, aux belles notes de sésame grillé. Un Corton aux notes mentholés, droit en structure mais rond et large en sensation, beaucoup de volume en finale.
Pour clore cette série, petite verticlae de Goutte d'Or en présence de Michel avec un 12 bien ouvert, harmonieux mais encore marqué de son élevage certes classe mais trop jeune. Le 11 est plus réservé mais déjà le naturel revient avec des notes fleur blanche et un coté aguicheur en bouche qui fait très naturel donc redoutable. Le 97 se présente assez réduit mais il a tenu le bougre et sa finale mentholé est très séduisante. Le 94 prend presque des airs de Riesling avec ses belles notes de pétrole et sa finale à la sensation gourmande sucrée (année à botristis confirmée par la dégustation). Ensuite le 90 vous met une claque avec ce nez classe et ses notes de champignons, de fumées, puis fruit jaune mûr, un fond délicatement naphté, une fraicheur une classe en bouche redoutable et une finale interminable. Magique. Et que dire du 78 qui suit, rien, car dans ce cas, on se tait devant tant d'aboutissement et on profite, stupéfait devant tant d'insolence, de classe, de plaisir... hors du temps. Merci à Patrick, Michel et Kate pour ce grand moment.
Amicalement, Matthieu