Volontariat

Publié le 11 décembre 2014 par Malesherbes

Ce mercredi 10 décembre, notre ministre de l’Économie présentait devant l’Assemblée nationale son projet de loi « pour la croissance et l'activité ». Les journaux télévisés ont montré des extraits de son intervention. Fouillant dans leurs archives, les journalistes ont retrouvé une vidéo d’il y a un peu plus de deux ans, sur laquelle on peut voir le candidat Hollande dénoncer l’atteinte intolérable au repos dominical que constituaient les projets de la droite. Ces mêmes trouble-fêtes ont eu la malice de diffuser ce sujet immédiatement après l’interventiond’Emmanuel Macron, ce qui rend évidente la régression du discours présidentiel.

Pourquoi nos gouvernants n’ont-ils pas l’honnêteté d’expliquer leur changement de position au lieu de parier sur un défaut de mémoire de leurs mandants. Ils pourraientpar exemple déclarer que, arrivant aux affaires, ils se sont trouvés face à une situation beaucoup plus dégradée qu’ils ne l’imaginaient. Devant la gravité de la situation –rappelez-vous François Fillon affirmant, dès 2008, être à la tête d’un pays en faillite –, il était devenu indispensable de prendre des mesures douloureuses. Accepter une certaine quantité de travail dominical permettrait de générer de l’emploi et, surtout grâce aux touristes étrangers séjournant peu longtemps dans notre pays, d’augmenter le chiffre d’affaires de certains commerces. Apparemment, plutôt que de traiter les électeurs en adultes, nos dirigeants feignent de ne pas remarquer leurs propres retournements.

Un des arguments en faveur de cette nouvelle entaille au repos du dimanche est qu’il ne s’agit que de porter le nombre de dimanches travaillés de cinq à douze. En effet, on peut considérer cette extension comme plutôt limitée. Mais, en fait, elle fait passer de un dimanche travaillé sur dix à presque un dimanche sur quatre, ce qui n‘est plus si anodin. Et si cette mesure ouvre la voie à de nouvelles extensions, on risque de se trouver dans un schéma où ce seront les dimanches préservés qui seront exceptionnels.

Le mot magique permettant d’accepter cette évolution est celui de « volontariat » : seuls les volontaires seraient appelés à travailler le dimanche. Il y a plusieurs mois, j’avais déjà publié un billet à ce propos, que l’on peut résumer ainsi : dans une entreprise, un salarié ne saurait disposer du volontariat. Imaginons un instant un patron embauchant un nouveau collaborateur. Soucieux de pouvoir éventuellement l’appeler à travailler un dimanche, il peut lui demander s’il serait disposé à travailler ce jour-là. Si le candidat est en recherche d’emploi depuis des mois, pensez-vous qu’il soit prêt à courir le risque de compromettre ses chances pour décrocher le poste en répondant par la négative ? Bien sûr, l’attitude du patron est tout à fait justifiée. Mais, pour moi, ceci démontre à nouveau qu’on ne saurait parler de volontariat pour un salarié.