Human Target est un personnage créé par Wein et Infantino dans Action Comics 419 et ensuite repris par Peter Milligan. Cette première intégrale débute par les quatre épisodes de cette mini-série et se termine par la première apparition du personnage dans Action Comics, mais reprend également « Human Target : Final Cut » ainsi que les cinq premiers épisodes de la deuxième série consacrée au justicier caméléon.
Christopher Chance, le personnage principal, est une cible humaine qui prend la place de ses clients menacés de mort et assume à leur place tous les risques qu’ils encourent. Le fait de mettre en scène un héros qui usurpe l’identité de ses employeurs offre beaucoup de possibilités au niveau du scénario. Cette première intégrale recueille ainsi cinq histoires (de longueur et de qualité variables) où le héros se voit notamment confronté à un magnat du cinéma hollywoodien dont l’enfant s’est fait enlevé, ainsi qu’à une tueuse à gage engagée pour lui faire la peau. Changement de décor lors de la deuxième série, où notre nettoyeur passe de Los Angeles à New York et se retrouve mêlé à une histoire post 9/11 et doit même enfiler des gants de baseball.
Peter Milligan propose donc un polar surprenant d’originalité, avec un scénario qui jongle avec la personnalité des différents protagonistes au fil des pages, aux frontières de la schizophrénie. Seulement, ce caméléon des personnalités et des déguisements finit par douter de sa propre identité et finira même par nous faire réfléchir à propos de notre propre personnalité : à quel moment joue-t-on un rôle ou se fait-on passer pour quelqu’un que nous ne sommes pas ? Cela résulte en un récit intelligent et déconcertant, qui va s’amuser à nous balader dans les méandres de la personnalité. C’est certes parfois un peu capillo-tracté, au point de perdre momentanément le lecteur, et la facilité avec laquelle le personnage principal enfile les différents rôles peut finir par déranger, mais l’étude psychologique des personnages est très réussie. C’est le métier du protagoniste principal de s’immerger dans les différents personnages afin de les protéger, et Christopher Chance, tel un caméléon, le fait à merveille, tout en entraînant les lecteurs dans son sillage au plus profond de chacun des personnages. Une introspection très réussie, qui est combinée à un suspense policier bien dosé, qui tient le lecteur en haleine du début à la fin.
Visuellement, le jeune dessinateur Edvin Biukovic est malheureusement décédé prématurément quelques mois après la parution de la première histoire et c’est Javier Pulido qui le remplace lors des épisodes suivants. Ce dernier livre également de l’excellent travail, mais sans parvenir à égaler son prédécesseur.