[anthologie permanente] Marc Dugardin

Par Florence Trocmé

Marc Dugardin publie Table simple aux éditions Rougerie.  
 
 
arioso 
 
   (en écoutant György Kurtág) 
 
brasier dans les entrailles 
préfiguration –  
les cendres qu’il restera 
 
feu de joie / c’est pareil 
feu 
un point c’est tout 
 
astre là-bas 
qui brûle 
éteint peut-être depuis longtemps 
 
crépitements – 
la peur se consume 
 
un poème s’immole par le silence 
 
./ 
 
pierres 
 
il y a des pierres qui n’appartiennent 
   à personne 
il y a des mots dans la bouche venus 
   dont ne sait où 
et que l’on prononce seulement 
   pour mieux les perdre 
 
il y a un marcheur et il ne cesse 
   de fredonner un air 
qu’un rêve lui a dicté ou bien le hasard 
 
il y a une pierre où l’on achoppe 
 
l’effroi de la chute 
 
la rumeur alors en amont de toute parole 
et qui remonte 
et qui désarme la mémoire 
 
rumeur de mer dans le coquillage 
   que l’on porte à l’oreille 
 
émoi 
 
   et moi 
 
 
ballast 
pierre que l’on piétine 
pierres seulement pour le mouvement 
l’avancée chancelante 
 
mer  
tempête 
coups 
train – 
et l’enfance qui trépigne sur le quai 
 
mon dieu 
   faites que tout s’arrête 
 
 
… 
 
non 
   que tout commence 
balbutie 
se naufrage 
d’une syllabe à l’autre 
 
d’un et moi 
  
à un autre 
 
 
Marc Dugardin, « Deux poèmes », Table simple, éditions Rougerie, 2014, pp. 39 à 41 
 
Marc Dugardin dans Poezibao 
bio-bibliographie, D'écluse en écorce, d' Alexandre Valassidis & Marc Dugardin (par Françoise Le Bouar), [entretien] avec Marc Dugardin (par Armand Dupuy), ext.1