Un conte plein de cit(é)ations !
Le rappeur Abd Al Malik s'essaye pour la première fois à la réalisation, avec l'adaptation de son roman autobiographique "Qu'Allah bénisse la France", où il raconte son parcours dans une cité de Strasbourg.
Le(s) plus
"Il était une fois..."!
Le film Qu'Allah bénisse la France d'Abd Al Malik s'ouvre à la manière d'un conte pour nous livrer de façon romancé, le parcours de Regis (Marc Zinga) vivant dans une cité de Strasbourg.
Ce jeune enfant d'immigré va se battre pour percer dans la musique tout en continuant ses études d'un côté, tandis que de l'autre il est tout de même entrainé à faire des petits larcins avec ses amis.
Sans faire dans les clichés, rap, drogue, violence, vol, mais également scolarité, amitié, famille et religion, sont les différents thèmes abordés dans le film Qu'Allah bénisse la France.
Et partant de l'autobiographie d'Abd Al Malik, forcément dans les textes du film on reconnait sa touche, et quelques dialogues ressortent comme: "Nous ce pays on l'aime, c'est lui qui nous aime pas" et "Le problème ce n'est pas la religion, ce sont les gens... Et les gens sont des cons.".
Quand on voit les photos ou la bande-annonce en noir et blanc, et sachant que l'histoire du film Qu'Allah bénisse la France se déroule dans une cité, on ne peut s'empêcher de penser à La Haine. Copie ou plagia, sont les premiers termes qui nous viennent et pourtant le résultat est plus un hommage au film de Mathieu Kassovitz.
En reprenant le même style, Abd Al Malik donne à la fois un air sobre et de qualité à son film. D'ailleurs ce n'est pas pour rien si Pierre Aïm (chef opérateur de La Haine) a travaillé sur la photographie.
Pour une première réalisation, c'est plutôt une réussite pour Abd Al Malik. La mise en scène est vraiment très sobre et assez simpliste, mais dans le bon sens du terme. Il n'y a pas d'excès.
Mis à part dans une unique scène, la violence est toujours cachée. Abd Al Malik n'essaye pas de nous en mettre plein les yeux mais plutôt de nous faire réfléchir ou de déclencher chez nous des émotions (même si ça reste tout de même en retrait).
Techniquement, il y a quelques bonnes idées, comme un superbe plan fixe sur des personnes présentes à un enterrement, et dont certaines s'effacent de l'image au fur et a mesure, avec les noms qui apparaissent et la raison de leur mort, comme une sorte de mémorial.
A noter que l'interprétation des personnages principaux est très bonne, principalement celle de l'acteur Marc Zinga, qui nous donne l'impression d'entendre la voix d'Abd Al Malik par moments, sans parler de sa présence face à la caméra.
Enfin, la bande originale du film a un rôle assez important. Une partie a été faite par Abd Al Malik et son frère Bilal, mais Laurent Garnier a également participé avec sa musique électronique, ainsi que la chanteuse de r'n'b Wallen, qui est aussi la compagne du rappeur.
Le(s) moins
Parfois, les personnages portent le ton un peu trop fort et trop longtemps, donc autant ne pas avoir une migraine avant de regarder le film Qu’Allah bénisse la France. Ça apporte même un côté légèrement stressant.
On reconnait différents films dans Qu’Allah bénisse la France, comme La Haine ou encore 8 Miles.
En s'inspirant des meilleurs du genre, c'est un beau film, mais si on ne tient pas compte du côté technique qui a quelques bonnes idées originales, il lui manque un petit quelque chose en plus dans le scénario pour réellement se distinguer.
Enfin Abd Al Malik ne fait pas dans le cliché et reste assez sobre dans l'histoire qu'il nous raconte. Mais en étant plus attentif, c'est parfois tout de même trop moralisateur, alors qu'à d'autres moments on pardonne presque trop facilement. Comme les crimes qui ne sont pas forcément punis, avec par exemple la manière que Regis (Marc Zinga) et ses amis utilisent pour se procurer de l'argent pour s'acheter des instruments de musique.
Voler ou faire du trafic de drogue pour réussir à faire ce que l'on veut dans la vie, n'est pas forcément une belle moralité ou mentalité à faire circuler.
Conclusion
Même si l'originalité du scénario n'est pas le point fort du film Qu’Allah bénisse la France, en s'inspirant des meilleurs films du genre, c'est une belle première réalisation avec quelques bonnes idées pour Abd Al Malik, qui nous plonge dans le quotidien d'une cité sans cliché!
Ma note: 7/10
Qu’Allah bénisse la France
Synopsis : "Adapté du livre autobiographique de Abd Al Malik, "QU'ALLAH BENISSE LA FRANCE" raconte le parcours de Régis, enfant d'immigrés, noir, surdoué, élevé par sa mère catholique avec ses deux frères, dans une cité de Strasbourg. Entre délinquance, rap et islam, il va découvrir l'amour et trouver sa voie."Réalisé par: Abd Al Malik / Avec: Marc Zinga, Sabrina Ouazani, Larouci Didi / Genre: Comédie dramatique / Nationalité: Français / Distributeur: Ad Vitam
Durée: 1h36min / Date de sortie: 10 décembre 2014
Plus d'informations !
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Les Anecdotes !
Poète des temps modernes, écrivain talentueux, figure incontournable du rap français, Abd Al Malik a plus d'une corde à son arc et le prouve ici en s'essayant pour la première fois à la réalisation, avec une adaptation de son roman autobiographique "Qu'Allah bénisse la France", dont il signe également le scénario. Au départ, le cinéaste néophyte n'avait pas l'intention de porter son livre sur les écrans. Mais conscient du pouvoir du cinéma et de l'image, il décida de passer le pas : "J'avais conscience de poser un jalon que je pourrais approfondir par la suite, grâce au cinéma. Cet art a une grande capacité d'humanisation, il permet d'aller voir derrière les apparences, de montrer que tous les êtres fonctionnent de la même manière", explique-t-il.Pour la bande son de son premier long métrage, Abd Al Malik a réuni la crème de la scène musicale française : le parrain de la musique électronique Laurent Garnier et la chanteuse r'n'b (et compagne du rappeur) Wallen. Le réalisateur et son frère, Bilal, sont également crédités au soundtrack. La plupart des titres ont été composés avant le tournage des séquences.
Abd Al Malik voulait à travers ce premier essai, montrer une image réaliste des cités en y apportant un point de vue intérieur et ainsi se démarquer des clichés et autres stéréotypes. Le réalisateur confie avoir été influencé par La Haine qui, de son propre aveu, "montrait vraiment la cité, avec amour mais aussi avec une démarche artistique". Il ajoute que son film reprend d'une certaine manière le flambeau du long métrage de Matthieu Kassovitz (qu'il a d'ailleurs rencontré à de nombreuses reprises), ce dernier n'abordant pas à proprement parler la question de l'Islam, très présent dans les cités.
Pour jouer son propre rôle, Abd Al Malik s'est tourné vers l'étoile montante Marc Zinga. C'est en voyant ce dernier dans un téléfilm où il incarnait le président controversé Mobutu, qu'il fut convaincu par son talent. Ils se rencontrèrent quelques temps plus tard et leur entente fut telle qu'il lui offrit sur un plateau le rôle principal son autobiographie. Quant à Sabrina Ouazani, l'interprète de Naouale, c'est la compagne du réalisateur en personne qui la recommanda pour le rôle.
Marc Zinga n'est pas qu'un acteur. A ses heures perdues, il lui arrive de pousser la chansonnette. C'est d'ailleurs son timbre qui résonne par moment dans le film. Abd Al Malik, cherchant un acteur ayant une expérience dans la musique, fut surpris de l'oreille musicale et le rythme du comédien.
C'est dans une cité au Neuhof, à Strasbourg, ville où a grandi Abd Al Malik, que fut tourné Qu'Allah bénisse la France.
Abd Al Malik a tourné son film en noir et blanc pour rendre hommage à La Haine (chef d'oeuvre dont il ne réfute pas l'influence), mais aussi au cinéma de Visconti, notamment Rocco et ses frères. Il affirme cependant que "ce n'était pas la raison première". C'est surtout pas souci d'esthétisme que ce choix de photographie a été retenu. Pour l'anecdote, c'est Pierre Aïm, le chef opérateur de La Haine, qui a travaillé sur la photographie de Qu'Allah bénisse la France.
Qu'Allah bénisse la France a été tourné en un temps rapide de 28 jours. Il a cependant fallu six mois de préparation, de casting et de repérages, avant que le coup d'envoi du tournage ne soit donné. Au sujet des acteurs et leur implication dans le projet, Abd Al Malik raconte : "On allait aussi sur les lieux de tournage pour discuter, se mettre dans l'ambiance. Il fallait qu'ils assimilent le texte, qu'on ne soit plus dans le cinéma mais dans la vraie vie, qu'ils soient totalement dans leurs personnages, qu'ils oublient la caméra. Il n'y avait que le temps et le travail qui pouvait permettre d'atteindre cela."