Architecture byzantine

Publié le 07 décembre 2014 par Aelezig

On appelle architecture byzantine le langage architectural qui s’est développé dans l’Empire byzantin et les pays marqués de son empreinte comme la Bulgarie, la Serbie, la Russie, l’Arménie et la Géorgie après que Constantin a transféré la capitale de l’empire de Rome vers Constantinople en 330. De Constantin et jusqu’à la construction de la basilique de la Sainte-Sagesse (Hagia Sophia) sous Justinien, elle constitue essentiellement la prolongation de l’architecture romaine traditionnelle où de vastes édifices étaient consacrés au culte ou aux affaires publiques et pouvaient accueillir de grandes foules. On distingue traditionnellement trois périodes: l’époque primitive (de Constantin jusqu’aux Macédoniens), la période intermédiaire (dynastie macédonienne) et la période tardive (dynasties des Comnènes et des Paléologues).

Basilique Sainte-Irène de Constantinople

Epoque primitive (527-843)

La propagation du christianisme conduit à l’édification d’églises dont le plan, dérivé au départ de celui des temples païens, est celui de la basilique rectangulaire. Une architecture influencée par le Proche-Orient se développe par la suite, où le plan en forme de croix grecque remplace peu à peu celui de forme longitudinale. Les briques se substituent à la pierre de taille comme matériau de construction, la disposition des colonnes se fait plus librement, et les mosaïques deviennent l’élément essentiel de la finition intérieure. De plus, les toitures de bois se voient remplacées par des coupoles de plus en plus complexes.

Les exemples les plus représentatifs de cette première période architecturale sont édifiés au cours du règne de l’empereur Constantin et sont situés à Ravenne et à Constantinople. Cette période voit un progrès décisif dans l’histoire de l’architecture lorsque les architectes, Anthémius de Tralles et Isidore de Milet, découvrent comment asseoir une coupole de forme arrondie sur une base de murs formant un carré. Certes des expériences avaient eu lieu tant en Occident qu’en Orient sur l’utilisation d’un dôme pour servir de toit à des édifices carrés, rectangulaires ou cruciformes, mais c’est vraiment avec la basilique de Sainte-Sophie de Constantinople qu’elles parvinrent à la perfection et que le dôme devient un symbole de l’architecture byzantine.

Le plan original de Sainte-Sophie conserve celui d’une basilique avec nef centrale et bas-côtés, mais la rangée de colonnes traditionnelle se modifie par l’insertion de quatre piliers qui servent d’appui et permettent de passer des murs carrés au dôme circulaire. On trouve ainsi la superposition de deux sortes de plans : le plan longitudinal qui permet l’extension de la longueur et le plan central sous forme d’un carré couronné par un dôme. Cette superposition permet à son tour d’étendre chacune des quatre branches de la croix sur lesquelles on peut alors élever de nouveaux dômes. Ainsi, l’église des Saints-Apôtres de Constantinople également construite sous Justinien, sera dotée de cinq dômes : un sur chacune des branches de la croix et un au point de rencontre des deux branches.

À Ravenne, on mentionnera surtout la basilique à plan central de San Vitale, construite au VIe siècle, et la basilique Sant’Apollinare Nuovo, construite au début du VIe siècle par Théodoric le Grand. À Constantinople, outre la basilique de la Sainte-Sagesse (Hagia Sophia), furent édifiées sous Justinien celle de Sainte-Irène près de celle des Saints-Serge-et-Bacchs, construite entre 527 et 536.

Saint-Apollinaire

De la même période datent parmi les édifices non affectés au culte le Grand Palais de Constantinople, aujourd’hui en ruines de même que le mur de Théodose (vraisemblablement commencé sous Théodose II), lequel avec ses vingt kilomètres de longueur et ses tours imposantes constitue une des principales attractions touristiques de la ville en plus d’avoir permis à celle-ci de résister pendant plus de mille ans à tous ses ennemis. On peut aussi citer le Palais submergé. Commencé sous Justinien dans les années 530, cet édifice qui servit à des usages multiples abritait une citerne souterraine de 138m sur 65m ornée de 28 rangées de 12 colonnes chacune supportant une voûte de briques.

Dans les autres pays de l’empire on doit mentionner l'église Hagios Demetrios de Thessalonique, le couvent fortifié Sainte-Catherine du Sinaï et le monastère de Djvari (VIe siècle) dans la Géorgie moderne ainsi que les trois églises du grand complexe monastique d’Etchmiadzine siège du patriarcat d’Arménie.

Tous ces édifices possèdent quelques traits en commun. En premier lieu, on voit abandonner au VIe siècle un certain nombre de traditions antiques comme le chapiteau corinthien aux volutes compliquées au profit des chapiteaux impostes ou chapiteau byzantin. Les planchers de mosaïques disparaissent également au profit d’un simple dallage de marbre. Plus important encore, les grandes salles hypostyles du plan basilical s’ornent de colonnes qui soutiennent des tribunes et non plus seulement le toit. Sur le plan historique, l’architecture byzantine du VIe siècle représente l’achèvement d’un long processus de développement où les architectes repoussèrent au maximum les possibilités techniques dont ils disposaient.

Période intermédiaire (843-1024)

À la période féconde et novatrice de Justinien succèdent deux siècles de torpeur marqués par les invasions slaves dans les Balkans, les guerres avec la Perse et le siège de Constantinople en 626, la montée des Arabes et de l’Islam, la perte définitive de la Palestine, de la Syrie et de l’Égypte dans les années 630-640, la conquête de l’Afrique du Nord par les Arabes qui assiégent Constantinople en 674-678 et en 717-718. Pendant ces deux siècles, l’architecture religieuse stagne. L’architecture civile décline également, en raison des épidémies de peste, des guerres civiles et de l'affaiblissement des villes. Pendant cette période, on s’attache essentiellement à réparer ou à maintenir les édifices existants. Ces deux siècles forment une sorte de charnière.

Saint-Apollinaire

Dans cette période intermédiaire, au VIIIe siècle, sont construites les premières églises à croix inscrite, plan toujours utilisé dans l’Église orthodoxe. Ce type d’église, généralement assez petite, est centré autour d’un naos (le Saint des Saints) divisé en neuf baies par quatre colonnes qui supportent une voûte. À l’ouest se trouve le narthex (hall d’entrée) et à l’est le bêma (sanctuaire généralement surélevé où se trouve l’autel protégé par un dais, reposant sur des piliers, appelé ciborium), séparé anciennement par un écran du naos, remplacé de nos jours par une iconostase (mur sur lequel sont disposées les icônes). Directement sous le dôme principal se trouve l’ambon (chaire surélevée d’où sont lues les Écritures), et au pied de l’ambon l’espace réservé au chœur de chantres. Autour de l’abside, le clergé prend place sur des marches en escalier entourant le trône du patriarche (le synthronon). De chaque côté du bêma se trouvent deux petites sacristies, le diaconicon (pour les vêtements liturgiques et les textes sacrés) et le prothesis (pour la préparation de la communion).

De forme presque carrée, contrairement aux églises de type longitudinal ou axial ces églises veulent représenter dans leur architecture la hiérarchie du cosmos. Partant de la partie la plus élevée, le dôme, le regard descend vers les voûtes qui surplombent le bêma et les absides, avant de rejoindre les murs. Cette hiérarchie est rendue tangible par des corniches de marbre qui séparent chacune des trois composantes. Au sommet de cette hiérarchie, dans le dôme, figure une mosaïque représentant le Christ et plus bas, une autre représentant la Vierge dans le demi-dôme de l’abside. Suivent au troisième et dernier niveau les anges, les prophètes, apôtres, pères de l’Église et autres saints, alors que les murs illustrent diverses fêtes du calendrier liturgique.

L’Empire byzantin émerge au début du IXe siècle du chaos dans lequel il s'est débattu au cours des siècles précédents. On qualifie cette période de « Renaissance macédonienne ». Mais cet empire ne couvre plus l’ensemble de la Méditerranée. L’Asie Mineure est le théâtre des invasions arabes ; les Slaves s’installent dans les Balkans ; le sud de l’Italie et la Sicile sont le théâtre d’une lutte entre le pape et les Normands. Si bien que la deuxième période de l’architecture byzantine se concentrera presque uniquement sur Constantinople et ses environs. L’Islam commencera à exercer une certaine influence.

Les règnes de Théophile (829-842) et de Basile Ier (867-886) sont marqués par une volonté de rénovation et de consolidation de l’art traditionnel.

Les monuments érigés durant cette période imitent les monuments les plus glorieux de Justinien, sous une forme plus modeste toutefois, car ils ne sont plus destinés aux foules d’autrefois, mais au public plus restreint qui gravite autour de l’empereur : dignitaires et courtisans. De même, les églises nouvellement construites sont moins destinées à être le siège d’un évêché ou d’une paroisse qu’à desservir un monastère dont le clergé devient de plus en plus autonome et cherche à se soustraire aussi bien à la juridiction épiscopale qu’impériale.

Saint-Sauveur-en-Chora, Constantinople

À cette période d’effervescence architecturale, succède sous Basile II (976-1025) une période de vide presque complet. L’empereur est un soldat économe qui s’occupe peu d’architecture et veut avant tout reconstituer le trésor public.

Dans les pays qui ont déjà fait partie de l’empire, l’influence byzantine subsiste, mais les traditions locales deviennent prééminentes. Ainsi, en Sicile, autrefois partie de l’empire, mais conquise par les musulmans en 662 avant d’être prise par les Normands en 1072, se développe un genre que l’on pourrait qualifier d’ « orientalisant ». Presque tous les rois normands iront chercher leurs artisans dans le monde byzantin. Et si les églises qu’ils font construire adoptent généralement le plan à trois nefs occidental sans coupole, leur finition intérieure s’inspire de celle de Byzance.

Alors que l’Empire byzantin entre dans cette période sombre, se développe du VIIe siècle à la conquête arabe en Arménie un genre propre. Très tôt on abandonne le plan longitudinal en faveur du plan en croix inscrite dans un carré et les architectes élaborent diverses formes de dômes et y ajoutent des niches abritant des chapelles sur certains côtés du carré (église de Mastara) ou détachent le dôme des quatre murs pour le faire reposer sur des piliers ou colonnes (cathédrales de Bagaran et d’Etchmiadzin). Elles se caractérisent par l’utilisation de plans circulaires ou octogonaux, inscrits ou non dans un carré.

L’empereur Théophile se consacre surtout à la remise en état du mur de protection le long de la mer et à la construction de palais à Constantinople. L'architecture de ces palais est fortement influencé par ce que les envoyés de Théophile avaient vu en Syrie et rappellent ceux des dynasties omeyyades et abbassides. Basile Ier pour sa part, construira ou rénovera quelque trente-et-une églises.

Monastère Saint-Luc

Les monastères byzantins de cette époque présentent des complexes architecturaux possédant des caractéristiques communes. Ils sont généralement entourés d’un mur et dotés d’un portail élaboré, souvent garni de bancs où pauvres et mendiants viennent demander l’aumône. Le portail s’ouvre sur une large cour intérieure au milieu de laquelle s’élève l’église qui est, contrairement à la pratique de l’époque primitive, séparée des autres bâtiments ce qui oblige à donner plus d’importance à son aspect extérieur. Les quartiers d’habitation s’alignent à l’intérieur des murs avec leurs cellules rectangulaires, généralement voûtées. Le deuxième édifice en importance est le réfectoire et la cuisine attenante. Les autres bâtiments comprennent habituellement une fontaine, un four, une maison pour les visiteurs, quelques fois une infirmerie et des bains.

C’est aussi à cette époque que commence la construction des monastères du Mont Athos lesquels, avec la Grande Lavra de Saint Anthanase en 961 deviennent progressivement le centre du monachisme orthodoxe. Sauf pour le Protaton, église la plus ancienne située dans la capitale administrative de Karyès, toutes les autres églises épousent la forme d’un trèfle sur le modèle du katholikon (église principale d’un monastère) qui aurait été bâti par saint Athanase lui-même.

Période tardive (1204-1453)

Dès le XIIe siècle, l’Empire byzantin commence à se morceler. La chute de Constantinople en 1204 ne fait qu’accélérer cette tendance alors que se forment l'empire de Nicée et l'empire de Trébizonde, le despotat d’Épire, la principauté de Morée et diverses principautés latines. L’architecture de cette période suit l’évolution des influences politiques exercées sur ces territoires (Géorgiens et Turcs pour l’empire de Trébizonde, Francs et Slaves pour le despotat d’Épire, Vénitiens et Génois pour les grands centres commerciaux), de même que religieuses : Église catholique romaine et Islam. Que ce soit dans la construction des châteaux forts ou des églises, le style gothique commence à pénétrer dans cette région du monde.

Après la reconquête de Constantinople, de nouveaux édifices, principalement églises, monastères et palais, verront le jour, mais ce nouvel élan sera rapidement freiné par les guerres civiles des années 1320 et 1340.

Eglise de la Parigoritissa, Arta

Le despotat d’Épire est probablement le plus dynamique sur le plan architectural, de nombreux monuments étant associés à la famille régnante. Deux des principaux édifices de cette période sont le monastère de Katô Panagia près d’Arta construit par le despote Michel II entre 1231 et 1271 et la basilique de Porta Panagia érigée en 1283 par Jean Doukas, fils de Michel II. Ces deux édifices sont à « voûtes d’arêtes ». Très répandu en Grèce à partir du XIIIe siècle, ce plan d’église à trois nefs ressemble à celui de la croix inscrite, mais sans dôme. Le chef-d’œuvre de l’école épirote reste cependant l’église de Parigoritissa d’Arta érigée en 1290 par le despote Nicéphore Ier Comnène Doukas. Il s’agit d’un édifice de trois étages presque carré. De type octogonal, le dôme central est supporté par huit piliers ; quatre dômes plus petits ornent chacun des coins du toit plat.

À Constantinople même et en Asie Mineure, l’architecture de la période coménienne est pratiquement inexistante à l’exception de la Elmali Kilise, église taillée dans le roc, construite vers 1050 central en Cappadoce et comprenant quatre piliers irréguliers formant une croix grecque et supportant un dôme ainsi que les églises du Pantokrator (aujourd’hui connue sous le nom de Zeyrek Camii) et de la Theotokos Kyriotissa (Vierge du Trône, aujourd’hui connue sous le nom de Kalenderhane Camii) de Constantinople.

Si on a pu parler de « renaissance » pour caractériser le sursaut intellectuel qui survient sous la dynastie des Paléologues, celui-ci ne se manifeste guère dans le domaine architectural. Les quelques palais et monastères qui datent de cette période perpétuent les traditions de la période intérimaire sans y ajouter de nouveaux éléments.

Hors de Constantinople, l’église des Saints-Apôtres de Thessalonique est souvent considérée comme typique de cette dernière période avec ses murs extérieurs ornés de motifs faits de briques entrecroisées ou de céramique. Contrairement aux époques précédentes, l’extérieur prend le pas sur l’intérieur et se dote de niches, arcades, corbeaux et de denticules où tuiles et pierre s’entrecroisent. Cette maçonnerie en relief atteint probablement son point culminant avec l’église d’Achtamar sur l’île du même nom dans le lac de Van, symbole de l’architecture arménienne.

Eglise d'Achtamar

Contrairement à leurs collègues byzantins, les architectes slaves donnent de l’impulsion aux structures verticales. Il en résulte que l’on perd l’impression du dôme comme voûte céleste s’abaissant graduellement vers le monde des hommes en une courbe majestueuse. Le dôme devient une sorte de puits inversé. L’espace horizontal est privilégié et se couvre de scènes qui deviennent des tableaux.

L'héritage

L’architecture byzantine eut une profonde influence sur l’architecture islamique primitive. Alors que le Dôme du Rocher tire son plan et, en partie, sa décoration de l’art byzantin, le plan de la mosquée des Omeyyades offre une grande similarité avec ceux des basiliques chrétiennes des VIe et VIIe siècles tout en étant modifié pour allonger l’axe transversal plutôt que l’axe longitudinal tel qu’on le voit dans les basiliques chrétiennes, modification qui s'accommode mieux avec la liturgie islamique. Les figures géométriques, arches multiples, dômes et compositions polychromes de briques et de pierres qui caractérisent l’architecture islamique et maure trahissent l’influence byzantine.

L’influence byzantine persiste en Bulgarie, Russie, Roumanie, Serbie, Géorgie, Ukraine et autres pays orthodoxes longtemps après la chute de Constantinople pour donner finalement naissance à des écoles d’architecture propres à ces pays.

D'après Wikipédia