Mercredi prochain, le ministre de l'économie, Macron, présentera à l'Assemblée nationale un texte fourre-tout dont celui relatif à l'extension du travail dominical.
Grosso modo, sauf modification de dernière minute, le texte prévoit que les maires pourront autoriser 12 dimanches au lieu de 5 l'ouverture des commerces de détail non alimentaires et le gouvernement créer unilatéralement des zones touristiques internationales où tous les commerces seront autorisés à ouvrir le dimanche. De plus, les établissements qui comptent moins de 20 salariés n'auront plus l'obligation de mieux rémunérer les salariés impactés. Enfin, ce texte porte aussi sur l'extension du travail de nuit...
Il n'est pas dit que ce projet passe en l'état, tant l'opposition dans le camp de la majorité "socialiste" est importante.
La CFDT y est opposée et demande au président de la République de reprendre le dossier, lui rappelant ce qu'il disait du travail dominical en 2008 :
« erreur économique d’abord, sociale ensuite et sociétale surtout. ».
Ce syndicat très proche du parti "socialiste" dénonce :
« la dégradation des droits des salariés concernés, et en particulier des salariés des établissements de moins de 20 salariés, la multiplication des situations dérogatoires, le pouvoir de décision unilatérale donné aux maires, la sortie des heures de 21 heures à minuit du décompte du travail de nuit, l’ absence de la prise en compte des sous-traitants et prestataires ainsi que des branches au sein desquelles le travail du dimanche bénéficie d’une dérogation permanente. »
La maire de Paris et sa majorité municipale s'y opposent également. Le rapport de la mission d'information et d'évaluation rendu public vendredi dernier conclut que :
« environ 20 à 25 % » des commerces travaillent ce jour-là et couvrent la totalité des besoins de la vie courante. Force est de constater que les arguments économiques en faveur d’une ouverture dominicale plus large ne sont pas concluants. L’effet sur l’emploi d’une ouverture plus large n’est prouvé par aucune étude . Elle créerait une distorsion accrue de concurrence fatale à nombre de commerces de proximité »
La Chambre du commerce - qui a été consultée - est hostile à la banalisation du travail dominical :
« A Paris, vous avez encore du commerce de proximité, grâce à la politique de préservation mise en œuvre depuis des années, aussi bien du temps de Jacques Chirac, de Bertrand Delanoë que d’Anne Hidalgo, qui a permis de conserver des équilibres sur toutes les formes de commerces. Quand vous allez dans les grandes villes françaises, c’est inimaginable de voir l’état du commerce de proximité (…) Vous avez des villes où il n’y a plus de commerces. Le commerce alimentaire et artisanal se concentre en périphérie. »
De plus, il apparaît que les zones touristiques internationales seront inutiles pour accroître la consommation des touristes étrangers, la durée moyenne de leur séjour se situant entre 4 et 6 jours, leur permet largement de faire du shopping...
Enfin, le rapport considère que les conséquences sociales seraient très lourdes :
- aggravation de la précarité;
- dégradation des conditions de travail, notamment pour les salariés des entreprises hébergées dans les grandes enseignes;
- détérioration des conditions de vie et la santé (allongement des temps de transport lié à l’éloignement du domicile, moindres conditions de sécurité pour les plages horaires atypiques);
- difficultés accrues de garde d’enfant, principalement pour les familles monoparentales (les femmes représentent 70 à 80 % des salariés du commerce).
Il ressort de ces éléments que le gouvernement Valls est prêt à sacrifier les conditions de vie et de travail des salariés pour des gains économiques plus qu'incertains et douteux. Mais, il n'est pas sûr de remporter la majorité, même relative, à l'Assemblée nationale.
Le sort de ce texte dépend du vote des députés frondeurs du PS... Feront-ils ce qu'ils n'ont encore jamais fait, en d'autres termes, prendront-ils enfin leurs responsabilités de s'opposer réellement à la politique néolibérale du président Hollande ? Nous le saurons bientôt...