La majorité ayant prévu une conférence de presse sur le sujet quelques heures avant le conseil, l'opposition a préparé sa riposte en avance rencontrant la presse avant pour établir leur ligne de défense...
Tout cela est retombé à l'eau devant l'analyse présentée par Mr. Sedlacek qui loin de la polémique a dressé un tableau financier précis, que Jérôme Mouhot a reconnu objectif, même si bien sûr les vues divergent sur l'interprétation et les explications.
Devant autant d'attente chacun avait appelé ses supporters, et c'est un conseil municipal avec salle comble qui a eu lieu mardi soir à l'hôtel de ville.
Tous les conseillers étaient présents à l'exception de Gilles Le Moine et Bertrand Sourisseau. Autour environ 50 citoyens présents. A noter que les journalistes avaient changé de place et se retrouvait devant le public, donc face aux élus.
Le budget d'une municipalité
En guise d'introduction, un petit rappel sur la structure budgétaire d'une municipalité.
Les finances publiques d'une municipalité sont composées d'un budget principal et d'un ou plusieurs budgets annexes. Le budget principal comprend toutes les charges et recettes directes de la ville. Les budgets annexes comprennent des services externes comme la gestion des déchets à Cognac.
Ce budget primitif est découpé en 2 parties : fonctionnement et investissement.
Chacune d'elle comprend une part de recettes et une part de dépenses qui doivent s'équilibrer :
- le budget de fonctionnement qui recouvre tous les éléments permettant le fonctionnement courant de la ville
- recettes (ou produits) : impôts locaux (taxes d'habitations et taxes foncières), allocation de la communauté de communes (reversement d'une part des taxes professionnelles), diverses dotations de l'état (DGF, DSU), autres taxes (droits de mutation, taxes parafiscales) et un éventuel produit d'exploitation (recettes sur certains services publics comme le stationnement, la piscine, la bibliothèque...)
- dépenses (ou charges) : salaires, achats (énergies, petits matériels...), subventions versées aux associations et les charges financières liées à la dette...
- le budget d'investissement qui recouvre les gros chantiers, les créations de structures nouvelles...
- recettes (ou ressources) : emprunts bancaires, subventions reçues (état, région, département...), FCTVA
- dépenses (ou emplois) : équipement (les véritables investissements), les remboursements d'emprunt
Voir le billet du 27 janvier dernier pour mieux appréhender la structure des ressources de la municipalité en 2007.
Pour les plus mordus le site Localidées propose un guide assez complet du budget municipal et quelques outils d'analyses.
C'est donc Patrick Sedlacek, le nouveau "monsieur finance" qui a présenté le dossier. Toutes les données sont issues des chiffres officiels publiés par le ministère de l'économie et disponibles pour tous sur le site internet Alize.
Patrick Sedlacek s'appuiera, à titre de comparaison, pour son analyse des taux correspondants aux villes moyennes de même importance (villes de la strate 20000 à 50000 habitants avec TPU). Il en ressort globalement que l'équipe municipale précédente aurait favorisé dans son budget les écoles, la culture et les actions économiques ; au détriment des services généraux, du sport et surtout de l'aménagement urbain et de l'environnement dont la part ramenée par habitant est très faible vis à vis des villes moyennes.
Il ressort que la période se décompose en 2 parties assez distinctes :
- 2002-2005 : Période de lourds investissements (MACO, Espace 2000/3000, Cuisine centrale, Réfection du marché, Réfection du Jardin public... Ces investissements ont apporté des charges de fonctionnement importantes (nouveau personnel, consommation d'énergie, entretien...) qui n'ont pas été anticipées selon Patrick Sedlacek, ce qui a conduit la diminution de la marge de manœuvre par la suite. En 2005 ce sont par exemple 30 nouveaux postes qui ont été crées par la ville.
Sur cette période l'investissement de Cognac a été 30% au dessus de l'investissement moyen des villes comparable. Aucun aménagement des impôts n'ayant été effectués, c'est la dette qui se retrouve donc logiquement 30% au dessus des mêmes villes comparable. - 2006-2008 : Période ou les investissements sont ramenés à des niveaux plus conformes à l'échelle de la ville. Mais les charges crées précédemment alourdissant le budget de fonctionnement et les recettes n'évoluant pas (une seule augmentation des impôts locaux de 6% en 2005, une première depuis 1992) la marge de manœuvre est devenue alors très étroite.
Sur cette période, la comparaison ramène Cognac à peu près dans la moyenne de la strate.
En conclusion, Patrick Sedlacek note que Cognac est atypique vis à vis des villes de la même strate, ayant des dépenses supérieures, des recettes inférieures, des impôts locaux très faibles (la moitié de ceux des villes comparables) et un endettement plus fort. En 2002 la capacité de remboursement était de 6 années, elle s'établit 6 ans plus tard à 11 années, montrant bien l'endettement de la ville. Cette capacité de remboursement mesure la durée qu'il faudrait à la ville pour rembourser la dette en cours.
Le Maire, Michel Gourinchas a pris la parole a l'issue de la présentation pour indiquer que si il est de tradition pour une nouvelle équipe de faire réaliser un audit financièr, il a préféré réaliser une analyse interne sur ce point afin de disposer de résultats rapidement et économiser l'appel à un cabinet d'audit. Il a indiqué avoir gelé des ventes d'immeubles lancées par l'équipe précédente en fin de mandat et qu'un audit sera réalisé avant sur le parc immobilier de la ville.
Il a aussi précisé qu'au vu de la situation il est heureux que le programme pour lequel il a été élu soit financièrement modeste, ce qui permettra à son équipe de la réaliser tout de même.
Il a finalement conclu que si la situation n'est pas bonne, elle n'est pas non plus catastrophique. Elle n'est pas verte, ni rouge mais plutôt orange... On a alors entendu Jérôme Mouhot lâcher un "rose plutôt", en forme de boutade. Boutade que certains de mes voisins de bancs n'ont guère goûté après le tableau qui venait d'être brossé sur les finances de la ville...
C'est Émilie Richaud, nouvelle quand l'équipe de l'opposition, qui a pris la parole pour remarqué que ce dossier n'avait pas fait l'objet d'une note de synthèse à l'attention des élus de l'opposition comme cela est la coutume. Elle a critiqué le manque de démocratie participative, précisant que de plus l'équipe municipale avait rencontrait la presse sur ce point juste avant la séance.
Michel Gourinchas lui a répondu qu'il n'avait pas jugé nécessaire de perdre du temps à rédiger une note de synthèse que des données sont publiques et qu'elles sont très bien connues de l'opposition, puisque siège ici l'ancien maire et son 1er adjoint aux finances et que l'opposition a aussi rencontré la presse à ce sujet en début de journée...
Jérôme Mouhot a alors pris longuement la parole. indiquant en premier lieu qu'il ne ferait pas la déclaration qu'il avait préparé car elle serait décalée. Il a reconnu connaître ces chiffres et que le bilan présenté par Mr. Sedlacek est honnête et objectif. Il a toutefois contesté l'interprétation et les conclusions. Il a précisé que les faibles taux d'imposition sont historiques à Cognac, ou pendant longtemps les maisons de Cognac apportaient par le biais de la taxe professionnelle une manne financière à la ville qui ne nécessitait pas une imposition des ménages. Mais que depuis que la taxe professionnelle est transférée à la Communauté de Communes (1993) et de part le fonctionnement financier (reversement sur la base des taxes de 1993) la situation avait bien changé en effet. Son équipe n'a pas voulu toucher au pouvoir d'achat (en augmentant les taxes locales) et a préféré avoir plutôt recours à l'emprunt comme cela a été montré.
Il est ensuite revenu sur l'effet ciseau (déjà maintes fois expliqué lors des orientations budgétaires 2006, 2007 et 2008) : les recettes sont stables (pas de hausses d'impôts, désengagement de l'état, de la région et du département) et les dépenses en hausse (pour satisfaire les besoins de services de la population) aboutissant à une marge de manœuvre perpétuelle réduite.
Il a conclu en disant vouloir aller au delà des chiffres et que si la situation peinte par Mr. Sedlacek est objective, il s'agit là d'un constat et que maintenant il faut se poser la question de savoir comment en sortir.
A cet instant de nombreux rires dans le public sont venu souligner l'aspect assez grotesque de la situation : l'ancien maire responsable pour partie de la situation qui réclame que l'on fasse abstraction du constat pour ensemble chercher des solutions...
Patrick Sedlacek a ensuite indiqué que l'on ne passe pas de manière impromptue de 6 à 11 ans de capacité de remboursement sans rien faire.
Jérôme Mouhot a repris la parole pour indiquer que justement son équipe avait rectifié le tir à partir de 2005 en menant un budget de rigueur. Que les lourds investissements de la période 2002-2005 était pour partie des engagements de la municipalité précédentes (espace 2000, MACO) et pour partie des investissements nécessaires à la ville (Cuisine centrale, réfection du marché ou du jardin public).
Jérôme Mouhot a ensuite lancé l'explication sur les subventions reçues. Celles de la région et du département notamment qui ont énormément baissé pendant son mandat lorsque la majorité au conseil général a changé.
Michel Gourinchas lui a alors rappelé qu'il était 1er adjoint de la municipalité précédente (Francis Hardy) et que si les subventions de la région ont baissé lorsque Ségolène Royal en a pris les rênes c'était plus du à la situation financière très difficile de la région et du département laissé par les prédécesseurs, situation que Monsieur Mouhot connaît très bien.
Noël Belliot est alors entré en scène pour indiquer que la comparaison avec les villes de la même strate était un exercice délicat et peu précis, qui ne tenait pas compte des variations régionales ou locales. Que les gros investissements réalisés en début de mandat et votés par la municipalité précédente (Francis Hardy) il les avait dénoncés à cette période, notamment le MACO dont il avait prédit que cela allait plomber le budget de fonctionnement de la ville (rappelons que Noël Belliot n'était pas dans la majorité avant 2002).
Il a toutefois précisé que leur gestion (de 2002 à 2007) a été bonne et que malgré les difficultés ils ont redressé la barre sur la fin du mandat. Il a aussi regretté que le transfert à la Communauté de Communes de soit pas plus équilibré pour la ville centre (Cognac) qui supporte la plupart des charges.
Pour clore ce dossier, Michel Gourinchas rend public un courrier du sous-prefet. Aussitôt interrompu par Jérôme Mouhot qui dénonce qu'aucune copie de ce courrier ne lui ait été transmise, mais qui enchaîne un indiquant qu'à Cognac tout se sait et qu'il connaît déjà le contenu du courrier dispensant le maire de la lire !
Michel Gourinchas reprend donnant lecture rapide de ce courrier qui attire l'attention du nouveau maire sur la situation financière délicate de la ville et dénonce des artifices comptables pour masquer la situation réelle. Le sous-prefet indique clairement qu'il aurait fallu réduire le volet investissement de manière bien plus importante.
Autres sujets à l'ordre du jour
Lors de la décision modificative n°1 au budget, Michel Gourinchas explique que dans la volonté de redonner vie aux quais et comme une première étape, l'équipe municipale a lancé la réalisation de cabanes-chalets en bois qui accueilleront dès la fin de la fête du Cognac et tout l'été des artisans et des échoppes sur les quais. Qu'il s'agit là d'un premier pas vers des choses de plus grande envergure : 20 chalets pour un budget de 35 000 euros.
Émilie Richaud demande si le budget totale a déjà été étudié, incluant le temps passé par les services techniques à la fabrication. C'est le directeur financier qui répondra, précisant qu'à ce jour c'est seulement le matériel qui est mis au budget et que les services techniques n'ont pas encore remis leur estimation sur la durée de fabrication pour la bonne raison qu'il n'ont pas commencé, le bois n'a pas encore été livré. C'est la fabrication du premier chalet qui servira d'étalon.
Lors du vote d'un soutien exceptionnel au CBB (club de basket), Romuald Carry a évoqué la préparation des assises du sports à Cognac, le 14 juin prochain à la Salamandre. Ces assises seront l'occasion de faire le point sur l'état global des clubs à Cognac et de réunir tous les acteurs locaux et régionaux du sport, sont invités des élus, la communauté de cognac, les comités, les clubs, etc...
Il a été voté quelques attributions de commissions complémentaires à celles d'avril. L'opposition a changé son représentant à la commission sport, retirant Bertrand Sourisseau pour le remplacer par Noël Belliot. Dans le classement établi dans le billet du 11 avril dernier, Bertrand Sourisseau rétrograde donc en dernière position de l'équipe de l'opposition et Michel Jayat progresse légèrement (+2 commissions).
La majorité change un représentant à la Communauté de Communes : Romuald Carry remplace Maude Pourquier.
Pour la prochaine rentrée scolaire, l'académie a fait savoir à la ville qu'au vu des effectifs, c'est un poste d'instituteur-professeur qui serait supprimé à l'école Victor Hugo et qu'un poste d'instituteur à la maternelle Saint-Exupéry était en sursis. Michel Gourinchas a lu une motion adressée à l'académie pour refuser cette décision.
Michel Gourinchas a indiqué de plus que la situation de l'éducation à Cognac était fragile, car en plus de ces postes directement charge de la ville, c'est 3 BEP qui seront supprimés à la rentrée (60 élèves) ainsi que 2 ateliers de SEGPA (64 élèves). Il a ensuite précisé que son équipe était sur le terrain pour que les effectifs soient complets à l'école maternelle Saint-Exupéry afin que le poste en sursis ne soit pas supprimé lors du comptage à la rentrée.
La motion a été voté à l'unanimité. Malheureusement, comme a chaque fois l'académie risque fort de ne pas en tenir compte.
A l'occasion des premières interventions de Jean-François Hérouard (président commissions environnement durable, urbanisme, environnement et cadre de vie), Noël Belliot est intervenu pour critiquer ce dernier, indiquant que la commission ne s'était pas encore réunie et qu'il soupçonnait le président de ne pas réunir la commission pour ne pas le rencontrer. Il a aussi indiqué, faisant allusion àl'article de presse de Charente Libre du 3 avril, que la mise en place de l'agenda 21 et des actions annoncées n'avait rien de neuf. On sent bien que la tension n'a pas fini de retomber entre les 2 hommes...
Michel Gourinchas a annoncé que la ville étudiait la possibilité de postuler pour le label ville d'arts et d'histoire.
Conclusions
Un conseil municipal un peu étrange, ou l'opposition prête a une attaque virulente sur sa gestion passée a fourbi ces armes un peu trop tôt semble-t-il. Ou derrière un ton bon-enfant et des allusions légères et parfois teinté d'humour on sent les tensions présentes à fleurs de peau. Noël Belliot que l'on ressent très présent et très opposant, sortant vite la critique sur les sujets ou il était anciennement responsable (eau face à Simon Clavurier et Environnement face à Jean-François Hérouard). Très présent aussi à la mairie semble-t-il, puisque au cours de ses interventions on l'a souvent entendu dire qu'il a demandé tel dossier, telles informations au service, au directeur de cabinet, etc...
Si l'opposition semble avoir perdu Bertrand Sourisseau (définitivement ?), c'est bien Noël Belliot qui compte bien être en 1ère ligne du front ou du moins affirmer fortement sa présence dans l'opposition.
Dans un prochain billet je reviendrai probablement plus en détail sur les finances municipales, en attendant vous pourrez suivre la construction des données de base et des graphiques sur la page dédiée aux finances de Cognac sur le site internet du Retour de l'Autruche.