Ken Bruen, né en 1951 à Galway, est un écrivain irlandais de romans policiers. Après ses études et un diplôme de docteur en métaphysique, Ken Bruen se met à voyager beaucoup, enseignant l’anglais dans de nombreux pays d’Afrique, d’Asie du Sud-est et d’Amérique du Sud. Il fait même un séjour très éprouvant en prison au Brésil. De retour en Irlande, il se fixe dans sa ville natale et écrit des romans noirs, menant de front deux séries distinctes, l’une avec le détective privé Jack Taylor comme héros, la seconde avec les inspecteurs Roberts & Brant. Le roman Chemins de croix, qui date de 2007 et vient d’être réédité, est une enquête de Jack Taylor.
Jack Taylor, ancien policier viré pour alcoolisme et reconverti en détective privé, ressasse son passé et la mort de ceux qu’il a aimés et perdus. Son amie Ridge, policière, l’incite à l’aider pour démêler un crime sordide qui vient d’être découvert dans leur ville de Galway, un adolescent a été crucifié.
Si cette amorce vous semble croustillante, l’enquête inexistante et le dénouement somme toute assez banal, risque de décevoir ceux qui comme moi ne connaissaient pas Jack Taylor. Tout d’abord un conseil pour vous éviter ma déconvenue, lire les polars de cette série dans leur ordre de parution, sinon vous allez être vite agacés par les (trop) multiples références à des évènements qui vous sont inconnus, Chemins de croix étant le sixième opus de ces enquêtes. Ensuite il va vous falloir beaucoup de compréhension pour accepter le personnage de Taylor, certes il a énormément souffert dans son âme (une fillette et un jeune collègue tués en partie par sa faute dans des romans antérieurs) et son corps est marqué par son alcoolisme passé, la claudication et un début de surdité - vous voyez le tableau ! – ce qui lui vaut un caractère épouvantable, critiquant tout, gueulant après tout le monde, ce qui le rend infréquentable.
Au point que même le lecteur se demande pourquoi il doit endurer ça. Sauf à considérer que l’aspect polar n’est qu’un prétexte pour l’écrivain pour une étude de caractère, où le poids du remords comme une croix à porter pour son héros, est le véritable sujet de ses romans. Comme le bouquin regorge aussi de références à la culture musicale rock anglo-saxonne, la littérature, la religion et la politique en Irlande, son histoire et son économie, un peu gâtées par les trop nombreux renvois en bas de page à mon goût, nous n’avons plus un simple roman noir mais un bouquin aux prétentions modestement (j’espère ?) sociologiques et psychologiques.
Pour conclure, j’ai eu énormément de mal à entrer dans ce roman, prêt à l’abandonner même. Mais une fois refermé, en prenant en compte les à-côtés indiqués précédemment, je modèrerai la critique négative me venant naturellement sous la plume. Il faudra que j’en lise un autre pour avoir un avis définitif… Wait and see.
« J’ai vu beaucoup d’hommes, de femmes aussi, que l’alcool avait transformé en épaves et dont le visage témoignait de tout ce que l’enfer a à offrir. Mais ce type-là évoquait les photos de Bukowski à la fin de sa vie. Pas beau à voir. Derrière les ruines, je lui aurais attribué la trentaine, mais ses yeux rouges avaient vu des choses qu’un siècle entier de souffrances ne pourrait recouvrir. »