Harcèlement misogyne : vous êtes lourds les gars !

Par Asmaa @frip0uille

He pssst mademoiselle ! He ksss ksss la gazelle t’sais que t’es fraîche ? He ma parole t’es trop charmante, ça te dirait une sucette à la menthe ? He beauté y’a moyen d’avoir ton 06 pour ma saucisse ? Papapapa mademoiselle, viens par ici ma *BEEP* te sollicite ! Allez viens on va se mettre bien bien bien {…}

Articles, campagnes, spots publicitaires, émissions TV, courts-métrages ne cessent de se multiplier pour tenter d’en finir avec ce mal du siècle qui touche un grand nombre de femmes à travers la planète. D’ailleurs, il y a quelques semaines, une vidéo faisait le buzz sur la toile ; pointant du majeur le harcèlement que subit la gent féminine dans les rues de New-York (reprenant ainsi l’expérience tentée auparavant à Bruxelles et au Caire). Cela dit, ce ne sont ni ces vidéos, ni ces articles qui m’ont poussés à en parler sur le blog. C’est en voguant comme à mon habitude sur un très célèbre réseau social -qui a fait du commérage sa marque de fabrique- que je suis tombée sur la page Paye Ta Shnek -> Tentatives de Séduction en Milieu Urbain. En parcourant le Tumblr, j’étais partagée entre crise de fou rire et crise de nerfs. Quand tu lis certaines aberrations, tu te poses des questions : est-ce que ce monde est sérieux ? A quel moment les gens ont craqué leur slip -et c’est le cas de le dire- ?!

Portée par ma curiosité, j’ai navigué de sites en sites, de pages en pages pour finalement tomber sur le billet de Clemmie Wonder. L’angle de son article du caractère polymorphe et multicolore du relou en milieu urbain m’a interpellé ; me rappelant mes aventures pleines de curieux rebondissements aussi bien dans les rues de Casablanca que de Paris (intra/extra muros). J’ai donc eu à mon tour, envie d’ajouter ma pierre à l’édifice avec un billet qui s’inscrit dans la continuité de mon précédent article sur le sexisme.

Je ne suis pas de celles que l’on peut qualifier de vraie féministe de base. Cela dit, il y a des jours où j’ai juste envie de libérer la hyène enragée qui sommeille en moi. Il y a des jours où j’ai juste envie de mettre de bonnes grosses gifles à ces machos misogynes, indisciplinés et  légèrement perturbés.

C’est par un beau dimanche ensoleillé que tu décides de t’accorder une pause dans ton quotidien qui te rend dingue. Tu appelles une amie et lui proposes d’aller bruncher dans un restaurant sympa qui longe les quais de Seine. Il fait 25° à l’ombre et le soleil brille de mille feux ; tu jettes un coup d’œil à ton dressing -qui, soit dit-en passant, n’a rien à voir avec celui de Vicky Beckham ou Carrie Bradshaw-. Tu aperçois la jolie robe que tu as raflé il y a quelques jours sur Assos et tu te dis qu’elle irait très bien avec tes Tropéziennes Gucci (non je déconne, H&M). Christophe Maé à fond les enceintes, tu te pavanes dans ton loft de 20m2 telle un Ange Victoria Secret (avec 10 kilos en plus). Tu te sens belle, tu te sens fraîche. Tu te la joue remake de Blanche Neige à converser avec toi miroir. Bref, tout plane pour toi jusqu’au moment fatidique où tu te rends compte que finalement, la robe est peut-être une fausse bonne idée. Bah ouais, elle t’arrive aux genoux, quelle indécence ! C’est limite un appel au viol et on risque de bien te le faire remarqué dans la jungle (par « on » comprendre les garçons, par « jungle » comprendre la ville). C’est là que ton sang se glace ; tu rougis, pâlis, culpabilises. Puis il y a cette petite voix (tu ne sais pas encore si c’est l’ange ou le démon) qui te raisonne et qui te rappelle que ce n’est qu’une robe, tout ce qu’il y a de plus normal. Tu te dis qu’après tout, c’est vrai. Ce n’est qu’une robe et qu’aujourd’hui, la météo est parfaite pour la porter ! C’est décidé, un dernier check pour l’ultime ravalement de façade et tu quittes ton palace en mode chèvre de Monsieur Seguin qui va gambader dans les rues de la capitale. Quelle insouciance !

Paris 17°, Avenue de la Grande Armée, direction le métro. Tu te prélasses au soleil, glisses sur la chaussée avec cette impression de marcher sur l’eau (on voit ici l’influence Maé). Au bout de quelques mètres, tu as cette étrange sensation d’être épiée. Comme dans les films, tu lèves les yeux au ciel à la recherche d’un éventuel sniper qui t’aurait pris pour cible. Insurmontable déception quand tu t’aperçois qu’il n’y a ni tireur d’élite, ni SWAT à tes trousses. Ce n’est qu’un lourd-dingue, puis deux, puis trois, parmi la longue liste de leur espèce qui te traquent depuis quelques minutes.

Nous y voilà. Le traditionnel schéma auquel a droit toute fille qui marche dans la rue.

Fini de rêvasser, il faut accélérer la cadence. Tu presses le pas, à la limite du sprint (c’est dans ce genre de moments que tu te crois capable de battre le record d’Usain Bolt). Elle est encore loin cette fichue bouche de métro ? Entre les tentatives -pitoyables- de drague qui frôlent le harcèlement, les sifflements rocailleux à base de psst psst mademoiselle et le concert de klaxons déclenché en ton honneur, tu ne sais plus où donner de la tête. Cette cacophonie te donne mal à tête, à te faire regretter ce jour -normal- où tu as décidé de prendre un bain de soleil comme les gens -normaux- dans une tenue manifestement -pas- normale. Tu n’as plus qu’une seule envie : rebrousser chemin et rentrer te cloîtrer chez toi !

Entre les gars qui te sifflent, ceux qui te font des pseudo-déclarations -un peu trop familières à ton goût- et ceux qui essayent de te prendre la main de force, tu étouffes.Tu n’en veux pas de toute cette attention, tu n’as rien demandé à personne si ce n’est la PAIX ! Tu te surprends à maudire ce moment de faiblesse où tu as succombé à l’appel de cette jolie robe. Tu regrettes d’avoir agit en fille, qui pour une fois, voulait elle aussi faire sa coquette. Mais bon sang qu’est-ce que tu racontes ! Ce n’est pas comme si tu étais sortie avec pour seul habit un bouton de chemise pour cacher ta fleur (bon ok un bouton XXL alors). Mais là n’est pas la question ! Le fait est que tu n’as absolument rien à te reprocher. De quoi s’agit-il alors ? D’un complexe d’Œdipe qui a mal tourné ? D’une expérience passée mal digérée ? D’un excès de machisme démesuré ? D’un ego surdimensionné ? Ou juste un besoin pathologique de faire déféquer (comprendre le mot en C) le monde ? Surtout les filles.

Il faut quand même se rendre à l’évidence, cet individu aux mœurs légères, quand il pratique le voyeurisme, quand il te siffle et t’affuble de noms d’animaux (gazelle, chienne, cochonne, pigeonne), franchement, quelles sont ses attentes ? Que tu daignes t’arrêter et te soumettre pour lui filer ton 06 comme il l’a te l’a gentiment ordonné ? Visiblement non étant donné que quand tu réponds, le gars en question à l’air surpris, limite choqué. Alors c’est quoi l’affaire au final ? S’agit-il uniquement d’un réflexe ? D’une mauvaise habitude ? D’un virus qui touche exclusivement le « sexe fort « . Bref, à bien y penser, tu réalises que ces cas sociaux, font ça machinalement, par pur automatisme. Tu plonges alors dans les archives de ta mémoire, te remémorant les discours solennels sur l’inné et l’acquis. Tu refoules l’idée que ça puisse être inné. Aucun humain ne peut naître vicieux et immoral. Sachant pertinemment que ce même individu -à défaut de ne pas avoir de sœur- a à coup sûr une mère. Tu te résorbes donc à croire que c’est un « mal » acquis. Puis tu finis par te dire qu’il y a des mères qui ont dû rater le coche quand il s’agissait d’éduquer leurs bambins.

Entre toute autre chose, j’aurais dû m’arrêter faire une pause, mais comme De Palmas, j’étais trop pressée. Rien à faire, tu ne veux pas céder. Oh, tu ne veux pas me lâcher ? Sale * BEEP* ! Pour qui tu te prends * BEEP* ?! Rentre chez ta *BEEP* ! Erreur fatale, j’aurais peut-être dû m’arrêter, faire semble de t’écouter blablater. Mais que veux-tu, j’étais sur la route toute la sainte journée. Quand tu m’as accosté, tu n’as pas vu le doute en moi s’immiscer. J’étais sur la route toute la sainte journée. Si seulement tu avais pu lire dans mes pensées, en courant tu te serais barré !  ♪♪♪

Si toi aussi, t’es une fille et que t’en à marre, je t’invite à te défouler dans les commentaires   

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