Samuel me suivait, il est entré et a posé quelque chose sur le comptoir de la cuisine, le livre qu’il avait à la main, après ça il s’est retourné vers moi, il a dû ouvrir la bouche, dire quelque chose que je n’ai pas entendu ou pas compris, il a fait un pas dans ma direction et il est mort.La puissance de ce "il est mort", qui marque la disparition de Samuel- il n'y a pas de cadavre, Blanès n'est en rien un roman policier -, est étonnante. Car Eva ne parvient pas, ne parviendra pas à envisager cette disparition autrement que comme une mort, une perte subite et définitive. Il y a donc l'avant et l'après. le roman ne nous parle, très vite, que de l'après, pendant lequel Eva revient à Blanès, cherche, se perd, trouve - d'autres choses: les bolanistes en particulier, admirateurs de l'écrivain chilien qui a fini sa vie dans cette ville côtière, dans un jeu de piste très littéraire, que la littérature inspire et rehausse. Une vie à côté de la vie, aussi. C'est comme si l'anecdote n'avait plus guère d'importance et que le personnage central se déplaçait entre les pages d'un livre potentiellement à écrire. Il est écrit, ce livre. Il s'intitule Blanès et il provoque de grandes et belles secousses, à travers une écriture qui chemine et s'insinue dans la vie d'une femme et dans nos têtes. Un beau roman, un beau Prix Rossel.