Après avoir inauguré cette collection Noctambule avec l’adaptation de « À bord de l’Étoile Matutine » de Pierre Mac Orlan et avoir propose une seconde passerelle entre les romans et la bande dessinée en s’attaquant au « Loup des mers » de Jack London, Riff Reb’s (« Le bal de la sueur », « Glam et Comet », « Myrtil Fauvette ») clôt sa trilogie maritime avec « Hommes à la mer ».
Au lieu de s’attaquer à un nouveau roman, l’auteur varie cette fois les sources en choisissant d’adapter huit nouvelles, qu’il entrecoupe intelligemment de doubles pages qui illustrent des extraits d’autres œuvres littéraires. Si Joseph Conrad (« Un Sourire de la fortune ») est à nouveau de la partie, l’auteur se frotte également aux textes de William Hope Hodgson (« Les Chevaux marins » et « Le Dernier voyage de Shamraken »), Pierre Mac Orlan (« La Chiourme » et « Le Grand Sud »), Edgar Allan Poe (« Une descente dans le Maelström »), Marcel Schwob (« Les Trois gabelous ») et Robert Louis Stevenson (« Le Naufrage »). Les sept doubles pages illustrant des extraits de textes de Victor Hugo (« Les Travailleurs de la mer »), Homère (« L’Odyssée »), Jules Verne (« Le Sphinx des glaces »), Eugène Sue (« Kernok le pirate »), Émile Condroyer (« Malgorn le baleinier »), Traven (« Le Vaisseau des morts ») ou encore Jack London (« Un typhon ») proposent des interludes de toute beauté, qui permettent de reprendre son souffle entre chaque récit.
« Il y a trois sortes d’hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont sur la mer. »
Si la mer est à nouveau omniprésente, le fait de s’attaquer à des histoires plus courtes ne permet pas à l’auteur de donner autant d’épaisseur à ses personnages et certaines histoires sont inévitablement moins intéressantes que les autres. J’ai particulièrement apprécié « Les chevaux marins », qui narre le destin tragique d’un enfant fasciné par les chevaux marins et par les histoires de son grand-père plongeur, ainsi que « Une descente dans le maelström » qui raconte les déboires de deux frères happés par un tourbillon. J’ai également beaucoup aimé la superbe conclusion de « Le Grand sud », qui se déroule dans un décor totalement différent et relate la dernière marche d’un équipage dont le navire à échoué sur la banquise. Le ton plus léger et le côté plus philosophique des derniers échanges entre un second et son capitaine à bord d’une embarcation condamnée à couler dans « Le Naufrage » m’a également beaucoup plu.
Si au niveau du scénario, ce troisième volet est légèrement moins bon, au niveau de l’ambiance, ces récits qui mêlent noirceur et poésie sont par contre à nouveau une très belle réussite. Une atmosphère sombre parfaitement rendue par une bichromie aux tons variables suivant les chapitres, qui renforce l’ambiance coin du feu de l’album. D’un trait appuyé, Riff Reb’s livre des personnages particulièrement charismatiques, aux visages marqués par un environnement souvent hostile. Un travail remarquable, minutieux, riche en détails et terriblement immersif qui démontre une nouvelle fois tout le talent de Riff Reb’s.
Que vous ayez le pied marin ou non, cette trilogie s’avère incontournable !
Un récit qui fait partie de la sélection officielle du Festival d’Angoulême 2015 !