Pour son quatrième long-métrage, Secret d’État, Michael Cuesta, connu davantage pour ses collaborations à Six Feet Under, Dexter et Homeland, réussi un sympathique film qui a le mérite de mettre à jour, surtout pour le public américain, l’histoire de Gary Webb, journaliste d’un petit journal de province, récipiendaire du prix Pulitzer à la suite d’un article mettant en cause la CIA dans un trafic de drogue. Il a fait appel à Jeremy Renner qui nous fait oublier ses seconds rôles dans les production Marvel, en interprétant le reporter avec justesse et émotion.
Gary Webb (Jeremy Renner) est informé par hasard de l’implication de la CIA dans le trafic de crack venant du Nicaragua. Il se saisit de l’affaire, enquête et décide de publier ses conclusions. Une campagne calomnieuse est alors organisée pour le déstabiliser.
Dawn Garcia (Mary Elizabeth Winstead) et Gary Webb (Jeremy Renner)
Secret d’État, c’est la phase cachée de l’administration américaine et de ses services de renseignements. Parallèle étonnant, avec un traitement plus sérieux, Secret d’État traite du même sujet qu’American Bluff dans lequel Jeremy Renner jouait un maire corrompu. À savoir, la limite fragile entre activité politique et légalité. Sous l’administration Reagan, ce dernier voulait lutter contre l’implantation communiste en Amérique du Sud, quitte à financer des milices fascistes. Au Nicaragua, son ambition était de financer les Contras, main dans la main avec Videla, général et dictateur argentin proche de l’idéologie nazie. Seulement, le Congrès américain lui refusa les crédits nécessaire. La CIA dut alors trouver d’autres financement à cette guerre idéologique. C’est ainsi qu’elle acheta la complicité de différents trafiquants de drogue nicaraguayens qui en échange d’une liberté de mouvement et de commerce, financèrent les opérations paramilitaires des contras. Naturellement, la drogue était revendu sur le territoire américain et se déversa sur les quartiers les plus défavorisés. Aux États-Unis, les gros dealers étaient protégés et l’on assista qu’à des arrestations mineurs alors même, qu’hypocrite menteur, Reagan faisait de la lutte contre la toxicomanie, un de ses cheval de bataille.
Norwin Meneses (Andy Garcia) et Gary Webb (Jeremy Renner)
En 1996, mis au courant de l’affaire par la femme, Coral Bacca (Paz Vega), d’un petit trafiquant, « Freeway » Rick Ross (Michael K. Williams, dont on a parlé pour American Nightmare 2), Gary Webb s’en saisit et rentra dans un jeu qui aller changer sa vie. Petit journaliste d’un quotidien provincial, il convint sa rédaction de le laisser enquêter et ainsi monta un dossier solide où ne manquait que le témoignage d’un membre de la CIA qui conforterait ses dires. Seulement, aucun témoignage ne vint, et devant le succès de son article, le prix Pulitzer lui fut remis. Devant l’affront, la CIA décida de lui couper l’herbe sous le pieds, avec les méthodes habituelles. La première fut de faire courir des rumeurs à son sujet comme le fait que la femme avec qui il avait trompé sa femme quelques années auparavant s’était suicidée. Une histoire réelle et tragique mais à laquelle le couple formé avec sa femme Susan (Rosemarie DeWitt) avait survécu. La seconde fut de convoquer tous les médias mainstream et pro-gouvernemental tel que le Washington Post pour publier des contre-enquêtes mensongères et le décrédibiliser. Ce qu’ils s’empressèrent de faire, la jalousie aidant, comme de bon laquais du pouvoir. Lâché par sa rédaction et muté dans un petit bureau, il démissionna. Il ne vivat plus jamais de son métier de journaliste. En 2004, Gary Webb a été retrouvé dans son appartement de Sacramento avec deux balles dans la tête. L’enquête a conclu à un suicide. Un suicide par plusieurs balles est possible mais extrêmement rare. Heureusement, nous ne sommes pas adepte de la théorie du complot chez la Graine. Depuis, la CIA a reconnu avoir eu des accointances avec les contras et les trafiquants de drogues nicaraguayen… En pleine affaire Lewinsky/Clinton, les aveux sont passés inaperçus…
Gary Webb (Jeremy Renner), « Freeway » Rick Ross (Michael K. Williams) et Russel Dodson (Barry Pepper)
Totalement contemporain, Secret d’État nous rappelle qu’aujourd’hui encore, on accuse de tous les maux les lanceurs d’alertes tel Julian Paul Assange ou que l’on condamne fermement des citoyens épris de liberté tel Chelsea Elizabeth Manning. Et que dans certains médias, le premier est qualifié d’agitateur et le second de traître.
Boeringer Rémy
Pour voir la bande-annonce :