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D’un écran à l’autre : Approches Socio-économiques – Partie 1

Publié le 04 décembre 2014 par Bruno Roch @brunoroch_fr

Mercredi 3 DÉCEMBRE 2014 – Première Session

Christophe Damour, Maître de Conférence à Strasbourg, est le médiateur de ces deux premières conférences du Colloque international : Culture & Médias numériques à l’ère de la diversité

INTERVENTION DE JEAN-PIERRE ESQUENAZI

Jean-Pierre Esquenazi travaille depuis de nombreuses années sur le cinéma et les séries télévisées à l’ère du numérique. Il écrit un premier texte en 1991, et les séries télévisées sont étudiées depuis peu de temps en France par rapport au pays anglo-saxons.

Il a réalisé deux enquêtes sur les publics : la première en 1997 à propos de la série Friends. durant laquelle il posa à des enquêtés la question suivante :  « Connaissez-vous les horaires de diffusions de la série TV ? » C’est un critère important sur la façon dont les jeunes étaient concernés par la série TV. La deuxième étude est entreprise à la fin des années 2000, époque où la plupart des enquêtés parlaient de séries télévisées. Aujourd’hui, on ne regarde plus les séries à la télé, mais sur d’autres média. Les horaires de diffusions n’ont alors plus d’intérêt.

On peut voir trois phénomènes :

1. Une mutation : il n’y a plus de rende-vous à heure fixe. Le modèle du rendez-vous, qui est le modèle de la télé,  est-il encore important, décisif pour ceux qui travail sur les séries télévisées. Il est aujourd’hui concurrencé, mais ne s’efface pas complètement. En septembre 2014, les séries télévisées sont en primetime sur TF1 du lundi au vendredi, et sur M6 le reste de la semaine. Les programmes qui ont le plus d’influences sont les séries télévisées. Très souvent ce modèle est lié à un type de série, fermée et autonome qui peuvent être regardées indépendamment des autres . Les séries feuilletons sont celles regardées en téléchargement.
Amazon et Netflix créé leurs propres séries télé ce qui montre que les acteurs du numérique deviennent aussi producteurs, et testent leurs productions auprès de leurs publics.

2. Retourner aux origines : le tout début des séries télévisées est aux USA, où la télévision se regardait dans les lieux publics, La télévision était faite pour les gens qui sortent du travail (18h), le sport, etc…, Pour que la télévision s’installe chez les gens, il a fallu un essor économique, et la création des suburbs, les banlieues chics américaines. Les individus voulaient avoir des divertissements chez eux sans devoir retourner en ville pour se divertir. La télévision s’adresse alors aux familles qui se retrouvent autour du poste. Les programmes de télévision vont prendre comme modèle la vie familiale. la grille de programme, programme une série de rendez-vous pour les différents membres de la famille selon la disponibilité  de chacun. La vie de famille est constituée de rituel régulier et les jeux télévisés s’installe à partir de ce moment là, ainsi que les informations régulières. Au plan de la fiction, la série télévisée  s’impose et remplace les anthologies. Des accords vont se faire entre Hollywood et les sociétés de télévisions (CBS, par exemple). Les séries télévisées occupent les premiers rangs dans les programmes préférés des Américains. Les individus prenaient rendez-vous avec leurs séries télévisées préférées encore en 2008.
On peut remarquer un essor des tactiques des spectateurs à cause de la multiplication des choix : arrivée du câble, rediffusion, choix entre différents heures de diffusion. La loi Johnson va modifier le contexte : les producteurs de séries peuvent vendre leurs séries télévisées plusieurs fois, à plusieurs chaines, ainsi que l’arrivée des magnétoscope  et la possibilité de l’enregistrement.

3. Déprogrammation des série télévisées : recherche inspirée par le travail d’autres chercheurs présents dans la salle.

On peut alors réfléchir  autour de trois axes principaux :
– l’autonomie de visionnage : reste-on prisonnier de la grille des programmes ? ou devient-on auto-programmateur.
– les interfaces connectées : un ou plusieurs écrans. l’utilisation multimodal.
– la participation : est-ce que les gens regardent seul pour leur propre compte, ou partagent-ils ? l’auto-prescription est de mise. nouvelles figures de spectateurs : télé-visionneur (utilisateur d’internet en solitaire) et télé-acteur (création de sous-titre, de commentaires sur les séries, partage, …).

La production de cet objet dépend des tactiques des spectateurs. Ces processus ont produit de nouveaux acteurs. Les consommateurs semblent pouvoir suscité aux producteurs de télé des idées qu’ils n’auraient pas eu tout seul.

Pour conclure, la résilience des formes : le film de cinéma n’est pas né avec le cinéma, il s’est produit une interaction entre les publics et les producteurs de films. La forme telle qu’on la connait s’est imposée progressivement dans le contexte des Etats-Unis des 10’s contre le court métrage et le documentaire. Mais ce n’est pas le contexte du monde entier, mais malgré tout, le format du film s’est maintenu. La forme a résisté aux changements sociaux et aux différences géographiques. La forme traverse les contextes. Est-ce que les séries pourront-ils traverser les contextes ? Car les séries télévisées sont attachés aux calendriers des épisodes. Cette question est attachée à l’avenir des séries télévisées et du nom qu’on pourra leur donné. Si les séries télévisées résistent contre les contextes, on pourra toujours les appeler « séries télévisées » et si la forme se transforme on pourra les appelé « séries numériques ». C’est une question ouverte.

INTERVENTION DE GENEVIEVE SELLIER

Présentation de son ouvrage : Ignorée de tous… sauf du public. Quinze ans de fiction télévisée française 1995-2010.
Le sujet de sa recherche est le film fiction unitaire (qu’on pourrait aussi appelé le téléfilm). C’est un des objets culturels les plus méprisés. Il met en jeu les difficultés de la société française. Depuis 1980, les chaînes de télévisions française mettent en place le film fiction unitaire. Cette production a été très peu analysée, car son objet est méprisé vis-à-vis du film de cinéma.
Il est destiné aux spectateurs uniques et se développe en face de la publicité. Avec la médiamétrie, on peut remarquer que les spectateurs sont surtout des femmes. Ces téléfilm sont d’une grande clarté narrative contrairement un long métrage cinématographique. Ces films sont très en retard face aux superproductions américaines et françaises qui peuplent les salles de cinéma. Le pure divertissement est laissé au jeux télévisée, il n’y a donc pas de place pour les téléfilms. La Nouvelle vague n’a pas tué le cinéma français, mais a tué le cinéma de qualité. Ces téléfilms ne sont diffusés qu’une ou deux fois, et ne font pas l’objet de critiques ni de recherches universitaires (sauf celle-ci présentée ici). Toutefois, et paradoxalement, les films fictions unitaires rassemblent plus d’individus que les plus populaires des films de cinéma.

Le genre dominant est le mélodrame, ensuite la comédie de mœurs, le troisième genre dominant est la fiction historique, puis le biopic. Enfin, le policier est le parent pauvre de la fiction unitaire.
Dans l’industrie du film de fiction unitaire, beaucoup de réalisateurs sont liés à des scénaristes. Et quand beaucoup de réalisateurs sont des hommes, les scénaristes sont plutôt des femmes.


On peut penser que le format du film unitaire va mourir en faveur de la série télévisé qui est plus rentable économiquement.



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