Dans son nouvel ouvrage, Eve Lerner décide d’illustrer avec brio l’idée que le langage n’est pas qu’un simple outil de communication. Il est avant tout une invention, un plaisir de chaque instant.
« A l’époque, j’entendais de la bouche de ma mère le sens trivial et lui seul. Après, bien après, j’ai commencé à entrevoir un sens noble. Dans sa littéralité, l’expression devient quelque chose de grand. Car en y réfléchissant, on ne peut rien faire de bien sur le chemin de la vie si on n’a pas « l’âme chevillée au corps ». Si le corps vit sa vie en lui et pour lui, s’il n’est concerné que par la seule exaltation des sens,sans la force de l’âme, on tombe très vite dans le superficiel et dans le dérisoire »
Romancière issue du milieu ouvrier, elle a grandi durant les années 50. Elle décide ici de faire appel à ses souvenirs d’enfance pour nous conter son histoire à travers les expressions riches et imagées (« Il a pas une tête à sucer de la glace ») qu’elle entendait au quotidien. Elle raconte comment son imagination et le langage l’ont aidé à s’évader d’une vie difficile, comment silencieuse elle absorbait tous les mots qu’elle entendait. Elle observe, écoute, est toujours aux aguets pour trouver une échappatoire.
Au bout du récit, c’est tout une époque qui reprend vie sous nos yeux. Ces mots sont puissants, tout en son et en image, ils nous transportent, nous dévorent, nous font revivre. Les talents de poète de la romancière sont alors indéniable. Le tout est incroyablement émouvant tout en étant drôle et bourré de tendresse à l’égard de la mère de la romancière à qui ce livre est dédié. Eve Lerner mélange petite et grande Histoire pour offrir un récit intimiste qui prend toute son ampleur dès qu’on en dévore les mots.
« Elle confirme que le langage n’est pas uniquement un utilitaire de communication mais que l’invention et le principe de plaisir y sont presque toujours à l’œuvre. »
L’âme chevillée au corps de Eve Lerner
Ed. Editions Dialogues / Déjà disponible en librairie