La guerre de Troie n’a pas eu lieu

Publié le 30 novembre 2014 par Morduedetheatre @_MDT_

Critique de Troyennes, vues le 15 novembre 2014 au Théâtre 13
Avec Blade, Mounya Boudiaf, Kevin Keiss, Adrien Michaux, Pierre Mignard, Marie Payen, Valentine Vittoz et Lou Wenzel, dans une mise en scène de Laetitia Guédon

Puisque le thème de La Guerre est à l’honneur cette année en prépa scientifique, je ne pouvais pas rater cette représentation des Troyennes d’Euripide, qui se donnent actuellement au théâtre 13. Malheureusement, le texte, bien que grandiose, ne résonne que faiblement dans cette mise en scène de Laetitia Guédon.

La guerre de Troie est finie. Seules les femmes restent, tous les troyens ayant été tués pendant les affrontements. Que va-t-il advenir d’Hécube, d’Andromaque, de Cassandre, et d’Hélène ? Chez quel Grec devront-elles partir en esclaves ? Quel avenir leur réserve-t-on ? La pièce est un déchirement, d’un bout à l’autre. On devrait pleurer avec Hécube, dont la souffrance irradie la pièce. Seulement ici, l’émotion ne passe pas. A se demander si les acteurs eux-mêmes ressentent quelque chose lorsqu’ils jouent.

Pas l’ombre d’un sentiment. Malgré un texte fort, on reste de marbre face au désarroi de ces femmes. On accuse la mise en scène, qui manque d’idée : Hécube crie bien trop, mais le cri n’est pas forcément le meilleur moyen de transmettre le désespoir. L’actrice, trop jeune pour le rôle, ne semble pas percevoir tous ses aspects. Le reste de la distribution suit ce jeu sans flamme. Seule Lou Wenzel parvient à nous faire croire à sa Cassandre et à sa folie. Kevin Keiss enfin, qui incarne le choeur, est peut-être le symbole même de l’échec de la pièce : qu’un homme incarne le choeur de femmes dans une pièce telle que Les Troyennes n’a aucun sens ; mais qu’en plus il massacre son texte par une diction presque vulgaire : la portée dramatique tombe à l’eau.

Si la direction d’acteurs laisse à désirer, il en est de même pour la mise en scène : pourtant le décor semblait une bonne idée : à jardin, on reconnaît des camps dans lesquelles étaient enfermées les femmes, attendant leur peine future. Mais si il est présent sur scène, il n’est jamais utilisé, et seul le plateau nu reste pour les comédiens : des lumières très restrictives, mettant l’accent sur un jeu à la fois, comme en gros plan, limite les déplacements, ce qui donne un tout très statique. Sans grande signification. On abrège sur les paillettes qui tombent à plusieurs reprises sur les spectateurs, ainsi que sur les messages bien pensant des élèves d’un collège d’Aubervilliers. Le ton de la pièce n’est pas là. Nous non plus.

On préférera relire la pièce, plutôt que conseiller le spectacle. A éviter.